Finances et pouvoir politique en Artois sous le règne de Mahaut (1302-1329)
p. 67-86
Texte intégral
1Dans un article publié en 1997, Bernard Delmaire s’interroge, à propos d’un différend financier survenu en 1329 entre le roi et la comtesse d’Artois : « pouvaient-ils se fier à leurs documents comptables1 ? ». Le problème des compétences des officiers comtaux chargés des finances se pose effectivement, étant donné l’incapacité de chacune des deux parties à faire prévaloir ses droits.
2L’abondance des comptes disponibles et les améliorations progressivement apportées à leur présentation sont la preuve de l’attention croissante accordée au gouvernement des finances en Artois, mais ne suffisent pas à garantir une bonne gestion des revenus comtaux : il faut aussi prendre en compte la compétence du personnel employé et la capacité du pouvoir à contrôler les mouvements de fonds dans l’ensemble de la principauté.
3Mahaut d’Artois dispose-t-elle en définitive d’institutions financières efficaces, dignes d’une principauté ?
I- Documents et techniques comptables
La diffusion de l’écrit
4La multiplication des documents financiers est liée à une double évolution : d’une part, la diffusion de l’écrit, accompagnée d’un goût du chiffre de plus en plus marqué dès le XIIIe siècle, favorise l’amélioration des techniques comptables ; d’autre part, les besoins financiers accrus des principautés les incitent à améliorer leur gestion financière ou à rechercher de nouveaux types de revenus.
5Les premiers cadastres urbains apparaissent en Italie, les pièces comptables se multiplient en Angleterre – Pipe Rolls – et dans le royaume de France2. Tandis que les registres de papier se généralisent dans les principautés méridionales dès le XIIIe siècle, les rouleaux perdurent en Savoie, et surtout, dans les régions septentrionales3. Ce support existe en Angleterre, en Flandre, en Brabant pour les officiers subalternes, en Hainaut ou encore en Bretagne jusqu’à la fin du XIVe siècle4. En Artois, les comptes de bailliages et les comptes particuliers du receveur sont transcrits sur des rouleaux de parchemin.
6En Savoie, le comte Pierre commence à exiger de ses châtelains des comptes transcrits sur rouleaux à partir des années 1240, tandis qu’en Hainaut le comte reprend en main la gestion de ses revenus, jusque-là affermés, à la fin du XIIIe siècle5. C’est également au tournant des XIIIe et XIVe siècles que le comté d’Artois se dote des outils financiers qui seront les siens jusqu’à son intégration dans le comté de Flandre en 1382, à la mort de Marguerite d’Artois, puis dans le duché bourguignon, en 1384, à la mort de Louis de Male.
7En Artois, avant 1300, les sources comptables se limitent à quelques documents isolés : le Gros brief de 1187 d’une part ; les comptes de bailliages et prévôtés de 1202-1203, 1227 et 1234, parfois lacunaires, d’autre part6. De 1283 à 1291, le bailli d’Artois tient des comptes généraux incluant son compte particulier et ceux des baillis locaux. Il en subsiste aujourd’hui onze rouleaux, incomplets ou réduits à l’état de fragments7. De 1291 à 1299, alors que Robert d’Artois se trouve éloigné de sa principauté pour le service du roi de France, les maîtres d’Artois rédigent des registres annuels, aujourd’hui disparus, regroupant leurs comptes particuliers et ceux des baillis locaux pour les trois termes8. À partir de 1299, le receveur d’Artois en reproduit le principe dans ses comptes généraux9.
8Les ratures apparentes sur la plupart des comptes de bailliages nous font penser qu’ils ne sont que des épreuves qui, après vérification et correction, fondent le travail du receveur. Avec les comptes particuliers de ce dernier, ils sont archivés mais très rarement utilisés.
9En revanche, les comptes de l’Hôtel et les comptes généraux du receveur, destinés à une consultation régulière, sont rédigés sur des registres. Les premiers, consignés sur papier, ne sont pas appelés à durer. Ce sont donc les comptes généraux du receveur, transcrits sur parchemin, qui constituent le document de référence de la comptabilité artésienne.
10Les sources financières, réparties pour l’essentiel entre le Trésor des chartes d’Artois et les archives de la Chambre des comptes de Lille, sont aujourd’hui encore très abondantes. Les comptes de bailliages, en particulier, témoignent des « tâtonnements » des scribes qui expérimentent encore différentes présentations10.
La présentation des comptes de bailliages
11Les rouleaux sont vraisemblablement rédigés membrane par membrane. C’est le clerc chargé de la rédaction qui estime au mieux l’espace nécessaire à chaque poste de dépenses en prenant modèle sur le compte précédent. Certains paragraphes sont en effet recopiés d’un terme à l’autre, comme les « rentes en deniers », les dépenses de gages ou encore les aumônes11. Ensuite, les membranes sont rassemblées par un autre clerc. Le scribe lui transmet ses consignes au dos du rouleau de son compte de la Toussaint 1306 : Mikiel, rieulés ces raules et les tailliés le plus large que vous porés et de tele espasse de rieule ; Mikiel, rieulés ces raules de tele espasse12. Le clerc peut donc, jusqu’à la fin du terme comptable, rajouter des membranes entre les différentes rubriques. Cette méthode suggère que les comptes sont établis au fur et à mesure du terme, sans brouillon préalable. En effet, les dépenses du bailliage semblent rédigées dans l’ordre chronologique.
12Si le latin reste la langue de rédaction des comptes royaux, il a déjà cédé la place au français dans l’apanage artésien lorsque Mahaut d’Artois arrive au pouvoir13.
