Des correspondances anonymes aux feux de la fiction : le prince Esterhazy à Londres (1815-1842)
p. 225-239
Texte intégral
1Né en 1786, héritier d’une des plus prestigieuses familles de magnats hongrois, le prince Paul-Antoine Esterhazy fut un membre essentiel du autrichien au début du XIXe siècle. Élève corps diplomatique et ami de Metternich, il intégra l’appareil Habsbourg au cours des guerres napoléoniennes, effectua plusieurs missions d’importance entre 1810 et 1814 et obtint, en 1815, le poste de ministre plénipotentiaire à Londres. Il y resta presque trente années, entrecoupées de voyages dans toute l’Europe. La reine Victoria lui accorda une dernière audience en septembre 1842. C’est durant cette période que se construisit l’image d’un aristocrate fortuné, raffiné et mondain, ambassadeur brillant tombé en disgrâce auprès de Metternich peu de temps avant d’être rappelé.
2L’étude des documents administratifs à Vienne1 mais aussi l’analyse des écrits du for privé de la famille Esterhazy, disponibles à Budapest2, nous ont conduit à établir un parallèle entre divers événements ayant ponctué la trajectoire londonienne du prince, l’évolution juridique de sa fonction d’ambassadeur et le changement progressif de son statut jusqu’à l’affirmation d’une image publique plus visible et bien définie. Le prince Paul fut en effet l’objet de plusieurs tentatives de chantage et d’extorsion, menées avec plus ou moins de succès, avec, à la clé, des menaces de publication d’ouvrages autour de l’histoire de la famille Esterhazy et de sa propre vie. Les diverses implications du règlement de ces questions renforcèrent l’image de l’ambassadeur comme personnage public à part entière, régulièrement évoqué par la presse de son temps. Ce processus aboutit par ailleurs à un fait singulier : la lecture de la Foire aux Vanités (1846-1847) de William Make peace Thackeray nous a permis de nous rendre compte que le personnage de l’ambassadeur Peterwaradin, dont certaines turpitudes sont décrites, était directement issu de la personne de Paul Antoine Esterhazy.
3À la lumière de ces différents éléments, il nous a semblé pertinent d’analyser la trajectoire de cet individu par le biais du dévoilement progressif de sa vie privée et le double processus de médiatisation dont il fit l’objet, de la vie privée à l’image publique, puis de l’image publique au personnage fictionnel.
4Cette double médiatisation par l'écrit se fit dans le contexte spécifique de la première moitié du XIXe siècle et aboutit à la construction d’une représentation accessible au plus grand nombre grâce à la mobilisation de divers moyens. Le philosophe allemand Jürgen Habermas voit dans cette époque, en particulier les décennies 1820 à 1840, une césure décisive pour l’élaboration de l’espace public, pour la transformation du rapport entre l’opinion et les personnalités éminentes et donc pour l’évolution de la nature de l’image publique3. De nombreuses mutations concomitantes et étroitement liées entre elles permirent ce changement : ces décennies furent le cadre d’une densification de la chose écrite, d’une croissance exponentielle de ses moyens de diffusion et de production et également d’un élargissement important du lectorat, tandis que s’affirmait le système capitaliste de marché et que se maintenait en Angleterre une monarchie parlementaire active4. L’image présentée par les personnalités publiques avait ainsi changé de dimension, de nature et de rôle. Construction permanente soumise aux ambitions des acteurs politiques eux-mêmes et aux aléas de l’opinion publique, liée au développement de la presse périodique et des autres médias écrits, elle manifestait une porosité grandissante entre les sphères publique et privée. En effet, les éléments provenant de la seconde permettaient de définir le statut de l’agent dans la première, tandis qu’à l’inverse, les opinions publiques contraignaient de plus en plus les pratiques au sein de l’espace privé. C’est d’ailleurs dans cette perspective que le statut mal défini de l’ambassadeur présente pour nous un intérêt majeur : personnalité officielle représentant un État mais aussi individu mondain au centre d’une société toujours observée et commentée, il est un cas d’étude original et révélateur bien qu’un peu en marge des autres acteurs politiques.
5Nous tâcherons de mener à bien cette analyse en déterminant en premier lieu les mécanismes du chantage considéré comme une forme de médiatisation, ainsi que ses implications quant à la création d’une image publique. En second lieu, notre attention sera mobilisée par « l’entrée en fiction » de Paul-Antoine Esterhazy, nouveau processus de médiatisation d’une personne privée, dotée au préalable d’une image publique bien établie.
La médiatisation de la vie privée, objet de chantages : l’affaire Bettera ou le chantage par dépit
6Arrivé à Londres en 1815 avec la lourde tâche de défendre au mieux les intérêts autrichiens et de confirmer l’alliance entre deux puissances garantes de l’équilibre européen, le prince Paul s’adapta rapidement à l’environnement britannique et jouit bientôt d’une image flatteuse auprès de l’appareil diplomatique mais aussi au sein de la bonne société. Cultivé, raffiné, prodigue voire dépensier, il apparut comme un exemple accompli de grand seigneur cosmopolite à qui des origines hongroises apportaient un soupçon d’exotisme. Mais cette représentation fut par la suite altérée par d’importants problèmes d’argent, par des rumeurs persistantes au sujet de sa vie conjugale et surtout par des menaces portant atteinte à la réputation de sa famille. La première de ces menaces provint d’un certain Bettera, une ancienne connaissance arrivée à Londres dans le sillage du prince...
