11. L’organisation judiciaire, reflet d’une certaine idée de la justice
p. 239-258
Texte intégral
1Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, les imperfections de l’organisation judiciaire ne pouvaient échapper à tout observateur : au civil, la multiplicité des juridictions entretenait la chicane et ruinait les plaideurs ; au pénal, juristes et philosophes dénonçaient les justices seigneuriales, souvent peu empressées à poursuivre le crime, ainsi que les parlements dont Voltaire fustigeait l’obscurantisme. Pour les agents du pouvoir, souvent sensibles aux idées nouvelles, ces critiques nourrissaient des projets de rénovation qui souvent se doublaient d’un objectif politique : l’abaissement des Cours souveraines. Les réformes Maupeou et Lamoignon avaient cependant échoué, laissant aux juristes-patriotes de l’Assemblée constituante, ennemis des parlements et hommes des Lumières, l’occasion de tenter à leur tour la difficile réforme. Aux enjeux traditionnels s’en ajoutait désormais un nouveau, issu de la victoire de la souveraineté nationale et d’une constante méfiance à l’égard du pouvoir exécutif. Afin de protéger les droits naturels récemment proclamés, afin d’enlever au roi sa justice retenue, on allait en grande partie séparer les administrations des tribunaux, démocratiser le recrutement des magistrats et construire un édifice judiciaire vraiment neuf. De l’Assemblée constituante à l’an VIII, Merlin participa activement à cette œuvre ; par la confrontation de ses projets d’organisation judiciaire aux réalisations révolutionnaires peuvent ainsi transparaître, non seulement sa contribution à l’une des grandes réformes de l’époque, mais aussi sa conception de la justice et de son évolution, ainsi que les implications politiques et sociales de ses convictions.
Justice et politique : le double enjeu d’une réforme
2Comment s’étonner que, dans les dernières années de la France Moderne, le jeune avocat Merlin n’envisageât que des réformes ponctuelles de l’organisation judiciaire ? Pour cet homme, sincèrement royaliste, l’acceptation des institutions établies s’imposait et les changements projetés n’avaient d’autre but que de corriger des imperfections et d’améliorer l’efficacité de la justice, sans aucun esprit de système. Dans le Répertoire de jurisprudence et le Traité des offices ses propos étaient ainsi mesurés et bien éloignés des principes défendus sous l’Assemblée constituante, même s’ils trahissaient déjà une certaine conscience des enjeux politiques et judiciaires de toute réforme.
3Pourtant, l’organisation envisagée restait éminemment traditionnelle, presque conformiste. Le jurisconsulte la présentait couronnée par la personne du roi, unique source de la justice et chef incontestable de l’ordre judiciaire : tous les tribunaux tenaient leur existence et leurs pouvoirs du monarque, toujours possesseur de la justice retenue1. Merlin ne remettait pas davantage en cause la justice concédée ; ainsi, il ne renia pas les juridictions échevinales avant l’été 17892, et défendit probablement aussi longtemps l’existence des justices seigneuriales. A la différence de Loyseau, il soutenait même que les seigneurs n’avaient pas usurpé leurs pouvoirs de justice, mais qu’ils les tenaient du souverain ; s’il y avait eu usurpation, écrivait-il, elle était à chercher dans le droit qu’ils s’étaient arrogé de juger en dernier ressort. Afin de préserver l’image de l’autorité régalienne, Merlin justifiait l’existence de ces juridictions dont il regrettait, par ailleurs, à la fois l’arbitraire des officiers et l’inefficacité en matière pénale.
4En fait, Merlin se contentait d’observer les usages, signalant leurs défauts et avançant parfois quelques moyens pour y remédier. A l’article « Douai » du Répertoire, il proposait ainsi le rattachement des villes de Dunkerque, de Bourbourg et de Gravelines au ressort du Parlement de sa province, car cette juridiction lui paraissait mieux informée de la langue et de la jurisprudence des Flandres que le Conseil souverain d’Artois3. Assez proche des thèses royales sur le rôle des parlements, Merlin espérait également une stricte limitation des pouvoirs de ces cours en matière d’enregistrement des édits et ordonnances royaux. Cet objectif se retrouvait aussi bien dans le Traité des offices, en 1786, dans lequel il ramenait le droit de remontrance à un simple avis, que dans les cahiers de doléances de la ville et du bailliage de Douai, où les rédacteurs demandaient la fixation des droits des Cours souveraines en cette matière4. Dans le discours du jurisconsulte, on rechercherait cependant en vain toute invitation à rapprocher la justice des justiciables ou à supprimer la vénalité des offices et les épices.