13La présentation des comptes de bailliages est toujours la même. Le clerc commence par rappeler le nom du bailliage et du bailli, puis la date : Chest li comptes de le baillie d’Arras dou tamps Aliaume Cacheleu, bailli d’Arras, du terme de l'Ascención l’an 132814. Il énumère ensuite les recettes, selon un ordre toujours identique : les cens et rentes, les ventes de bois, les recettes et ventes de grain, et enfin les exploits. Vient ensuite le chapitre des dépenses, qui se répartissent entre les gages, les aumônes, les dépenses du bailliage et les œuvres, c’est-à-dire les travaux. Le compte se termine par le solde et l’énumération des restes de grains15.
14Cette structure se maintient tout au long du règne de Mahaut, non sans quelques modifications qui témoignent d’un souci de rationalisation de la gestion financière.
15C’est ainsi qu’apparaissent épisodiquement de nouvelles rubriques, comme les reliez16. D’autres peuvent fusionner ou, au contraire, se scinder au fur et à mesure que certains postes de recettes ou de dépenses perdent ou gagnent de l’importance. Dans le bailliage d’Arras, la « Recepte de fourfaitures », s’intercale entre la « Somme des rentes d’Arras en deniers » et les « Rentes de Houdaing » à la Toussaint 1308, alors que les forfaitures étaient initialement comptabilisées dans le chapitre des cens et rentes17. Cet ajout s’impose dès la Chandeleur 1310, puisqu’il se maintient dans tous les comptes suivants. Dans le même esprit, on peut noter l’insertion d’une rubrique consacrée aux aumônes, dans les bailliages d’Arras et de Tournehem, dans les années 132018. À l’inverse, les postes financiers peu importants des reliefs, octrois et exploits forment, dans le bailliage de Tournehem, une seule et même rubrique à partir de l’Ascension 132519.
16Il semblerait donc que, dans un but d’uniformisation, l’administration centrale impose la trame générale des comptes en diffusant des formulaires.
17Chaque rédacteur dispose néanmoins d’une certaine marge de liberté dans ses choix de présentation. Reprenons l’exemple de la rubrique des reliefs, octrois et exploits dans le bailliage de Toumehem. Cette catégorie est introduite pour la première fois à la Chandeleur 1320, dans les comptes de Gilbert de Nédonchel20. Dès le terme suivant, il est remplacé par Enguerrand le Caucheteur, dont on a conservé les comptes jusqu’à la Chandeleur 1323 : dans chacun des sept comptes subsistants, les reliefs et les exploits font l’objet de paragraphes différents. C’est son successeur, Enguerrand de Wailly, qui revient à la fusion des rubriques, sur le modèle de la Chandeleur 1320.
18La personnalité du clerc influe également sur la forme du compte et sa lisibilité. Dans la plupart des rouleaux, chacune des rubriques forme un paragraphe compact mais, dès le début du règne de Mahaut, certains clercs adoptent une présentation sous forme de colonnes, ce qui en facilite la lecture21. Cette disposition, déjà en vigueur à la Chandeleur 1304 dans le bailliage d’Aire, ne se diffuse réellement que plus tard et de manière inégale22. Elle est définitivement adoptée dans le bailliage de Tournehem à partir de 1320, mais ne s’impose pas à Arras, où un seul compte est rédigé sur ce modèle23.
19Ces choix s’expliquent soit par les habitudes du rédacteur du compte, soit par des soucis d’économie : les comptes d’Arras, beaucoup plus denses que ceux de Toumehem, consommeraient trop de parchemin s’ils étaient rédigés sur ce schéma. Ils ne peuvent être la conséquence d’un retard de l’administration artésienne puisque l’utilisation des colonnes, même si elle est avérée dès la première moitié du XIIIe siècle dans les comptabilités normandes et françaises, reste généralement peu usitée au début du XIVe siècle24.
De la monnaie réelle à la monnaie de compte
20La tâche des comptables artésiens est d’autant plus ardue qu’ils manipulent des sommes importantes, versées sous différentes formes et dans des monnaies très variées.
21Les comptes de bailliages révèlent que certains des sujets comtaux payent leurs rentes en nature, le plus souvent en blé, avoine ou chapons. D’autres s’acquittent de leur dû de manière plus surprenante : à la Toussaint 1303, par exemple, le bailli d’Arras reçoit de Jean d'Estraiel, pour allues que il tient, une allonge d’espervier25 ; à l’Ascension 1304, il obtient de Pierot d’Autevil, pour cou que il se rescoust a Parentel, serjant ma dame, et jeta lui d’une espee, pour se pais, 10 £ et un bachinet a visiere que li baillus a26.
22Les chapons sont immédiatement vendus et c’est la valeur de la vente qui figure dans les comptes27. Les grains approvisionnent les garnisons comtales, ils peuvent aussi être vendus s’ils sont de mauvaise qualité ou trop éloignés du lieu de stockage. Le cas échéant, le clerc indique les opérations correspondantes à la suite du récapitulatif des recettes qu’il prend soin de placer à la fin de chacune des rubriques28.
23Les versements en argent, majoritaires, s’effectuent en différentes espèces monétaires. Même si la comtesse d’Artois bat monnaie jusqu’en 1315, les deniers artésiens sont totalement absents des comptes. En revanche, les pièces étrangères sont nombreuses dans les recettes du trésorier29. Les parisis, tournois, bourgeois, gros, mailles, florins ou agnels, émis par la royauté française, côtoient le florin de Florence et l’esterlin anglais.
24Toutes ces pièces sont converties en monnaie de compte, selon un cours variable en fonction de la politique monétaire des rois de France30. Seules les monnaies royales maintiennent un rapport fixe de quatre deniers parisis pour cinq deniers tournois.
25Philippe le Bel est le premier à recourir aux mutations monétaires pour faire face à l’augmentation du prix des métaux précieux. Il utilise, successivement ou simultanément, les deux méthodes qui s’offrent à lui : le relèvement de la valeur nominale des pièces par rapport à la monnaie de compte et la diminution du titre de métal précieux dans des pièces conservant le même cours.