7Émigré ragusain chassé de sa patrie par les troubles de la Révolution française puis par la mainmise Habsbourg sur la côte dalmate, le comte Vito Marija Bettera-Vodopić entra au service de la maison Esterhazy aux alentours de 1810 et fut durant quelques années « Maître-Jacques » et homme de confiance du prince régnant Nicolas. Il rendit de nombreux services à la famille, permettant en particulier la bonne tenue du mariage du prince héritier Paul avec Thérèse de Turn und Taxis5, nièce de la reine de Prusse. Il arrangea également plusieurs affaires délicates lors des voyages de Nicolas en Italie, manquant de se battre en duel à plusieurs reprises6. Ces services lui valurent une pension confortable et diverses gratifications mais lui coûtèrent également l’inimitié, voire la haine du prince de Metternich7. Après une douteuse affaire impliquant la maîtresse de Nicolas Esterhazy, il fut une nouvelle fois contraint à l’exil en Russie où il avait servi par le passé, puis en Angleterre.
8Arrivé à Londres en 1816, il souhaitait y faire valoir ses droits à pension auprès du jeune ambassadeur d’Autriche, récemment installé. Le prince Nicolas lui avait en effet promis que les 6 000 francs annuels continueraient à lui être versés, ce qui n’était plus concrètement le cas. La famille, comme toujours, était extrêmement endettée et la protection de ce turbulent serviteur n’allait plus de soi. Ce fut le début d’une affaire qui ne prit fin que sept ans plus tard. En février 1823, quelques jours après un scandale public en plein Piccadilly où il menaça le prince Paul, le comte Bettera fit publier une brochure comportant ses réclamations et des copies de sa correspondance avec les princes Esterhazy afin de justifier ses dires8. Après plusieurs années de menaces et de chantage, il fut finalement expulsé d’Angleterre puis de France, et enfin arrêté en Prusse et confié à la police autrichienne, considéré comme un dissident et un subversif. Il mourut dans une prison ukrainienne en 1841.
9Les menaces de publication de brochures intervinrent à trois reprises entre 1816 et 1823. Ce sont les seules actions qui firent réellement avancer l’affaire. Les deux premières fois, en 1818 et en 1819, elles parurent suffisamment sérieuses pour pousser Paul à verser de l’argent et à promettre de parler à son père afin qu’il normalise la situation. L’intervention officieuse de personnalités extérieures (le ministre Castlereagh, entre autres) permit également de stabiliser la situation. Mais en 1823, après de continuelles désillusions, Bettera excédé finit par mettre son plan à exécution. Des ouvrages circulèrent rapidement dans toute l’Europe. Cette diffusion et l’altercation qui l’avait précédée le 12 janvier déclenchèrent l’expulsion du Ragusain.
10La médiatisation de cette affaire d’ordre privé était une composante à part entière du chantage de Bettera pour faire valoir ses droits légitimes. Elle eut une charge transgressive suffisante pour pousser la famille princière à la négociation, puis pour la mettre dans l’embarras en Angleterre et par extension dans toute l’Europe, entraînant même l’intervention de la monarchie britannique. Le mécanisme est assez clair, ce chantage équivaut à un échange d’une part de capital matériel (la somme due par les Esterhazy à leur ancien serviteur) contre une portion de capital symbolique (la réputation de la personne attaquée, de sa famille, mais aussi de son groupe social9 et surtout de l’État qu’il représente en tant qu'ambassadeur10) et de capital relationnel (ce sont les aristocrates et les puissants qui sont pris à témoins à travers l’Europe... Auparavant, un scandale qui avait éclaté devant le personnel dans la maison du prince Paul, à Chandos House, n’avait pas ému outre mesure l’ambassadeur). Mais la conduite du comte Bettera était beaucoup moins rationnelle que cela : les termes du chantage dans les correspondances puis dans leur publication sont exaltés voire brutaux et révèlent le désespoir et la posture morale de l’aventurier ragusain. Il parle à plusieurs reprises de se brûler la cervelle après avoir réglé ses comptes. Il fait souvent appel à la dignité et à l’honneur des magnats hongrois. Il transforme enfin les faits afin de se donner le beau rôle. La reproduction dans l’opuscule de 1823 de certaines lettres issues de sa correspondance avec les princes Esterhazy est éloquente : tous les passages originaux où il se montrait servile ou pitoyable sont reformulés afin de le faire passer pour un homme trahi mais digne, tandis que de légères modifications rendent Nicolas et son fils Paul plus veules et mesquins qu’ils ne l’ont été dans la réalité. En fait, les pratiques et les discours de Bettera paraissaient assez souvent irrationnels ; c’est d’ailleurs comme cela que les intervenants « extérieurs »jugèrent le Ragusain : après l’avoir arrêté en février 1823, le chef de la police Richard Birnie le décrivit comme un « pauvre fou », avec une pointe de compassion11. Certains se moquèrent même un peu de l’affaire, à l'image de Canning tout juste arrivé au pouvoir et plutôt froid à l’égard du prince Paul. Il ne fit rien pour la résoudre, laissant le plénipotentiaire autrichien dans la gêne pendant plusieurs semaines12. En effet, si cette affaire paraissait infernale à ce dernier, elle n’eut sur le moment qu’un écho limité. Les dénonciations du Ragusain firent moins scandale que son attitude à l’égard d’un puissant.