5Comme dans maints domaines, c’est la Révolution qui permit à Merlin de franchir un pas décisif ; progressivement, dans un mouvement commun à la plupart des patriotes, l’attente de réformes ponctuelles céda la place à une volonté de construire une structure vraiment neuve, adaptée aux grands principes proclamés en août 1789. Cependant, même s’il est patent que Merlin accueillit avec faveur le rapport Bergasse (17 août 1789), il ne participa que de très loin au débat sur l’élaboration d’une nouvelle hiérarchie de tribunaux, commencé le 24 mars 1790. A la différence de grands juristes de l’Assemblée comme Duport, Thouret, Lanjuinais, Le Chapelier, Target ou Tronchet, Philippe Merlin ne proposa aucun plan d’ensemble ; l’orateur, dont les prises de parole étaient pourtant fréquentes, ne se mêla d’ailleurs que rarement au débat et ne participa véritablement qu’à la discussion sur la mise en place du Tribunal de cassation ; même rares, ses interventions prouvent cependant que l’enjeu ne le laissait pas indifférent5. D’ailleurs, au nom du Comité de Constitution, en décembre 1790 et en avril de l’année suivante, ainsi qu’en son propre nom en février 1791, Merlin tenta de compléter l’œuvre constituante en proposant des décrets relatifs à certains usages des tribunaux de son département6.
6Ces dernières interventions nous offrent peut-être l’une des clefs pour comprendre l’attitude de Merlin. Comment expliquer, en effet, que ce patriote, à la différence d’un Duport, d’un Thouret ou d’un Sieyès, se tint à l’écart de l’important débat sur l’organisation judiciaire ? Certes, il est probable que ses obligations au Comité d’Aliénation des domaines nationaux et au Comité des Droits féodaux occupaient l’essentiel de son temps ; malgré tout, il participait régulièrement aux séances de l’Assemblée et personne ne l’empêchait de prendre la parole ! En fait, c’est à la lumière de l’expérience que Merlin voulut contribuer à l’édification de la nouvelle organisation judiciaire. En 1790, le député n’avait guère d’idées précises sur la nature de ces nouvelles institutions et laissait agir et opiner des orateurs plus créatifs ; cependant, toujours en relation étroite avec les autorités de son département, il se rendit vite compte des défauts de l’œuvre accomplie7 et voulut participer activement à son perfectionnement.
7Le pas ne fut cependant franchi qu’en 1792, lorsqu’il présidait le Tribunal criminel du Nord. Le 30 mai, Merlin adressa à l’Assemblée un nouveau « projet d’organisation judiciaire » dont elle prit connaissance le 12 juin8 ; le document fut renvoyé au Comité de Législation où, lu et annoté par Thorillon, qui n’en apprécia guère les propositions, il fut classé et demeura lettre morte. Le manuscrit, rédigé par un secrétaire de Merlin, se présente sous la forme d’un projet de décret divisé en cinq titres, dont le premier, sans intitulé, abolit les tribunaux de district, et les suivants pourvoient à leur remplacement en traitant successivement : « Des juges en matière civile », « Des juges en matière criminelle », « Des juges en matière de police » et des « Moyens d’exécution ». Chaque titre est divisé en articles, dont les plus importants sont commentés par l’auteur. Le projet est précédé d’une lettre où Merlin explique le but de sa démarche :
La réformation de l’ordre judiciaire est devenue si indispensable, écrit-il, que pour peu qu’elle soit différée, le rétablissement de l’ordre deviendra impossible. Pénétré de cette idée affligeante, j’ai conçu un projet d’organisation judiciaire qui est simple, d’une exécution facile et peu dispendieuse9.
8Ainsi, ce projet doit être envisagé comme une œuvre essentiellement politique, étroitement liée à la situation intérieure et extérieure du pays. Son origine se retrouve dans un constat que l’auteur avait dressé dès le mois d’avril 1791 : celui des carences des tribunaux de district dont les juges élus, en plus de leurs responsabilités dans les affaires civiles, présidaient les jurys d’accusation et siégeaient dans les tribunaux criminels des départements. L’activité de ces juridictions entraînait alors des jugements probablement moins enthousiastes que ceux habituellement recueillis par les historiens10 ; en l’occurrence, c’est la proximité de la frontière du Nord, l’entrée en guerre du pays et la permanence des troubles liés aux subsistances ou à la religion qui expliquaient les sévères critiques de Merlin. Pour exercer les larges pouvoirs laissés aux juges de district, il fallait, en effet, des hommes acquis à la Révolution ; or, au moins dans le département du Nord, le choix des électeurs se porta sur des modérés qui ne remplirent pas scrupuleusement leurs responsabilités. C’est cette conviction qui justifiait le projet d’organisation de Merlin, où l’ensemble des mesures proposées gravitaient autour de la suppression des tribunaux de district à compter du 30 septembre 179211.
9Indirectement, le texte du jurisconsulte trahissait également une certaine vision de la justice qu’allait confirmer un autre projet de réforme, présenté cette fois devant la Convention, en thermidor an III (juillet-août 1795)12. Dans ses Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire, Merlin proposait quelques modifications au plan élaboré par la Commission des Onze, en reprenant nombre de suggestions déjà formulées en 1792 ; ses critiques se concentraient sur trois points jugés essentiels : l’appel circulaire en matière civile, l’attribution des fonctions de directeur de jury d’accusation à des juges du tribunal civil de département et le silence de la commission sur la manière de juger les délits de police correctionnelle.