26Il commence par modifier la valeur officielle du gros tournoi, créé par saint Louis en 1266, qui est la pièce de référence en Occident. À l’origine, le gros pèse quatre grammes seize d’argent et vaut douze deniers tournois. Avec un titre et un poids inchangés, il correspond à treize deniers tournois en 1292, puis quinze en 1302. Les anciens gros, de meilleur aloi, s’échangent alors pour trente-et-un deniers parisis et demi, soit trente-neuf deniers tournois trois huitièmes.
27Face à l’inefficacité de ces mutations nominales, le roi poursuit sa politique de dévaluation monétaire. Il ordonne, en 1303, l’émission d’un nouveau gros, qui conserve son poids, mais voit son titre abaissé d’un quart. Son cours est fixé à vingt-quatre deniers tournois un quart ou vingt-et-un deniers parisis. Cette « monnaie faible » est émise jusqu’en 1305, date à laquelle le retour à la bonne monnaie est envisagé. Une ordonnance du 3 mai annonce la frappe de nouveaux gros, aux conditions antérieures à 1303. Ces nouvelles pièces, d’un meilleur aloi que les précédentes, risquent cependant d’être thésaurisées. Pour éviter ce problème, le roi fixe leur cours à trois deniers de la « monnaie faible ». Avec les tournois et parisis antérieurs à l’émission de 1303, de même poids, de même titre et donc de même valeur, ils forment la « forte monnaie ».
28Même si le retour à la bonne monnaie est officiellement décidé le 8 septembre 1306 et marque un retour à la situation de 1290, le gros valant treize deniers tournois et un huitième, la « faible monnaie » continue de courir. Elle est encore présente dans les comptes de bailliages artésiens, jusqu’à l’Ascension 1307 à Arras et Tournehem31. La circulation simultanée de deux types de pièces complique la tâche des clercs qui doivent convertir en « forte monnaie » la plupart des espèces reçues.
29En 1311, face à la hausse du prix des métaux précieux qui se poursuit, Philippe le Bel modifie à nouveau le cours du gros, qui passe à quinze deniers tournois. De nouvelles pièces sont émises : l’agnel et le bourgeois. Le bourgeois fort court pour deux deniers parisis, alors que sa valeur intrinsèque ne correspond qu’à deux derniers tournois ; il subit donc un surhaussement d’un quart. Le bourgeois simple correspond à l’ancien denier parisis. L’agnel vaut vingt sous tournois.
30En 1313, la monarchie tente un nouveau retour à la bonne monnaie : le cours du bourgeois fort et simple est progressivement ramené à deux deniers tournois et un dernier tournoi, le gros à douze deniers tournois. L’agnel passe à quinze sous tournois puis douze sous six deniers tournois en 1316. Mais cette volonté de stabilisation monétaire ne résiste pas à l’augmentation des prix de l’or et de l’argent et la monnaie ne cesse de s’affaiblir entre 1318 et 1330.
31La frappe du gros, interrompue depuis plus de dix ans, reprend en 1318. Son titre est maintenu mais sa taille est réduite et son cours passe de douze à quinze deniers tournois. La valeur de l’agnel, passée à douze sous six deniers tournois en avril 1316, est fixée à quinze sous parisis, soit dix-huit sous et neuf deniers tournois, par ordonnance du 15 octobre 1322.
32La thésaurisation des espèces monétaires permet parfois de réaliser un profit, ce que les comptables appellent le gaaing de monoie. Encaissées à un certain cours, les pièces peuvent être réutilisées à une valeur supérieure. Le bénéfice est fonction du taux de change par rapport à la monnaie de compte. Le 8 février 1322, par exemple, le receveur d’Artois reçoit quatre cents florins de Florence, pour un montant de six cents livres tournois. Lorsqu’il les utilise quelques mois plus tard, chaque pièce vaut quatre deniers de plus. Il encaisse donc un bénéfice de six livres treize sous et quatre deniers porté au chapitre des recettes32. Le trésorier effectue aussi des opérations similaires qui lui permettent de gagner jusqu’à quatre-vingt-quinze livres en 131733.
33Ces remuements monétaires exigent donc des comptables une bonne connaissance des textes royaux et une certaine aisance dans le maniement des chiffres.
34Dans la pratique, cependant, le cours officiel des monnaies n’est pas toujours respecté34. D’après les comptes, l’agnel est négocié au-dessus de son cours légal, fixé à douze sous et six deniers tournois en 1316 : le 8 novembre 1319, il est à quinze sous parisis, soit dix-huit sous et neuf deniers tournois, et, le 7 août 1320, il vaut quinze sous quatre deniers parisis, soit dix-neuf sous deux derniers tournois. Le florin à la reine, denier d’or exceptionnel frappé pour acquitter les aumônes prescrites par le testament de Jeanne, femme de Philippe le Bel, est décrié dès 1310 mais toléré bien après, puisqu’il figure encore dans les comptes du trésorier en 1314 et 1315.
35Pour compter, les clercs s’aident d’un comptoir et de jetons35. Le comptoir est une tablette divisée en six bandes horizontales réservées aux milliers, centaines, dizaines, livres, sous et deniers. Le jeton prend sa valeur selon la place où il est « jeté », c’est-à-dire déposé. Pour clore ses comptes, le comptable doit « déjeter », c’est-à-dire remplacer chaque ensemble de jetons par son équivalent dans la valeur supérieure : douze jetons ôtés de la rangée des deniers sont remplacés par un seul jeton sur la ligne des sous, vingt jetons retirés des sous deviennent un jeton au niveau des livres. L’opération est normalement renouvelée jusqu’à réduction maximale du nombre de jetons mais certains comptables évitent les opérations et renoncent parfois à faire ces réductions. En 1318, par exemple, le clerc du trésorier note un total de cent quinze sous et dix deniers au lieu de cinq livres, quinze sous et dix deniers36. La pratique est également courante dans les comptes de bailliages.
36La diversité des monnaies manipulées, les variations successives des cours et une méthode de calcul complexe sont la cause de nombreuses erreurs de calcul, parfois importantes, qui émaillent les comptes et obligent à des contrôles réguliers.