11Cependant, le règlement de l’affaire posa problème. Dès le premier chantage, en 1818, le prince Paul s’interrogea sur les moyens d’y mettre fin par une voie juridique. Les particularismes anglais étaient contraignants : selon les statuts de la Reine Anne (1709), sa fonction d’ambassadeur lui assurait une certaine immunité vis-à-vis de la justice britannique, mais l’empêchait par-là même d’y avoir recours pour ses affaires d’ordre privé. Par ailleurs, la liberté d’expression était relativement bien assurée dans le royaume13, tout comme le statut des étrangers malgré l’Alien Bill14. Cette mesure visant à combattre la trahison avait été instaurée pendant les guerres napoléoniennes, mais n’avait été que peu appliquée par la suite. Elle fut actualisée précisément pour notre affaire, sur intervention royale (l’ambassadeur bénéficiait en effet de la protection de la Cour) et de manière totalement abusive puisqu’elle ne visait pas l’expulsion d’un homme pour ses activités subversives mais pour une affaire entièrement privée. Elle permit donc de justifier son expulsion sur de faux arguments, à savoir les opinions politiques du Ragusain qui n’étaient pourtant pas en jeu dans cette querelle. Fait plutôt rare en Angleterre, la solidarité sociale et dynastique15 avait pris le pas sur les principes les plus sacrés, manipulant la lettre de la loi pour en trahir l’esprit.
12L’emploi de ces mesures d’exception aboutit bien à l’expulsion de l’inopportun, mais ne régla finalement ni les problèmes liés au statut particulier des agents diplomatiques, ni la situation personnelle de Paul-Antoine Esterhazy : les archives abondent en témoignages, certes moins denses, d’affaires concernant les pratiques et comportements du prince et de sa famille16.
La multiplication des affaires et leur gestion ou le chantage par intérêt
13Les pratiques de ces chantages postérieurs différèrent beaucoup de celles de l’affaire Bettera. Les termes du chantage étaient mieux « respectés », presque normalisés, et le déroulement de ces affaires plus linéaire. Nous avons ainsi pu observer une forme d’acceptation de ces menaces de médiatisation, passant par l’emploi de multiples intermédiaires plus ou moins spécialisés : par exemple, Paul-Antoine Esterhazy ne fut plus jamais en contact avec un maître-chanteur, déléguant cette tâche à un professionnel. La menace de publication d’affaires privées semble être devenue après l’affaire Bettera un argument suffisant pour imposer le règlement rapide des négociations par le versement d’argent17. Le contexte aussi avait évolué : l’ambassade du prince Paul perdurait, il était devenu une personnalité publique à part entière, proche de la famille royale et au centre de tous les cercles mondains de Londres à Brighton.
14En tant que tentative d’extorsion par la menace de médiatisation de la vie privée, l’affaire Catherine St-Georges (1831) est exemplaire. Elle peut aussi présenter des similitudes avec l’affaire Bettera. Les moyens du chantage furent proches mais les résultats très différents : un mystérieux écrivain installé en France menaçait d’imprimer et de publier un ouvrage relatant des éléments privés peu glorieux. La démarche était beaucoup plus rationnelle, moins passionnée (nulle trace de violence physique, les termes employés restèrent courtois), finalement plus crapuleuse que dans le cas précédent. Après tout, la démarche du Ragusain était défendable, voire justifiée...