10Même si, en 1792 et à un moindre degré en l’an III, Merlin envisageait l’organisation judiciaire dans son ensemble, ses projets de réforme ne faisaient que corriger l’œuvre de l’Assemblée constituante à laquelle il se référait constamment. A la lumière des événements, afin d’assurer l’ordre intérieur du pays et la victoire des principes politiques de 1789, il proposait quelques aménagements ponctuels qui devaient permettre à la justice de remplir exactement son rôle, tant au civil qu’au pénal. Dans ces projets transparaissaient aussi les objectifs que le législateur donnait à l’acte judiciaire, ainsi que les moyens qu’il proposait pour les remplir ; s’y côtoyaient généralement des buts hérités de l’Ancien Régime et des moyens profondément renouvelés par la Régénération.
Au civil, la confiance dans l’arbitrage et l’équité
11Envisagée pour des raisons politiques, la réforme que Merlin présenta au printemps 1792 ne négligeait pourtant pas l’organisation de la justice civile. Fidèle à l’esprit des Constituants, le président du Tribunal criminel du Nord y affichait sa volonté de faire définitivement disparaître les abus dénoncés sous l’Ancien Régime : il se montrait ennemi de la chicane, cherchait à limiter le nombre des procès et tentait de diminuer leurs longueurs en modifiant l’organisation judiciaire ; il proposait également une nouvelle diminution du coût de la justice. Mais Merlin ne se contentait pas de ces principes déjà reconnus et envisageait l’adoption de quelques modifications de fond : son projet tentait de laisser une plus large place à l’arbitrage, proposait de ne confier aux magistrats-juristes que la connaissance des appels et prônait une réduction sensible du nombre des juges. Conforté par un bel idéalisme, une indéniable volonté de confier au peuple souverain lui-même l’essentiel de l’exercice de la justice civile et l’ambition de dépasser le modèle britannique, son but était de simplifier et de rationaliser l’organisation judiciaire à la lumière de deux années de fonctionnement.
12A la base de la structure judiciaire, Merlin proposait le maintien de la plupart des juridictions et des procédures conciliatoires établies par la loi des 16-24 août 1790, dont il entendait respecter les lignes maîtresses13 ; il n’adressait de griefs ni aux juges de paix, pour leur action au civil, ni aux juges de commerce et aux tribunaux de famille, dont il semblait apprécier les travaux. Le juge de paix siégeait dans chaque canton et dans les bourgs de plus de deux mille âmes où il exerçait des fonctions en matière civile et pénale ; au civil, il jugeait en dernier ressort toutes les affaires inférieures à cinquante livres, et à charge d’appel les causes de cinquante à cent livres. Les tribunaux de commerce tranchaient les différends commerciaux, tandis que les tribunaux de famille, créés pour contrôler les enfants tumultueux, pouvaient également être établis pour résoudre des questions privées comme les successions, les séparations de corps ou la gestion des biens des mineurs. Dans son projet de décret, Merlin jugeait très favorablement les résultats de ces dernières assemblées, appréciation que semblent conforter les études les plus récentes que nous possédons sur leur activité14. Le magistrat proposait de prendre modèle sur ces tribunaux de famille pour mettre en place des « arbitres » qui connaîtraient de toutes les causes civiles portées jusque-là, en première instance, devant les tribunaux de district15. Selon Merlin, ces hommes pourraient être nommés dans le respect des articles 12 et 13 du titre X de la loi des 16-24 août 1790 qui prévoyait, dans les affaires soumises aux tribunaux de famille, que chaque partie choisirait deux arbitres parmi ses parents, amis et voisins. Si l’une d’elle refusait de les désigner, le juge de paix du canton recevait l’obligation d’y pourvoir d’office. Une fois nommés, les arbitres devaient rendre une décision motivée, à la majorité simple ou, en cas de partage des opinions, se choisir un surarbitre pour les départager. Les parties devaient s’en remettre ensuite à leur décision16.
13Par cette proposition, Merlin prônait l’attribution de toutes les affaires civiles à des arbitres ou à des juges non nécessairement juristes de profession ; jusque-là, en effet, les causes les plus importantes demeuraient de la compétence des tribunaux de district où siégeaient des magistrats hommes de loi. Désormais, ces causes seraient portées devant des arbitres qui, comme les juges de paix, les juges de commerce et les membres des tribunaux de famille, jugeaient souvent en équité, c’est-à-dire selon leur propre sens de la justice, sans nécessairement s’arrêter à la lettre des textes de loi17. Ainsi, dans un premier temps, chaque citoyen devrait d’abord s’en remettre à ses pairs ; ce n’est qu’ensuite qu’il soumettrait sa cause à de véritables juges. La proposition trahissait un net idéalisme.