II - Une administration centralisée mais complexe
De multiples acteurs
37Les sources livrent l’image d’une administration centralisée dont le pivot est le receveur d’Artois. Chargé de collecter les revenus des bailliages et de les redistribuer pour les besoins de l’Hôtel, il joue le rôle d’intermédiaire entre les finances locales et centrales du comté37.
38Il est le bailleur de fonds à qui la comtesse s’adresse lorsqu’elle a besoin de liquidités : en mai 1303, elle écrit depuis Paris pour lui réclamer huit cents livres. C’est le receveur qui doit rassembler la somme et en assurer l’acheminement jusqu’à la capitale38. Il doit aussi obéir aux ordres de paiement de Mahaut, donnés par mandement. En juin 1303, elle le charge de payer deux marchands de vin de la Rochelle auxquels elle doit quatre cent trente-deux livres parisis, pour la vente et le transport jusqu’à Hesdin de vingt-quatre tonneaux de vin blanc :[...] Et mandons et commandons a notre recheveur, quiconques il soit, qu’il as dis marchons faice paiement de la somme de monnoie desus dite, de quelconques monnoie qu’il ara dou notre, et prenge lettres de quitance des dis marceans, lesqueles nous volons qui li vaillent a se cautele avoec ces presentes lettres [...] 39 · Les deux marchands sont payés par Colart de Hénin le 18 novembre 1303, comme en atteste la quittance du même jour.
39À toute opération financière extraordinaire correspondent donc un mandement et une quittance, qui valent caution pour l’officier de finances. Ces pièces justificatives ou cauteles – cautele en latin – sont aussi appelées apodixes. Ce terme grec, inspiré du vocabulaire de l’administration napolitaine, introduit par les clercs de Robert II, tombe en désuétude après 1304. Les documents, exceptionnellement nombreux dans le Trésor des chartes d’Artois, permettent de reconstituer le fonctionnement des institutions financières40.
40Ils montrent que les intermédiaires sont nombreux entre le donneur d’ordre, en l’occurrence la comtesse, et le créancier. Prenons un exemple. En juillet 1314, le trésorier Étienne Bricadel doit verser quarante livres de gages à Isaac de Wierre. Pour obtenir cette somme, il s’adresse à Mahaut, qui est la seule à pouvoir ordonner un paiement. Celle-ci demande alors à Mathieu Cosset, son receveur, de fournir la somme nécessaire à son trésorier. Ce dernier charge Pierre Bruyère, chapelain du jeune Robert, de récupérer l’argent. Une fois les quarante livres réunies, Étienne Bricadel les verse à leur destinataire. L’exécution de l’ordre comtal mobilise donc trois officiers et nécessite la production de quatre documents, un mandement et trois quittances de Pierre Bruyère pour Mathieu Cosset, d’Étienne Bricadel pour Pierre Bruyère et d’Isaac de Wierre pour Étienne Bricadel41.
41Les mandements comtaux s’adressent le plus souvent au receveur d’Artois mais ils peuvent aussi concerner le trésorier42. La comtesse peut enfin, mais plus rarement, solliciter directement ses baillis, en général au sujet de gages ou d’aumônes43. En revanche, ces derniers obéissent à de nombreux ordres de paiement de Thierry de Hérisson44. La comtesse se réserve toute autorité sur le receveur et le trésorier mais accorde à son lieutenant le droit de commander les baillis pour disposer à son gré des finances locales.
42Les institutions financières sont donc organisées selon une structure pyramidale dont la comtesse est le sommet. Le receveur, qui occupe une position centrale dans ce dispositif, devrait, en théorie, assurer le lien entre la comtesse et le trésorier d’une part, la comtesse et les baillis d’autre part. Mais, dans les faits, Mahaut s’adresse tout autant, sinon plus, au trésorier qu’au receveur. Le trésorier, qui reçoit des fonds directement d’autres personnes que du receveur, dispose effectivement d’une certaine autonomie par rapport à ce receveur d’Artois. La gestion des finances, quoique de plus en plus ordonnée et centralisée, manque encore de précision.
43La répartition des tâches entre les différents officiers de finances reste très confuse45. La perception des revenus du domaine n’est pas réservée aux baillis. Le receveur lui-même perçoit des bénéfices tirés de la vente de bois, de grains, lapins ou chevaux46, ainsi que certaines amendes et péages47. Il empiète de ce fait sur les prérogatives des baillis sans raison évidente. Le même désordre caractérise les dépenses. Le cas le plus frappant est celui des aumônes, à la fois versées par les baillis, le receveur et le trésorier.
44À l’échelle locale, il n’existe pas toujours de personnel spécialisé, tels les receveurs ordinaires qui exercent dans d’autres principautés48. Dans la châtellenie bourbonnaise, par exemple, le receveur ou prévôt-receveur est l’officier responsable de toutes les questions financières49. En Artois, les seuls receveurs attestés sont ceux des bailliages de Calais, Marck, Aire et Béthune. Encore faut-il préciser qu’à Béthune le bailli cumule souvent les titres de bailli et receveur.
45La gestion des finances pâtit en outre de la dispersion des archives et des officiers comtaux. Même si certains efforts de rationalisation sont entrepris en ce qui concerne la conservation des archives, en particulier comptables, une autre difficulté est de maintenir le contact entre les différents officiers de finances. Le trésorier accompagne la comtesse tandis que le receveur d’Artois réside à Arras et les baillis sont dispersés dans l’ensemble du comté50. Quoique nombreux, les échanges épistolaires ne suffisent pas à la mise en place d’une véritable politique financière.
46L’organisation comptable de l’Artois reste en définitive très complexe : éclaté entre de multiples acteurs, le gouvernement des finances manque de cohérence. La comtesse semble pourtant de plus en plus soucieuse de recruter des hommes qualifiés, qui maîtrisent davantage les techniques comptables, sans pour autant exclure la noblesse de son service. Chevaliers, clercs, bourgeois et maîtres se partagent le gouvernement des finances comtales et rendent des comptes dont il faut ensuite vérifier l’exactitude.