15Les éléments privés que les maîtres-chanteurs menacèrent de dévoiler ne concernaient pas que le prince Paul mais la maison Esterhazy dans son ensemble, ses « secrets » les plus sensibles, même si ceux-ci étaient en réalité assez connus au sein de la bonne société. Affaires de mariages, d’adultères multiples, de mœurs douteuses et de vie dissolue furent sur le point d’être étalées aux yeux de tous. L’ouvrage n’ayant jamais paru, seule la liste des chapitres nous est parvenue18. La situation des parents du plénipotentiaire autrichien, séparés depuis plusieurs décennies, était particulièrement montrée du doigt : le prince Nicolas vivait avec une maîtresse de basse extraction et s’affichait partout avec elle, même lors des voyages officiels, tandis que la princesse Marie avait mis au monde un troisième enfant idiot, issu d’une liaison adultère avec l’ambassadeur russe à Vienne. Le prince Paul était quant à lui accusé d’avoir contracté un mariage purement intéressé et de mener une vie sociale et familiale assez trouble. Bien que français, l’auteur était une personne bien renseignée. L’accumulation de détails justes et précis laissent supputer une source, probablement un proche du prince Paul ou de sa famille. Ou peut-être l’auteur avait-il suivi attentivement les publications périodiques focalisées sur les activités de l’aristocratie, de la société mondaine et de la Cour d’Angleterre, disponibles en France. Quoiqu’il en soit, tous ces éléments ne sont pas vérifiables, ce qui est finalement assez secondaire puisque c’est la réaction et le ressenti des personnes attaquées qui nous intéressent en premier lieu. Laisser publier aurait pu passer pour un aveu tandis qu’entreprendre publiquement des poursuites, pour peu qu’on en ait les moyens, aurait laissé planer le doute : la solution la plus raisonnable était donc bien la négociation. Cette attaque en règle du capital symbolique du prince Paul et de la maison Esterhazy avait cette fois des objectifs bien moins nobles que la survie et l’honneur d’un petit noble apatride : la seule motivation en était l’argent.
16Dans cette affaire, les mécanismes du chantage furent plus complexes, impliquant de nombreux agents et des pays différents, mais ils furent aussi mieux ordonnés, suivant un cours linéaire. Les deux principaux protagonistes du chantage ne se rencontrèrent à aucun moment et employèrent des intermédiaires d’abord pour se contacter, puis pour régler l’affaire.
17Ainsi, le maître-chanteur français usa de la bonhomie de sa correspondante littéraire Catherine St-Georges, une respectable dame anglaise manifestement de bonne foi et sans intérêt dans l’affaire autre que de servir de relais à son ami épistolaire. Elle persista à taire son nom.
18Du côté du magnat hongrois, le notaire Chattfield, a priori employé uniquement pour ce genre d’affaires, fut chargé de rencontrer les intervenants et de s’occuper discrètement des négociations, évitant ainsi que l’ambassadeur d’Autriche soit soumis au scandale. Après les tergiversations de la précédente affaire Bettera, pendant laquelle il s’était débattu entre les différentes instances institutionnelles britanniques, s’exposant par moment au ridicule, le prince avait cette fois-ci confié ses intérêts (et son capital symbolique) à un spécialiste. Celui-ci le renseigna d’abord sur les possibilités juridiques d’intervention avant la publication d’un ouvrage à scandale, en cas de tentative d’extorsion : elles étaient à peu près nulles. L’impossibilité effective de retrouver l’écrivain français, à moins de se lancer dans une longue, coûteuse et fastidieuse enquête alors que le temps était compté, ainsi que le manque de recours juridiques au pays de la liberté d’expression, à plus forte raison si l’auteur n’était pas anglais, poussèrent finalement à l’acceptation de la négociation. Nous ne connaissons pas le fin mot de cette affaire, puisque les sources sont muettes à partir de cette étape. Cependant, le fait que cet ouvrage n’ait finalement pas été publié nous pousse à croire que le prince avait accepté de payer la somme demandée. Le prix de la tranquillité de notre Hongrois avait été fixé à 1 000 £ St, une somme importante mais finalement relativement acceptable19, surtout pour un tirage trois à quatre fois plus important que celui des récriminations publiées par Bettera. Soulignons que le Ragusain s’était adressé à un public assez restreint, celui des puissants qu’il avait côtoyés avant sa disgrâce, dans le sillage du prince Nicolas ou lors des missions diplomatiques et commerciales auxquelles il avait participé pour le compte de la République de Raguse ou de l’État russe. Ce nouveau pamphlet visait un public plus large, une opinion publique mieux structurée. Les lettres de chantage laissaient d’ailleurs présager une double publication en français et en anglais, ce qui révèle l’échelle internationale du scandale suscité mais montre aussi l’élargissement social de sa base publique. L’emploi de la langue anglaise était à ce titre significatif : elle n’était d’aucune utilité pour les élites cosmopolites européennes qui dans leur grande majorité utilisaient encore la langue française, celle de leur statut. L’anglais permettait de toucher un autre groupe social émergeant à l’époque, cette upper-middle-class britannique devenue prépondérante dans la vie économique et politique du Royaume et avec laquelle les princes Esterhazy entretenaient des liens de plus en plus étroits, en particulier pour des investissements et des transactions commerciales.
19Quelle que soit l’issue réelle de cette affaire, c’est la plus significative et explicite que les sources nous aient dévoilée après l’épisode Bettera. Nous possédons en revanche les traces de transactions financières mettant fin à au moins deux autres affaires, sans qu’il nous soit possible de déterminer la nature exacte de ces dernières.
20L’élément commun à ces trois affaires est la personne de Chattfield. Il semble bien que pour l’affaire Gibbons en 182920 ou pour l’affaire Hewitt/Cooper de 183921, comme pour l’affaire St-Georges de 1831, Paul-Antoine Esterhazy ait fait appel au même spécialiste, à la fois notaire et expert dans le règlement de conflits d’ordre privé (les transactions financières se faisant à titre personnel) que le prince ne désirait pas voir étalés sur la place publique.