14Une incertitude existe cependant sur le sort que Merlin réservait à la conciliation, rendue obligatoire par la loi des 16-24 août 1790 avant toute action devant les tribunaux de district18. Les conciliateurs, qui remplissaient un rôle extra-judiciaire19, écoutaient les parties, tentaient de réduire leur différend et de les amener à transiger. Même si l’institution permit de diminuer le nombre des procès, Merlin ne l’évoque à aucun moment dans son projet. En fait, il est probable qu’il envisagea son maintien avant chaque appel devant des magistrats professionnels. Quoi qu’il en soit, le projet de Merlin entendait donner à l’exercice de la justice une grande cohérence : avant tout appel, nécessairement porté devant des magistrats-juristes, il prévoyait que les parties s’en remettraient aux décisions de simples citoyens, ou élus, ou choisis par les parties.
15Par crainte de la reconstitution de compagnies de magistrats, l’Assemblée constituante avait rejeté l’idée d’un tribunal d’appel, défendue par Thouret et Le Chapelier, pour adopter la procédure des appels circulaires. En conséquence, le tribunal de district jugeait en appel les causes issues des juges de paix, des tribunaux de famille et des tribunaux de commerce de son ressort ; quant aux affaires portées devant lui en première instance, les appels étaient interjetés devant l’un des tribunaux de district voisin. Dans son projet. Merlin profitait de la disparition de ces dernières juridictions pour tenter de corriger cette procédure, jugée trop complexe. Il proposait l’établissement, dans chaque département, d’un tribunal civil sédentaire qui jugerait uniquement en appel et en dernier ressort20. Chaque tribunal serait composé de sept juges, d’un commissaire du roi et d’un greffier ; six magistrats seraient nécessaires pour juger et, précisait-il, si ce nombre ne pouvait être obtenu, la cour serait autorisée à se compléter en faisant appel à des suppléants, voire à des « hommes de loi »21. Si Merlin ne précisait pas les conditions de nomination de ces magistrats, c’est probablement parce qu’il entendait les recruter de la même manière que les juges de district, élus pour six ans parmi les hommes de loi âgés de plus de trente ans et d’au moins cinq années d’expérience.
16Ce choix d’un « tribunal d’appel » départemental montre bien tous les espoirs, et probablement toutes les illusions, que Merlin plaçait dans les tribunaux de commerce et les procédures conciliatoires ; pour cet homme, doté d’une véritable foi en l’arbitrage, un seul tribunal, disposant d’une seule chambre, devait suffire à dénouer les différends subsistant après l’intervention des juges de paix, des juges de commerce et des différentes juridictions arbitrales ! De plus, Merlin n’hésitait pas à lui confier les fonctions pénales dévolues aux juges des tribunaux de district, et notamment à appeler ses magistrats à siéger, à tour de rôle, au tribunal criminel du département. Pour faciliter leur tâche, il demandait d’ailleurs que cette nouvelle cour fut installée au chef-lieu du département, dans la ville ou siégeait déjà le tribunal criminel22. Si cette juridiction avait vu le jour, il est probable qu’elle aurait rapidement été débordée par les appels et qu’il aurait fallu, pour y faire face, la diviser en plusieurs chambres.
17Un tel projet, certes, n’était qu’un document de travail ; bien des aspects de l’organisation des tribunaux civils envisagés par Merlin restaient dans l’ombre. Quelques grandes lignes de son texte ne manquaient cependant pas d’éloquence, même si le Comité de Législation y resta totalement sourd. Plus tard, la Convention thermidorienne ne reprit pourtant pas davantage ces idées, et la Constitution du 5 fructidor an III (22 août 1795) modifia l’organisation judiciaire dans un sens bien éloigné du projet de Merlin23. Certes, les tribunaux de district furent remplacés par des tribunaux civils de département, mais ceux-ci ne furent pas de simples cours d’appel, comme l’avait espéré Merlin en 1792, puisqu’ils recevaient les compétences des juridictions auxquelles ils succédaient ; ainsi, ils tranchaient des affaires en première instance, dont les appels étaient ensuite portés devant l’un des tribunaux civils des départements voisins ; on retrouvait ici la procédure des appels circulaires. Le 9 ventôse an IV (28 février 1796), les députés poursuivirent leur réforme en supprimant les tribunaux de famille, excepté pour quelques questions comme certaines catégories de divorces, ou comme le droit pour un père de châtier son fils24.
18Merlin ne pouvait se satisfaire de ces innovations qui lui paraissaient reproduire, et même amplifier, les erreurs de l’Assemblée constituante. Avant même leur adoption, dans ses Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire (thermidor an III), il avait d’ailleurs attiré l’attention de ses collègues sur le maintien de l’appel circulaire qui, au lieu de concerner des districts voisins, devait désormais s’appliquer de département à département. Afin d’économiser les deniers publics, de décourager la chicane, et d’éviter aux plaideurs de « grands frais » et de longs déplacements, il avait ainsi proposé, en vain, de supprimer ces appels et « de faire juger en dernier ressort, par les tribunaux civils, toutes les affaires de leurs arrondissemens respectifs, soit qu’ils s’en trouvassent saisis par appel de juges-de-paix, d’arbitres ou de tribunaux de commerce, soit qu’on les portât devant eux en première instance »25.