Un embryon de Chambre des Comptes
47L’objectif premier de cette comptabilité est de livrer au prince l’image la plus fidèle possible de ses ressources et revenus.
48La tâche des comptables, que la manipulation et la conversion de diverses monnaies rendent déjà ardue, est encore compliquée par les jeux d’écritures. Le bailli accepte les paiements étalés ou différés51. Ceci multiplie les risques d’oubli et il est fréquent que le bailli enregistre des dépenses qui auraient dû figurer dans un compte précédent : Pour les vidimus fais sous le seel de Chastelet pour les adjournemens desusáis, 4 s., et furent ces daerraines parties oubliees a conter a le Toussains, 4 s. ; pour pisson presenté au doyen de Tours et a monseigneur Guillaume de Plaissen quant il furent a Arras le diemence devant le Saint Symon et Saint Jude, 12 £ oubliés a conter aus contes de la Toussains, 12 £.52
49La vérification des comptes permet de minimiser les erreurs, qui vont d’un écart de quelques sous à plusieurs centaines de livres. Si les premières peuvent être imputées à la complexité des modes de calcul, d’autres sont plus surprenantes : dans le compte du bailliage d’Arras de la Toussaint 1306, le clerc additionne des dépenses de gages exprimées en tournois et en parisis sans effectuer de conversion53. Rien n’indique que cette faute, mineure puisqu’elle ne joue que sur quelques livres, ait été repérée par les auditeurs des comptes, qui auraient dû biffer et remplacer la somme initiale54.
50En revanche, de nombreux documents portent la trace de leur passage, comme ce compte du bailliage d’Arras de l’Ascension 1308, où la somme des exploits initialement indiquée par le clerc, soit quatre-vingt-neuf livres et dix-huit deniers, est barrée et revue à la baisse. Le montant retenu s’élève finalement à soixante-quatorze livres, onze sous et trois deniers obole55.
51Le travail des auditeurs est visible grâce aux différences dans la couleur de l’encre qui permettent de distinguer les parties qui leur sont dues. Ils n’hésitent pas à rajouter des éléments dans les interlignes pour apporter des précisions sur les dépenses. Quelques comptes, très raturés, sont presque illisibles, à l’exemple de celui du bailliage d’Arras rendu à la Toussaint 1319 ou de celui du bailliage de Tournehem de l’Ascension 132056.
52Dans ce même bailliage, le compte de la Toussaint 1327 montre que le clerc du bailli a laissé la place pour noter les dépenses d’aumônes totales, mais l’auditeur des comptes ne la complète pas. Au contraire, il indique dans la marge : il ne sont point compté pour ce qu’il dist qu'il ne les a mie payés et si non a nulle lettre57.
53Certains documents sont agrémentés de commentaires détaillés de l’auditeur, tel ce fragment non daté d’un compte du bailliage d’Aire, qui dénonce les détournements opérés dans la circonscription : On dist que on rechoit plus de capons et ghelines que on ne compte, ne sai combien. Qui remesurroit les bos quant il sont copé, je croi que ce serait boen, et que on trouverait plus de mesure que on n’en vent ne que on n’en compte58.
54L’auditeur a pour tâche d’indiquer les montants des dépenses après vérification des pièces justificatives, les mandements et quittances. Le compte du bailliage de Tournehem de l’Ascension 1307 précise que Godart Goupilleur n’a pas touché ses gages au terme de la Chandeleur pour ce que li bailliu n’avoit mie lettres de commandement59. L’auditeur rédige ensuite des estrais, résumés chiffrés du bilan comptable.
55Après vérification, les baillis vont payer ce qu’ils doivent au receveur d’Artois : Pour porter lettres a tous les baillis de le conté d’Artoys le joesdi apres le Sainte Lusce qu’il venissent payer au receveur a Arras tous leur debes [...] de quoy il avoient compté a Madame, 10 s.60
56Un compte est rarement refusé dans son entier. C’est le cas de celui du bailliage de Tournehem rendu à la Toussaint 1327. Il se termine sur ces mots : Et est asavoir que monseigneur le prevost n’a mie acepté cest conte pour aucunes erreurs qui y sont notees es estrais61.
57Thierry de Hérisson joue un rôle prépondérant dans cette procédure de vérification des comptes de bailliages. Il semble superviser les auditeurs. Il peut prendre la décision de refuser le compte entier parce que les erreurs sont trop nombreuses ou de le valider, comme le suggère cette dépense engagée par le bailli d’Arras à la Chandeleur 1324 : A un autre vallet qui porta lettres closes de ma dame a tous les baillius d’Artoys lendemain de le Saint Thomas qu’il fuissent a Arras pour compter as octaves de le Candeler par devant monseigneur le prevost, pour se voye, 8 s.62
58La comtesse, elle, valide les comptes de son trésorier. Le 19 février 1308, elle assiste à la reddition des comptes de Denis de Hérisson et appose son sceau du secret sur l’acte émis à cette occasion63.
59Même si, dans la continuité d’André Guesnon, plusieurs auteurs ont évoqué l’existence d’une Chambre des comptes en Artois dès la fin du XIIIe siècle64, les documents suggèrent plutôt que les auditeurs se réunissent au sein d’une commission temporaire, qui n’est que l’ancêtre de la Chambre des comptes instituée à Lille en 1385 sous l’égide de Philippe le Hardi, duc de Bourgogne.
60Les baillis sont parfois convoqués directement par la comtesse à la journée de reddition des comptes65. Le plus souvent, l’ordre émane du bailli d’Arras qui convie les officiers à rejoindre sa cité : la ville s’impose progressivement comme capitale administrative de l’Artois66. En juin 1329, un verrier donne quittance pour les verrieres des fenetres des chambres des comptes Madame, a Arras67. Cela suppose qu’il existe dans la résidence comtale une pièce consacrée à la reddition des comptes et, sans doute, à la conservation des archives.