21Ce Chattfield avait ainsi préparé à deux reprises des contrats explicites, précisant le don de sommes non négligeables et stipulant la fin de tout rapport avec l’ambassadeur d’Autriche. L’âge, le sexe et l’origine sociale des réclamants donnent peut-être une idée du contenu de ces affaires. Il s’agissait de jeunes femmes qui retournèrent en province après avoir touché l’argent22 en échange de leur silence et de la fin de leurs réclamations et de leurs menaces. Les croix en guise de signatures et le fait que les contrats précisent que tout leur a été expliqué afin d’avoir la certitude de leur bonne compréhension font penser à des milieux socioculturels assez défavorisés. Par ailleurs, certains détails font penser à des affaires d’adultère voire de prostitution. Cela concernerait peut-être des actes intimes que le prince Paul, contrairement à son père, essaya de couvrir d’un voile pudique.
22Au même titre que pour le cas St-Georges, nous observons ici des affaires au développement plutôt linéaire, limitées dans le temps, et structurées par l’accomplissement effectif de la manœuvre de chantage autour de la révélation affaire privées relevant d’une intimité un peu honteuse, à une époque de moralisation de l’espace public. Le transfert de capital matériel en échange de la préservation d’un capital symbolique et relationnel était donc nécessaire au maintien d’une bonne image, indispensable au statut social et familial du prince Esterhazy et à sa fonction d’ambassadeur.
23L’importance accordée à ces actes de médiatisation de la vie privée, ou aux manœuvres visant à les éviter, nous donnent de précieuses indications quant à l’édification d’une image publique qui devient ainsi un enjeu majeur des pratiques, discours et représentations de la sphère privée. Cette image n’est plus vraiment celle de l’Ancien Régime, purement ostentatoire et très démonstrative, mais se charge de signifiés moraux et comportementaux à la mesure de l’époque et des médias qui s’y développent. L’ambassadeur, centre de gravité social installé durablement, est soumis aux caractéristiques d’une fonction qui se définit lentement et aux effets d’un statut qui, lui, évolue assez rapidement vers la notabilité et la mondanité. Soumis à la perméabilité entre les domaines public et privé, il construit volontairement son image, confiant par exemple à un homme de loi engagé à cet effet le soin d’arrondir les angles et d’étouffer les affaires les plus compromettantes. Mais il subit aussi le regard continuel de ceux qui l’entourent et l’observent, et modifie en conséquence de nombreux aspects de sa vie privée. Alors, l’image médiatisée n’est plus seulement le résultat d’un construit par le sujet, mais devient également le produit de ce regard extérieur.
24L’entrée en fiction d’un personnage public tel que le prince Paul en est une des manifestations les plus exemplaires, peut-être son stade final.
Le texte littéraire comme média : des affaires à la fiction
25Comme l’a souligné Richard Pearson23 dans sa stimulante étude sur les écrits de Thackeray pour les périodiques, l’écrivain victorien avait une conscience aiguë de l’importance croissante de la presse dans la première moitié du siècle, et liait toujours son statut d’auteur à sa profession de journaliste. Pour lui, il n’y avait donc pas de contradiction fondamentale entre littérature et reportages plus commerciaux, plutôt une tension essentielle au processus de production de l’écrit. Cette production était soumise aux multiples contraintes de l’affirmation du capitalisme qui avait permis l’expansion d’une presse de masse. Très conscient de ces mécanismes (il en fit un sujet à part entière), Thackeray refusait la séparation rigide entre fiction et réalité et laissait l’une infiltrer l’autre, considérant par exemple l’écrit journalistique comme une œuvre littéraire d’écriture de l’histoire du présent. Dans sa collaboration avec la presse périodique, la multiplication des personages, sortes d’alter ego sous pseudonymes affublés de caractères particuliers (par exemple Punch24, Jenkins25 ou encore the Fat Contributor26), lui permettait d’introduire un nouvel instrument de médiatisation entre le texte, son objet et le lecteur, ainsi que de véhiculer des vues personnelles et satiriques. C’était aussi une manière d’introduire une part de matière fictive dans la réalité, tout en transmettant à son lecteur une partie de sa grande connaissance du milieu mondain, parlementaire et économique, en Angleterre ou à l’étranger.