19Merlin restait assez fidèle aux idées des Constituants et, dans une moindre mesure, à celles qu’il avait exprimées en 1792. Dans un premier temps, il proposait de confier les affaires commerciales aux tribunaux de commerce, et la plupart des différends civils aux juges de paix qui, en fonction de l’importance des enjeux, jugeraient en dernier ressort ou à charge d’appel26. L’on peut cependant remarquer qu’il ne remettait pas en cause le rôle des tribunaux civils de département en première instance ; il souhaitait cependant que l’on portât préalablement leurs affaires devant un bureau de conciliation qui les réglerait, si possible, à l’amiable27. Son espoir de réduire le nombre des procès civils en confiant, avant toute action devant des magistrats-juristes, l’ensemble des affaires à des arbitres, à des juges non professionnels ou à des conciliateurs n’avait ainsi pas totalement disparu28.
20C’est peut-être parce que l’idéalisme hérité de l’époque constituante y était encore omniprésent, que Merlin ne put imposer son projet d’organisation de la justice civile. En matière pénale, ce fut tout le contraire qui s’observa ; non seulement la voix du jurisconsulte lut entendue mais en plus, malgré un vif désir de réforme, Merlin conserva toujours de la justice pénale une vision classique, héritée du XVIIIe siècle, où la priorité allait vers la recherche d’une prompte punition des coupables : dans une période de troubles, n’était-ce pas logiquement cette vision de la justice qui devait l’emporter ?
Au pénal, la recherche de l’exemplarité
21A l’Assemblée constituante, Philippe Merlin conservait une vision traditionnelle des objectifs de la rétribution des délits. Il attribuait à la peine un double but : le premier était de protéger la société, par la neutralisation du fautif et l’exemplarité de la sanction, le second de châtier les coupables29. A la différence de Beccaria et bientôt de Bentham, Merlin joignait à la fonction utilitaire de la peine une fonction morale ; de plus, contrairement à nombre de législateurs révolutionnaires, comme Saint-Just, qui demeura toujours partisan de l’impunité30, il ne privilégia jamais l’amendement sur la répression. Dans ces conditions, l’efficacité de la justice pénale dépendait de la promptitude et de la publicité des jugements ; ces exigences entraînaient une conception de l’organisation judiciaire bien différente de celle observée dans le domaine civil. Alors que Merlin espérait une justice civile proche des justiciables, il pensait que la nécessaire fermeté des tribunaux exigeait que l’on éloigne les magistrats des populations, de manière à rendre les juges plus libres et indépendants.
22Certes, les convictions de Merlin paraissaient peu assurées sous la Constituante, où il ne pressentait pas les défauts de la nouvelle organisation judiciaire. A l’issue de débats auxquels il n’avait guère participé, les députés avaient partagé les compétences pénales, selon la gravité des infractions, entre le tribunal de police municipale, composé d’officiers municipaux, le tribunal de police correctionnelle, sous la responsabilité du juge de paix, et le tribunal criminel de département, où l’instruction était confiée au juge de paix et au président du tribunal de district qui faisait office de directeur du jury d’accusation. En mai 1792, dans son plan de réforme de l’ordre judiciaire, Merlin proposa cependant une profonde modification des juridictions intermédiaires de cet ensemble.
23Dans son projet, Merlin prônait le maintien, sans modification, des deux degrés extrêmes de l’organisation pénale. En matière criminelle, il prévoyait la conservation des tribunaux de département dans les formes existantes, si ce n’est que les trois juges qui servaient par trimestre aux côtés du président auraient dû être choisis dans les tribunaux d’appel dont il envisageait la création31. Cette fidélité aux décisions de l’Assemblée constituante était récente, et s’expliquait par sa propre expérience à la tête du Tribunal criminel du Nord ; en effet, jusqu’en janvier 1792 au moins, Merlin n’avait pas caché sa préférence pour le recours à « l’ambulance », imaginant une cour qui se déplacerait dans les villes de son ressort afin de rendre la justice sur les lieux même des délits32. Pour les infractions mineures, les tribunaux de police municipale lui semblaient également suffire, et le magistrat prévoyait leur maintien dans le respect de la loi des 19-22 juillet 179133 ; la disparition des tribunaux de district aurait cependant transféré la connaissance des appels aux juridictions civiles qu’il prévoyait d’établir dans les départements.
24En fait, en matière pénale, la principale innovation proposée par Merlin concernait les tribunaux de police correctionnelle qu’il entendait déplacer des cantons aux districts. Deux raisons motivaient cette proposition :
Les Juges de paix n’ont, écrivait-il, surtout dans les campagnes et dans la plupart des petites villes, ni assez de lumières, ni assez de fermeté pour appliquer les peines infligées par la loi aux délits de police correctionnelle [...]. Un Juge de paix qui a ses propriétés exposées en pleine campagne à la vengeance des coupables qu’il doit punir ou de leurs parens, ne peut s’élever à la hauteur de caractère qu’exigent ses fonctions34.