61La vérification des comptes a lieu à des dates variables. En 1322, elle se passe le dimanche suivant l’Ascension, soit trois jours après la fin du terme comptable. En 1323, l’audition se déroule le 1erjuin, c’est-à-dire près d’un mois après l’Ascension, fêtée le 5 mai. En 1326, les baillis sont ajournés aux octaves de la Saint-Rémi, le 8 octobre, alors que l’Ascension date du 1ermai. La tendance, qui semble à l’allongement des délais, tient peut-être à un examen toujours plus scrupuleux des documents.
62La comtesse d’Artois veille donc attentivement sur ses finances. L’ensemble des comptes de bailliages encore disponibles aujourd’hui, sous leur forme originale ou par le biais d’une transcription dans le compte général du receveur, reflète néanmoins une diminution de la documentation sur la trentaine d’années considérées : cette tendance pourrait peut-être s’expliquer par une plus grande utilisation et manipulation des documents écrits, de ce fait plus susceptibles de se dégrader ou de disparaître.
63La vérification des comptabilités n’a pas qu’un rôle financier et économique. Les rouleaux ou registres de comptes, qui énumèrent les droits et revenus du prince, jouent aussi le rôle de titres de propriété68. Ce sont des archives qui permettent de définir et défendre le domaine comtal69.
64Certaines évolutions prouvent l’intérêt croissant accordé au gouvernement des finances diffusion de l’écrit, recrutement d’officiers rodés aux techniques comptables, mais les compétences nécessaires à l’exercice de responsabilités financières ne sont pas définies clairement, pas plus que les attributions de chacun. Le personnel reste polyvalent, souvent peu ou pas qualifié.
65Son travail n’est qu’imparfaitement surveillé, faute de véritable Chambre des comptes. Alors que la royauté ou certaines principautés, comme le Forez, se dotent d’une telle institution dès le premier quart du XIVe siècle, Mahaut d’Artois n’en ressent pas le besoin. La mainmise de Thierry de Hérisson sur l’édifice financier, ou bien les dimensions raisonnables de l’apanage, facilitant le contrôle des officiers, pourraient expliquer cette inertie, qui trahit finalement le manque de volonté réformatrice du pouvoir. La comtesse se prive ainsi d’un formidable outil de construction de l’État.
Notes de bas de page
1 Bernard Delmaire, « Pouvaient-ils se fier à leurs documents comptables ? Sur un accord entre le roi Philippe VI et la comtesse Mahaut d’Artois (1329) », dans Etudes offertes à Gérard Sivéry – Revue du Nord, t. 79 (1997), p. 885-896.
2 Jean Kerhervé, « L’historien et les sources financières de la fin du Moyen Âge », dans Le Médiéviste devant ses sources. Questions et méthodes, Aix-en-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2004, p. 186-188.
3 Christian Guilleré et Jean-Louis Gaulin, « Des rouleaux et des hommes : premières recherches sur les comptes de châtellenies savoyards », Etudes savoisiennes, t. 1 (1992), p. 51-108.
4 Raymond Monier, Les Institutions financières du comté de Flandre du XIe siècle à 1384, Paris, Domat-Montchrestien, 1948, p. 47 ; Mina Martens, L’Administration du domaine ducal en Brabant au Moyen Age (1250-1406), Bruxelles, Palais des Académies, 1954, p. 201-202 ; Jean Kerhervé, L’État breton aux XIVe et XV siècles : les ducs, l'argent et les hommes, vol. 1, Paris, Maloine, 1987, p. 411-413. Dans le comté de Hainaut, l’utilisation des rouleaux décline dès la fin du XIIIe siècle, sans pour autant disparaître complètement avant la fin du XIVe siècle (Gérard Sivery, « L’évolution des documents comptables dans l’administration hennuyère de 1287 à 1360 environ », Bulletin de la commission royale d’histoire, CXLI, 1re livraison (1975), p. 142-144).
5 Bernard Demotz, « Une des clés de la réussite d’une principauté aux XIIIe et XIVe siècles : naissance et développement de la Chambre des comptes de Savoie », dans La France des principautés : les Chambres des comptes, XIVe et XVe siècles (Colloque tenu aux Archives départementales de l’Ailier, à Moulins-Yzeure, les 6, 7 et 8 avril 1995), dir. Philippe Contamine et Olivier Mattéoni, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1996, p. 19 ; Robert-Henri Bautier et Jeanine Somay, Les Sources de l’histoire économique..., p. 537.
6 Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., p. LXVIII-LXXII ; Robert-Henri Bautier et Jeanine Sornay, Les Sources de l’histoire économique..., p. 248.
7 Robert II séjourne alors en Italie (M. le comte de Loisne, « Itinéraire de Robert II, comte d’Artois (1267-1302) », Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1715), no 3 et 4 (1913), p. 362-383).
8 De 1295 à 1297, Robert II se trouve en Aquitaine (ibid.). Lors de son premier départ en Italie, en 1282, il nomme pour le représenter deux hommes, les « maîtres d’Artois ». En 1291, lorsque le bailli d’Artois disparaît, ses fonctions financières reviennent aux maîtres d’Artois, jusqu’à leur disparition, en 1299. Après cette date, ils sont remplacés par le receveur d’Artois (Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., p. XLV-XLVIII).
9 Robert-Henri Bautier et Jeanine Somay, Les Sources de l'histoire économique..., p. 248-249.
10 Gérard Sivery, « L’évolution des documents comptables... », p. 133. En Bretagne, la présentation des comptes ne cesse d’évoluer jusqu’au XVe siècle (Jean Kerhervé, L’État breton..., p. 413-415).
11 Bernard Delmaire note d’ailleurs que ces pratiques sont souvent source d’erreurs, lorsque par exemple le bailli oublie de mettre à jour la rubrique (Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., p. XLII).