26Le format même de diffusion de son œuvre romanesque la plus populaire, La Foire aux Vanités, manifeste la vigueur de ce lien. Comme une grande part de l’œuvre de son rival Dickens, le roman de Thackeray fut publié sous la forme d’un feuilleton livré au lecteur dans un magazine mensuel, Punch. Mais les liens entre littérature et journalisme étaient encore plus forts quant au fond. De nombreux éléments « réels », issus de son observation du monde, étaient incorporés au sein de la fiction, à tel point qu’il est parfois difficile de faire la part des choses. De plus, le lectorat était a priori le même que pour ses notes proprement journalistiques. En bon auteur victorien intégré au système de l’offre et de la demande, Thackeray soumettait sa narration à un devoir de réalisme afin que le lecteur puisse s’y retrouver, incluant des éléments évocateurs et une morale proche de celle développée par la presse de l’époque. Le signe le plus évident de cette complicité entre l’écrivain et son lectorat est peut-être la manière dont le narrateur s’adresse au lecteur, le prend à partie. Par ailleurs, les personnages principaux de La Foire aux Vanité, ce roman sans héros, étaient issus de l’imagination de l’auteur. Mais l’environnement dans lequel ils évoluent paraissait, lui, beaucoup plus réel, tout comme les personnages secondaires, familiers pour l’opinion. Becky Sharpe et consorts emmenaient le lecteur dans une haute société peuplée de mondains et d’aristocrates directement issus du domaine du journalisme. De nombreux éléments faisaient donc écho à une réalité connue, certains caractères confirmant simplement l’image publique de personnes privées et bien réelles. À notre sens, il s’agit pour l’époque de la forme la plus poussée de médiatisation de la vie privée, même si un tel aboutissement la vide peu à peu de sa substance : ces personnages secondaires s’identifient par des signes reconnaissables plutôt que par l’exposition d’une réelle vie intime.
27Dans La Foire aux Vanités27, le personnage du prince de Peterwaradin apparaît assez tardivement, lors de l’épisode du « Dîner à trois services à Gaunt-House ». L’ambassadeur de la monarchie autrichienne (c’est sa fonction) est décrit comme une pièce essentielle de la vie mondaine londonienne, « manifestement la personne la plus distinguée » de l’assemblée, ce qui définit son statut, sa position. Significativement, c’est, dans les faits, le personnage le plus prestigieux que Becky soit parvenu à atteindre lors de sa longue quête sociale28, un personnage exotique et flamboyant, par moment réduit à une simple silhouette, un maintien et des vêtement fastueux révélant son origine hongroise (« les glands de ses bottes à revers et les diamants suspendus à sa veste de hussard ») :
Son Excellence a la taille prise dans une ceinture étroitement serrée. Sur sa poitrine bien dessinée par l'uniforme militaire, étincelle une plaque chargée de pierreries. Le boyard29 porte autour du cou le collier rouge de la Toison d’or, et possède d’innombrables troupeaux.
« Regardez-le bien », dit Rebecca à l'oreille de lord Steyne ; « le chef de sa race devait être un mouton ».
En effet, son air solennel, sa démarche mesurée, sa figure blafarde et son collier, donnaient à Son Excellence tout l’air d’un vénérable bélier sonnailleur.30
28Les trois apparitions du prince de Peterwaradin, enfin, permettent à Thackeray de poursuivre son jugement moral sur la vanité des gens du monde, rappelant étrangement certains accents de la critique de Bettera sur les puissants31. Un personnage de fiction ? En réalité, il ne fait aucun doute que les lecteurs avaient reconnu en « ce noble habitant des bords du Danube » la personne du prince Paul-Antoine Esterhazy (et de sa femme), parti d’Angleterre depuis seulement quelques années à l’époque où fut publié le roman et dont la vie, privée et publique, avait nourri la presse anglaise pendant plus de trente ans et suscité le scandale de temps à autre. L’histoire est d’ailleurs censée se dérouler durant les années d’exercice d’Esterhazy à Londres.
29À travers sa fonction, son statut, son apparence et le jugement moral qui lui est attaché, c’est finalement l’image publique de cet individu qui était reconstruite, re-médiatisée. Dans le texte, les signes et références (les sonorités analogues des deux noms, les allusions aux grandes propriétés et aux moutons, la Toison d’or, etc.) désignent évidemment l’ambassadeur hongrois, mais il ne subsiste finalement qu’un nom évocateur, une image simple et un contexte dont le seul rôle est de faire avancer la narration. La succession de médiatisations de l’image originelle du prince lui a finalement enlevé toute substance personnelle, toute caractéristique propre à la sphère privée, le réduisant à son habitus, voire à sa simple hexis32. Il aurait pourtant pu constituer un rouage exemplaire et original de la démonstration de l’écrivain, mais la re-médiatisation d’une image publique, elle-même reflet partiel d’une figure privée, excluait ce développement.
30Cette élaboration est double, à la fois synonyme d’enrichissement et d’appauvrissement. D’un côté, l’homme est devenu une personnalité publique de premier plan, facilement reconnaissable par le large public de la presse de masse, symbolique et représentatif d’un milieu social. De l’autre, il est finalement réduit à peu de choses, quelques traits ; la complexité de sa vie privée et de son intimité n’est rendue que par quelques anecdotes futiles et des détails esthétiques limités. Cette image pauvre, issue du média littéraire, constitua finalement pour le plus grand nombre une des seules traces du séjour londonien de près de trente ans d’un des grands diplomates de l’époque.