25Pour corriger ces défauts, il souhaitait ne laisser au juge de paix, dans le cadre de son canton, d’autre tâche que celle de décerner des mandats d’amener et d’arrêt. Quant aux fonctions de police correctionnelle, il proposait de les confier à un tribunal siégeant au chef-lieu de district et composé d’un juge de police élu, dans des conditions qu’il ne précisait pas, ainsi que de trois juges de paix du chef-lieu de district ou, à défaut, d’assesseurs ; de ces quatre hommes, le plus jeune, précisait-il, ferait office de ministère public35. Merlin prévoyait ainsi l’organisation d’un véritable tribunal correctionnel, qui jugerait avec recours possible devant le tribunal d’appel du département. Afin de remplacer les fonctions criminelles dévolues aux juges de district, il proposait également de confier au juge de police la direction du jury d’accusation ; il précisait enfin que ce magistrat devrait traduire devant les jurés tous les inculpés qui lui seraient présentés en vertu de mandats d’arrêts décernés par les juges de paix, sans exception aucune36.
26Il fallut cependant attendre l’an IV et la participation du jurisconsulte aux grandes réformes thermidoriennes pour voir se modifier l’organisation judiciaire, et se réaliser certaines des propositions avancées par Merlin en 1792. Certes, la distinction originelle entre tribunal de simple police, tribunal de police correctionnelle et tribunal criminel demeura, mais la répartition des rôles fut bouleversée, à la manière de l’organisation administrative du pays. Dans le Code de brumaire, en effet, les tribunaux de police municipale cédèrent la place à des tribunaux de simple police siégeant dans les nouvelles municipalités de canton. Ils étaient composés d’un président, qui était nécessairement le juge de paix, et de deux assesseurs, qui jugeaient en dernier ressort avec recours possible en cassation toutes les affaires passibles d’une peine inférieure à trois journées de travail ou à trois jours d’emprisonnement. Pour Merlin, qui avait sans cesse montré une grande méfiance envers les juges de paix, cette formule ne devait être qu’un pis aller. D’ailleurs, dans les mois qui suivirent, le ministre de la Justice se montra fréquemment déçu ou mécontent de l’action de ces tribunaux ; à maintes reprises, il rappela ainsi les juges de paix à leurs devoirs, non seulement en ce qui concerne les tribunaux de police, mais aussi à propos des pouvoirs qu’ils avaient conservés en matière d’information dans les procès criminels37.
27Les tribunaux de police correctionnelle, au nombre de trois à six par département, donnèrent davantage satisfaction à Merlin qui en était d’ailleurs directement à l’origine. En effet, le plan de la Commission des Onze n’évoquait pas les délits de police correctionnelle, dont il attribuait tacitement la connaissance aux juges de paix des cantons. Fidèle à son projet de 1792, Merlin continuait à critiquer cette solution ; dans ses Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire, en thermidor an III, il reprit ainsi les arguments exposés trois ans plus tôt et proposa de confier la police correctionnelle à une nouvelle juridiction, plus efficace et plus rapide : « Il faut établir dans chaque département cinq ou six tribunaux, que j’appellerai tribunaux correctionnels »38. Les procès devraient y débuter dans les cinq jours qui suivraient le renvoi par le directeur du jury39 ; l’instruction se ferait directement à l’audience, où le prévenu serait interrogé, les témoins entendus, les pièces lues et les défenses proposées. Le jugement serait rendu immédiatement, ou au plus tard à l’audience suivante40. Contre le projet de la Commission des Onze, Merlin avait également proposé de confier le rôle de directeur du jury d’accusation aux présidents des tribunaux correctionnels, et non à deux présidents des tribunaux civils41, et demandé l’encadrement strict de cette fonction ; le magistrat qui l’exercerait devrait présenter au jury d’accusation ou renvoyer devant le tribunal correctionnel tous les individus traduits devant lui, sans aucune exception, et son action serait placée sous la surveillance de l’accusateur public du tribunal criminel de son département42.
28Même si toutes ces suggestions ne furent pas strictement adoptées, l’on doit reconnaître que les tribunaux correctionnels furent organisés sur la proposition de Merlin et, en grande partie, selon les modalités qu’il avait définies. Etablis pour connaître les infractions non afflictives et infamantes, susceptibles de peines supérieures à trois journées de travail ou à trois jours d’emprisonnement, ils jugeaient à charge d’appel devant le tribunal criminel et avec pourvoi possible en cassation. Ces tribunaux étaient composés d’un président, choisi parmi les juges du tribunal civil du département, de deux juges de paix ou, à défaut, d’assesseurs, ainsi que d’un commissaire du pouvoir exécutif et d’un greffier43. Sur ce point, la Convention s’était éloignée des vœux du jurisconsulte. En effet, même si dans ses Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire, Merlin ne précisait pas le mode de nomination du président du tribunal correctionnel, il semble qu’il envisageait de le faire élire ; ses fonctions de magistrat et de directeur du jury pouvaient l’occuper à temps plein ; c’était d’ailleurs la proposition qu’il avait formulée dès 1792. Par souci d’économie, les députés choisirent cependant de confier cette tâche aux juges des tribunaux civils, pourtant déjà fort occupés par ailleurs, puisqu’ils intervenaient également dans les juridictions criminelles.