12 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 2155. À chaque fois, deux traits horizontaux tracés par le bailli à la suite de ses instructions matérialisent l’espace à respecter.
13 La même évolution se dessine en Flandre où le français est la seule langue utilisée depuis la fin du XIIIe siècle (Raymond Monier, Les Institutions financières du comté de Flandre..., p. 48).
14 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 4722.
15 Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., p. XLI-XLIII.
16 Cette rubrique n’apparaît qu’une seule fois dans les comptes du bailliage d’Arras, à la Chandeleur 1309 (Arch. dép. Nord, B 13597, fol. 96v-98v) alors qu’elle figure dans la majorité des comptes rendus par le bailli de Toumehem. Le relief est un droit payé par l’héritier d’un fief pour en être saisi.
17 Arch. dép. Nord, B 13597, fol. 80-82.
18 Les aumônes sont toujours comptabilisées au terme de la Toussaint, aussi bien dans le bailliage de Toumehem (Tous. 1321, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 3954 ; Tous. 1322, ibid., A 4053 ; Tous. 1326, ibid., A 4514 ; Touss. 1328 ; ibid., A479) que dans le bailliage d’Arras (Tous. 1322, ibid., A 4041 ; Tous. 1323, ibid., A 4142 ; Tous. 1326, ibid., A4511).
19 Ibid., A4384.
20 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 3776.
21 Cf. figures 1 et 2.
22 Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., note 7 p. XLII.
23 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 3776 (Ch. 1320), A3814 (Asc. 1320), A3935(Ch. 1321), A 3945 (Asc. 1321), A 3954 (Touss. 1321), A 4384 (Asc. 1325), A 4423 (Touss. 1325), A 4514 (Touss. 1326), A 4573 (Asc. 1327), A 4606 (Touss. 1327), A 4722 (Asc. 1328), A 479 (Touss. 1328), A 4875 (Ch. 1329).
24 Gérard Sivery, « L’évolution des documents comptables... », p. 133 et 137.
25 Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., p. 33 [563].
26 Ibid., p. 207 [3518].
27 De Jaquemon de Fisseu, pour un maset qui estoit fourfais a Madame d’Artois, li quels siet a Fisseu [...], le quel il a pris a rente pour 3 capons par an, vendu le capon 20 d., valent 5 s. (Touss. 1310, British Library Add. Ch. 12835).
28 Somme des fourfaitures en deniers : 43 £13 s. 11 d. ob. Somme de blé : 117 mencauds et demi, demi boistel et un quarteron. Somme d'avaine : 22 mencauds. Vendu de ce blé, pour ce que c'estoit petis blés et loins d’Arras, 71 mencauds, un boistel et un quarteron de blé, 8 s. le mencaud, 28 £ 10 s. 6 d. Vendu de ceste avaine 22 mencauds, 8 s. 6 d. le mencaud, 9 £ 7 s. Somme de vente de blé et d’avaine, 37 £ 17 s. 6 d. Par tant remaint des fourfaitures de blé en garnison 46 mencauds demi et demi boistel de blé (Ch. 1310, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 2591).
29 Véronique Gérard et al., La Cour de Mahaut, mém. de maîtrise dactylographié, dir. J. Heers, Université Paris X, juin 1971, p. 64-113.
30 Étienne Fournial, Histoire monétaire de l’Occident médiéval, Paris, Nathan, 1970, p. 89-93.
31 Touss. 1306, Arch. dép. Nord, B 13597, fol. 9v-13v ; Ch. 1307, ibid., fol. 39-42v ; Asc. 1307, ibid., fol. 59-61 ; Touss. 1306, ibid., fol. 24-26v ; Ch. 1307, ibid, fol. 48-50v ; Asc. 1307, ibid, fol. 70-71.
32 Du gaaing de 400 florins de Florence que maistre Jehan de Salins, clers Madame, rechut ou 8e jour de février de maistre Jehan de la Cápele en la somme de 600 £ tournois, pour 13 s. parisis la pieche, 4 d. p. de cange pour piece valent 6 £ 13 s. 4 d. (Asc. 1322, Bibi. mun. Saint-Omer, ms 871, fol. 41).
33 Item, pour le change des dites mil £ dont li 600furent en gros tornois du tans au roy Philippe, receus du dit Tresor pour 10 d. ob. par le gros et furent mis pour 12 d. parisis le gros, et pour les autres 400 £, 12 d. de la livre, valent 95 £[…] Item, pour le change des dites 998 £ dont li 598 £ furent en gros tornois a l'o receus pour 10 d. ob. le gros et furent mis pour 12 d. parisis le gros et de 400 £ tornois, 12 d. tornois de la livre, valent a Paris 75 £ 16 s. (Ch. 1317, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 351, fol. lv).
34 Cf. figure 3.
35 Item, pour un papier pour le maistre de l’ostel et pour un cent de jés, 7 5. (Ch. 1315, ibid., A 329, fol. 23) ; Item, pour parchemin et cuire despendu au dit terme par Jehan de Rue et le clerc le tresorier pour l'ostel Madame et jeteurs, 4 £ 13 s. 8 d. (Touss. 1315, ibid., A 334, fol. 34) ; Item, le 25e jour d’aoust, pour 6 papiers et cent et demi de getoers, 26s. 5 d. (Touss. 1320, ibid., A 386, fol. 10).
36 Asc. 1318, ibid., A 361, fol. 25v.
37 Cf. figure 4.
38 6 mai 1303, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 193.
39 Juin 1303, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 4918.
40 Les pièces justificatives des comptes des baillis sont rarement conservées mais celles du receveur sont plus nombreuses. Pour l’année 1303-1304, par exemple, il reste 70 % de ses quittances (Bernard Delmaire, Le Compte général du receveur..., p. LIII-LV).
41 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 324. Les quittances de Pierre Bruyère et Étienne Bricadel sont encore conservées aujourd’hui.