31Ainsi, l’aboutissement du processus de médiatisation de la vie privée a exclu de l’image construite presque toute trace de l’intimité du prince Esterhazy, tout en confirmant sa renommée. La première phase de l’édification de l’image publique de cet ambassadeur, analysée ici à travers des affaires de chantage et d’extorsion, s’inscrit pour nous dans le « temps long ». Cette affirmation de la personne publique structure déjà une société des apparences et des représentations bien présente pendant l’Ancien Régime. Mais marquée par une porosité croissante entre sphères publique et privée et par l’évolution des moyens techniques et culturels des médias tendant à la massification de l’opinion informée, elle devient un passage obligé pour les carrières politiques ou administratives les plus prestigieuses et semble franchir un palier au XIXe siècle.
32Cependant cette médiatisation aboutit aussi à une mutilation de la réalité : qu’est-ce qui, in fine, lie Paul-Antoine Esterhazy et sa pâle caricature, le prince de Peterwaradin ? Les concepts de Barthes33 nous permettent d’y voit une dégradation du signifiant (l’image médiatisée) qui perd en substance et se retrouve chargé du mythe et des clichés issus des attentes sociales. Dans ce cas, la construction de l’image publique paraît plutôt subie que volontaire. Elle n’exclut pas, cependant, l’accommodement et l’instrumentalisation afin de l’intégrer aux stratégies des acteurs politiques et sociaux : la renommée anglaise et européenne acquise par Esterhazy lors de son ambassade lui permit d’asseoir son influence à son retour en Hongrie au sein des Diètes et auprès de la Cour. Il s’en servit aussi lors des évènements de 1 848 pour s’assurer une place prééminente au sein du premier gouvernement Batthyani.
Bibliographie
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Bibliographie
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Pearson Richard, Thackeray and the mediated text : writing for periodicals in the midnineteenth century, Aldershot, Ashgate, 2000.
Notes de bas de page
1 En particulier aux Haus-Hof-und Staats-Archive (HHStA) de la Minoriten Platz, série AB V, Staatskanzlei et série AB VIII-2-1, Staatenabteilungen, England.
2 Les Magyar Országos Levéltar (MOL, Archives Nationales de Budapest) rassemblent la majorité des documents relatifs aux grandes familles hongroises. La série P134 concerne le prince Nicolas Esterhazy, la P136 son fils le prince Paul.
3 Voir ses travaux sur le principe de publicité et l’archéologie de la communication de masse, en particulier son ouvrage Strukturwandel der Öffentlichkeit, Berlin, Neuwied, 1965. Pour le philosophe allemand, c’est le principe de publicité (Öffentlichkeit) qui permettrait le bon fonctionnement d’une démocratie délibérative moderne, un système qui s’impose en Angleterre au XIXe siècle. Dans sa généalogie de ce système politique, Habermas met en opposition le modèle décisionniste et le modèle délibératif. Alors que pour le premier, la source de la décision suffit à en garantir la légitimité, le second système ne rend une décision légitime que si la discussion qui y mène l’est également. Le débat public (« principe de légitimité relayé par l’espace public ») est donc essentiel et donne à l’espace public un « pouvoir d’assiègement permanent » ; les acteurs du système de décision, continuellement exposés, doivent se soumettre à l'Öffentlichkeit selon les moyens matériels du temps, ici la chose écrite (presse et édition).
4 Voir à ce sujet L. Erickson, The Economy of Literary Form : English Literature and the Industrialization of Publishing, 1800-1850, Baltimore, John Hopkins University, 1996. L’auteur y fait le lien entre vie politique et évolution du marché de l’écrit : par exemple, le débat public intense sur l’état de la nation et la direction des partis politiques qui accompagna le Reform Bill de 1832 fut encouragé par la hausse générale du niveau littéraire, l’amélioration des méthodes du marché de l’impression et des manufactures de papier, une distribution et une circulation plus rapides, enfin un marché de l’édition plus prospère.
5 MOL P136, microfilm 49001, correspondance du prince Paul, documents 84 et 111.
6 MOL P136, microfilm 49004, Bettera, documents 352, 356 et 357.
7 Hostile par principe envers un émigré ragusain turbulent, Metternich avait laissé libre cours à une haine féroce envers Bettera après l’affaire du mariage : il souhaitait en effet l’échec de ce projet afin de pouvoir marier sa propre fille au prince Paul. Voir à ce sujet notre article, à paraître en Hongrie, sur la vie du comte Bettera.
8 V.-M. Bettera, Exposé des réclamations de V.-M. Bettera Wodopich contre le prince régnant d'Esterházy, et ses contestations sur cet objet avec le prince Paul Esterházy de Galanta, Londres, Impr. Wood., 1823. Un exemplaire de cette brochure est disponible à la Bibliothèque Nationale Széchényi (Orszàgos Széchényi Könyvtar, OSzK) sous la cote 175.876/Stack.
9 La publication de 1823 est éloquente : elle critique avec force les grands nobles et leur comportement mesquin vis-à-vis de leurs congénères moins fortunés. Bettera en rajoute même en parlant des dettes faramineuses accumulées par le prince Paul dans le cadre de sa charge et épongées par son père début 1823 alors que ce dernier refuse de lui verser une somme modique. C’est bien le sens de la phrase placée en exergue de l’ouvrage : « Que tout ce qui reluit n’est pas d’or ».