29Au sommet de cette organisation, pour connaître les délits passibles de peines afflictives et infamantes, le Code de brumaire avait en effet conservé les tribunaux criminels des départements, auxquels Merlin n’avait pu imposer les modifications qu’il envisageait. Ainsi, ils étaient désormais composés d’un président, d’un accusateur public, d’un greffier ainsi que de quatre juges choisis parmi les membres du tribunal civil de département, soit un de plus que dans l’ancienne organisation, et deux de plus que dans le projet de Merlin44 ; comme l’avait prévu le jurisconsulte, la fonction de juge au tribunal civil deviendrait vite très lourde à assurer.
30Parce que directement impliqué dans la réforme pénale entreprise par les Thermidoriens, Merlin de Douai avait réussi à donner à la nouvelle organisation judiciaire des accents personnels. Son œuvre ne survécut cependant pas au Directoire, puisque la loi du 27 ventôse an VIII (18 mars 1800) la modifia profondément, tant au civil qu’au pénal. La principale innovation de Merlin, ces tribunaux de police correctionnelle auxquels il semblait tenir depuis si longtemps devaient disparaître, réunis qu’ils étaient aux tribunaux civils de première instance ! L’œuvre de Merlin de Douai allait être plus durable et révéler un véritable sens de la justice en matière de cassation.
Le Tribunal de cassation, « gardien suprême de la loi »
31De toutes les institutions judiciaires, aucune n’est plus intimement attachée au nom de Merlin que la Cour de cassation, tant l’activité du législateur puis du magistrat en croise fréquemment les étapes de l’élaboration et des difficiles premières années. C’est sous l’influence de Merlin que l’Assemblée constituante, décidée à préserver une procédure de révision des jugements proche de celle de l’Ancien Régime, allait faire du Tribunal de cassation une juridiction unique et sédentaire ; c’est avec la complicité du jurisconsulte que, sous la Convention et le Directoire, ce tribunal devait perdre son autonomie face à l’exécutif et au législatif ; c’est encore Merlin, procureur général impérial, qui allait progressivement donner à cette juridiction une image contemporaine.
32Les débats sur l’organisation du Tribunal de cassation, commencés dès le mois de mai 1790, avaient été vifs et les choix difficiles : le tribunal devait-il être unique ou multiple ? être sédentaire ou ambulant ? les ouvertures à cassation devaient-elles être larges ou étroites ? devait-on donner à ce tribunal le pouvoir d’interpréter la loi ? Autant de questions auxquelles Merlin allait proposer des réponses qui souvent s’imposeraient45. Sur le rôle de cette juridiction, les Constituants se montraient presque unanimes, et la pensée de Merlin ne se démarquait pas par son originalité puisqu’il présentait le tribunal comme le « gardien suprême de la loi », refusait d’y voir un degré supplémentaire de juridiction et insistait sur son caractère de juge de la forme et non du fond46. Malgré cette spécificité, il ne doutait pas que ce tribunal s’intégrât parfaitement dans l’organisation judiciaire du pays ; dans un discours prononcé le 24 mai 1790, il présenta ainsi le Tribunal de cassation comme le « pouvoir judiciaire suprême », « le lien commun de tous les tribunaux d’appel »47. Même s’il ne jugeait pas les faits, la nature de ses fonctions était judiciaire et non législative. Sur ce point, le jurisconsulte se détachait nettement de députés comme Goupil de Préfelne et Robespierre, qui présentaient la cassation comme une émanation ou une partie du pouvoir législatif. Sur ce débat se greffait celui de l’attitude du tribunal face à la loi. Certes, tous les Constituants s’accordaient pour lui refuser le droit d’interpréter la loi ou de combler ses lacunes, comme en témoigne l’interdiction de tout arrêt de règlement prononcée le 5 juillet 1790 ; mais tous les députés n’allaient pas jusqu’à interdire l’interprétation ponctuelle de la loi, lorsque celle-ci se présentait dans des situations particulières. C’était le cas de Merlin qui, à la différence de Robespierre, semblait considérer comme inévitable l’élaboration d’une jurisprudence48.
33Sous l’Assemblée constituante, Merlin voulut ainsi faire du Tribunal de cassation une véritable juridiction qui, en protégeant la loi, coifferait tous les autres tribunaux ; afin qu’il remplît ces exigences, il l’envisageait comme une juridiction unique et sédentaire. Tandis que les principes de l’ambulance et de la division semblaient prêts de l’emporter, notamment par crainte de la reconstitution d’un équivalent du Parlement de Paris, il défendit, le 24 mai 1790, la sédentarité et l’unité du tribunal dans le triple intérêt de la nation, de la justice et des justiciables. « L’intérêt de la Nation, écrivait-il, est certainement d’être une, et par conséquent de multiplier, de fortifier tous les moyens propres à lui assurer cette unité » ; or, l’ambulance entraînerait nécessairement la division du tribunal, enlevant à celui-ci toute chance de s’exprimer d’une seule voix : elle conduirait à d’inévitables et scandaleuses discordances dans la lecture de la loi. En faveur de la sédentarité, Merlin évoquait l’intérêt de la justice qui était d’avoir des juges éclairés et expérimentés, pas nécessairement prêts à mener une vie errante ; la sédentarité permettrait également de réunir, en un même lieu, des magistrats assez nombreux pour qu’ensemble ils connaissent la multitude des coutumes locales. De plus, la résidence des juges devait interdire toute corruption. Le député terminait son raisonnement en envisageant l’intérêt des justiciables ; il retournait alors à son avantage l’un des principaux arguments de ses adversaires, ardents défenseurs d’un rapprochement de la justice et des justiciables, en démontrant que la facilité des recours en cassation encouragerait la chicane et ruinerait les parties49.