42 Voir par exemple Arch. dép. Pas-de-Calais, A 203, A217, A311, A312, A 324, A 325, A 337, A 347, A 356, A 375, A 376, A 467, A 495, A 496, etc.
43 16 février 1304, ibid., A 202 ; 11 et 19 novembre 1304, ibid., A 204 ; 2 juillet 1306, ibid., A 218 ; 7 et 9 décembre 1314, ibid., A 326 ; 1er novembre 1315, ibid., A 339 ; 14 novembre 1323, ibid., A 431.
44 A Guillot le portier, du commant monseigneur le prevost, pour l'aumonne Madame, doné par 2 fois, 40 s. (Touss. 1312, ibid., A 2942) ; A maistre Willaume Amyon, procureur Madame en le court l’official d’Arras, pour racorder les escrips du plait qui est entre Madame d’Arthoys et les camines Saint Betremiu de Bethune, presté du commant monseigneur le prevost pour les dis escris raccater, 44 s. 4 d. (Touss. 1322, ibid., A 4041) ; Pour le despens Grart de Montagu, qui est du conseil Madame, qui fit a hostel a la Couronne d'Or le veille Saint Piere, du commant monseigneur le prevost, 9 s. (Touss. 1323, ibid., A 4142).
45 Cf. figure 4.
46 Vente des lapins de la garenne du bois de Mofflaines vendus a Jean de Biaufort, poullailler, pour l'an XX 80 £ 3 s. 10 d. (Asc. 1322, Bibl. mun. Saint-Omer, ms 871, fol. 37).
47 Le receveur perçoit les sommes versées au pouvoir souverain par les parties suite à la convocation d’assemblées judiciaires particulières, les franches-vérités (Touss. 1321, Bibl. mun. Saint-Omer, ms 871, fol. 20) mais plus souvent en vertu d’accords passés avec des particuliers ou des institutions. Par exemple, dans le compte de l’Ascension 1322 : Dou Bleu de Vaus, pour un accort fait a Madame pour le racat de se terre que Hurtaus de Vaus ses peres avoit fourfaite, 44 £ (Bibl. mun. Saint-Omer, ms 871, fol. 39). Il encaisse aussi des amendes : item, autre rechepte de aucunes amendes du paage de Bappalmes (Asc. 1322, Bibl. mun. Saint-Omer, ms 871, fol. 41).
48 Jean Kerhervé, « L’historien et les sources financières... », p. 186.
49 Olivier Mattéoni, Servir le prince. Les officiers des ducs de Bourbon à la fin du Moyen Âge (1356-1523), Paris, Publications de la Sorbonne, 1998, p. 167-170.
50 Les comptes de l’Hôtel rendus entre 1314 et 1322 gardent la trace de onze messages adressés au receveur d’Artois. Tous sont à destination d’Arras.
51 Par exemple : De Bauduin de Perchi, appelé a le court Madame de Maihiu Boutillier, sen homme, de deffaute de droit, et s’acorderent les parties de le querele. Pour l’amende de 60 £, dont on conte en ces contes 30 £et contera on a le Candelier prochaine à venir le remanant, 30 £ (Touss. 1311, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 2821).
52 Ch. 1305, Arch. dép. Nord, B15396, fol. 93.
53 C’est le cas par exemple des gages du bailli : le clerc ne le précise pas, mais, selon les comptes précédents, la somme indiquée, à savoir 26 £ 6 s. 8 d., correspond à un salaire en tournois. Il n’indique pas non plus dans quelle monnaie sont versées les rentes dues par le bailliage.
54 Les mentions de vérification ou d’audition des comptes ne donnent aucun enseignement sur les auditeurs des comptes. Nous ne savons pas si ces tâches sont confiées à des clercs ou bien à d’autres officiers de finances.
55 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 101410.
56 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 3731 (cf. figure 5) et A 3814.
57 Touss. 1327, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 4606.
58 S. d. [entre 1303 et 1329], Arch. dép. Pas-de-Calais, A 499.
59 Arch. dép. Nord, B 13597, fol. 70-71.
60 Ch. 1321, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 3921.
61 Touss. 1327, ibid., A 4606.
62 Ch. 1324, ibid., A 5012.
63 19 février 1308, BnF, ms fr. n.a. 21199, fol. 2, no 68.
64 Cf. par exemple Annie Laurence, Les comptes du bailli d’Arras au XIVe siècle, source du droit criminel et pénal, th. de l’École des Chartes, dact., 1967, p. 24.
65 Item, le secont jour d’octembre, a Jean Aloete portant les lettres madame de Heding a tous les baillis d’Artois pour venir compter, 12 s. (Touss. 1320, Arch. dép. Pas-deCalais, A 386, fol. 11).
66 A Colin de Pas, vallet a piet, qui porta lettres a tous les baillius de le conté d’Arthois de par Madame que il fuissent a Arras pour conter le diemence apres l’Escencion, 8 s. (Touss. 1322, Arch. dép. Pas-de-Calais, A 4041) ; A l’abbé Galiot, qui va a piet, qui porta unes lettres a tous les baillius d’Artoys qu'il venissent compter a Arras le senmedi premier jour de jung, 12 s. (Touss. 1323, ibid., A 4142).
67 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 496.
68 Olivier Mattéoni, « Vérifier, corriger, juger. Les Chambres des comptes et le contrôle des officiers en France à la fin du Moyen Âge », Revue historique, no 641 (2007/1), p. 54-56.
69 Robert Stein, « Burgundian bureaucracy as a model for the low countries ? The chambres des comptes and the creation of an administrative unity » dans Powerbrokers in the late Middle Ages – Les Courtiers du pouvoir au bas Moyen Âge, Tumhout, Brepols, 2001, p. 6.
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ORCID : 0000-0002-8209-7904
Université de Lorraine - Nancy - Centre de médiévistique Jean Schneider (ERL 7229).
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