10 Cette histoire de haines personnelles acquiert alors une dimension politique forte, celle des revendications de la noblesse ragusaine au sujet de la souveraineté perdue de sa cité. Cet argument, secondaire dans le cas qui nous intéresse, devient parfois prioritaire au gré des différends des uns et des autres.
11 Nous sommes alors loin du vocabulaire employé par les princes Esterhazy qui le traitèrent à plusieurs reprises de « coquin » ou de « fou enragé ». voir MOL P136, microfilm 48999, lettres du prince Nicolas à son fils Paul, documents 341 et 346.
12 Voir à ce sujet les Lettres privées de la princesse Lieven au prince Metternich, 1820-1826, New York, Dutton & co, 1938, p. 164.
13 Les choses se seraient passées d’une manière bien plus expéditive dans l’État de Metternich et de Saurau.
14 Cette permissivité était d’ailleurs souvent exagérée par les observateurs étrangers : les écrits de Metternich sur les sociétés secrètes sous-entendent qu’elles pulluleraient dans ce pays, protégées voire encouragées par les aristocrates les plus libéraux et les membres de l'upper-middle class les plus touchés par la subversion révolutionnaire.
15 Par son mariage avec la nièce d’une reine de Prusse, Esterhazy était apparenté à plusieurs dynasties européennes, dont la dynastie anglaise.
16 Notons que la totalité de ces affaires se déroulent en Angleterre, ce qui semble confirmer la fragilité du statut de l’ambassadeur pour ce qui concerne sa vie privée ainsi que le statut particulier de la liberté d’expression dans ce pays. Auparavant, son père Nicolas Esterhazy s’était montré prolifique en affaires privées douteuses, tout au long de sa vie et dans d’autres pays. Bien que connues, ces affaires n’étaient évoquées qu’à mots couverts et finalement considérées comme les excentricités d’un grand prince fastueux et de caractère... Très logiquement, les seules à avoir donné lieu à une volonté de règlement furent ses adultères en France.
17 Notons tout de même que la situation financière du prince Paul, bien installé comme ambassadeur après 1825, s’était considérablement améliorée. De plus, les sommes demandées étaient moins importantes.
18 MOL P136, microfilm 49001, novembre-décembre 1833, document 102.
19 L’auteur prétendait pouvoir toucher deux fois plus en cas de publication.
20 MOL PI 36, microfilm 49004, Chattfield, document 476.
21 MOL P136, microfilm 49001, Affaires personnelles du prince Paul 1836-1839, documents 117 et 118.
22 Environ 100 £ pour Jane Gibbons, accompagnée de sa famille, et 120 £ pour Jane Hewitt, peut-être une prostituée.
23 R. Pearson, Thackeray and the mediated text : writing for periodicals in the midnineteenth century, Aldershot, Ashgate 2000.
24 Esprit critique des médias et producteur de multiples satires.
25 Reporter mondain, servile avec les puissants.
26 Mélange comique de reporter de l’âge moderne du journalisme de voyage et de contempteur du monde aristocratique du Grand Tour.
27 Nous avons pris en compte la traduction de Georges Guiffrey : W.-M. Thackeray, La Foire aux Vanités, Paris, Gallimard, 1974. Les passages où apparaît le prince de Peterwaradin se situent aux pages 747, 765 et 784.
28 Si l’on met de côté l’éphémère épisode de la présentation à la Cour.
29 Le souci d’exotisme prime ici sur l'exigence de précision, comme le montre l’emploi d’un terme qui convient fort mal à la noblesse hongroise.
30 Nous pouvons d’ailleurs rattacher cet exotisme emprunt d’ironie à un trait méconnu de William M. Thackeray, ses considérations racistes et culturalistes que Ton retrouve dans ses récits de voyage en France. Voir à ce sujet R. Pearson, Thackeray, op. cit., « the Foreign Correspondent », p. 69.
31 Il est impossible de savoir si Thackeray a eu entre ses mains les Réclamations de 1823. Il ne fait en revanche aucun doute que l’aventurier italien aurait été idéalement croqué par l’auteur qui en aurait sûrement fait un personnage savoureux... s’il avait été anglais...
32 « L’hexis corporelle est la mythologie politique réalisée, incorporée, devenue disposition permanente, manière durable de se tenir, de parler, de marcher, et, par là, de sentir et de penser ». Voir P. Bourdieu, Le Sens pratique, Paris, éd. de Minuit, 1980. Elle serait en quelque sorte la manifestation physique de l’habitus, une manifestation dont la fiction se serait emparée.
33 Les concepts du mythe, du signifiant et du signifié sont très clairement expliqués chez Roland Barthes, Mythologies, Paris, Seuil, 1957, p. 220-221.
Auteur
Centre d’études des Mondes Modernes et Contemporains, Bordeaux 3.
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