34Les arguments de Merlin de Douai furent décisifs et entraînèrent la décision de l’Assemblée qui, le 26 mai, se prononça en faveur de la sédentarité ; la question de l’unité ne fut cependant définitivement tranchée qu’en août 1790, lorsque Merlin contribua à rejeter toute division du tribunal en plusieurs sections, dont certaines auraient siégé en province. Le principe de l’unité du tribunal fut ainsi voté sous la forme d’une motion proposée par Duport : « Le tribunal de cassation sera unique et sédentaire auprès du corps législatif »50. Les idées de Merlin triomphaient, et la division du tribunal en une chambre des requêtes et une chambre de cassation ne semble pas les avoir trahies. Malgré tout, la formulation de l’article de Duport maintenait ouvert le débat sur l’indépendance de la juridiction suprême face à l’Assemblée. A l’époque, Merlin paraissait la défendre farouchement. Pourtant, dans les années qui suivirent, pour des raisons essentiellement politiques, le jurisconsulte participa parfois à sa violation.
35En matière pénale, Merlin s’inquiéta en effet, dès le printemps 1792, des fréquents pourvois en cassation qu'il observait notamment dans son Tribunal criminel du Nord, où environ 65 % des condamnés y eurent recours au temps de sa présidence51. Dans son projet d'organisation judiciaire, en mai 1792, il proposa ainsi de réduire, avec plus de rigueur encore que l’Assemblée52, les possibilités de pourvoi en matière criminelle. Son idée était de porter les demandes en cassation devant l’un des deux tribunaux criminels les plus voisins de celui qui avait prononcé le jugement remis en cause ; les sept juges du tribunal d’appel, dont Merlin prévoyait l’organisation, devaient alors se réunir au président du tribunal criminel et examiner le bien-fondé du recours. S’ils étaient unanimement d’avis qu’il était injustifié, la demande de pourvoi était rejetée et le jugement criminel devenait immédiatement exécutoire ; mais si l’un des juges était d’avis contraire, l’affaire était transmise au tribunal suprême53. En 1792, c’était ainsi la croyance dans futilité des peines et le désir d’accélérer la marche de la justice pénale qui conduisaient Merlin à vouloir limiter les recours en cassation.
36La dégradation de la situation politique du pays, en 1793, ne put qu’accentuer cette tendance, et l’on ne s’étonnera guère de rencontrer Merlin à la tribune de l’Assemblée, le 2 brumaire an II (23 octobre 1793), proposer la limitation des ouvertures de cassation en matière criminelle54. Le décret, présenté au nom du Comité de Législation, cherchait à résoudre la contradiction qui séparait la loi sur les jurés du 16 septembre 1791, prévoyant l’annulation de tous les jugements où les formes étaient violées ou omises, de l’instruction sur la procédure criminelle du 29 du même mois, qui réservait l’annulation aux seules formes dont l’omission ou la violation était expressément sanctionnée par la peine de nullité. De ces deux définitions, Merlin proposait d’adopter la plus restrictive, alors que le Tribunal de cassation avait jusque-là respecté la plus large, sanctionnant sans distinction toute violation ou omission de forme en matière pénale55. Comme la législation en vigueur, et notamment la loi sur les jurés, n’avait prévu que fort peu de cas de nullité, Merlin proposait cependant d’étendre la peine à cinq autres violations des formes56 ; dans les jours et les mois qui suivirent, il étoffa progressivement cette liste57 que devait compléter le Code de brumaire.
37En matière civile, par contre, la dégradation de la situation politique ne marqua pratiquement pas les conditions de la cassation, même si la définition des ouvertures fut quelque peu modifiée sous l’influence de Merlin. En effet, le décret du 4 germinal an II (24 mars 1794), adopté sur le rapport du jurisconsulte, sembla en grande partie confirmer une définition fort large de celles-ci. En ce domaine, la loi du 27 novembre 1790 avait distingué les jugements rendus dans les formes antérieures à 1789, de ceux rendus dans les formes nouvelles ; dans le premier cas, l’annulation pour vice de forme n’avait lieu que dans les occasions où la loi prévoyait la nullité, alors que dans le second, toute violation entraînait annulation. Dans son décret, Merlin ne voulait pas revenir sur cette distinction, mais entendait simplement la préciser. Malgré tout, par l’article 4, il stipulait que si la forme avait été violée par l’une des parties ou par un fonctionnaire public agissant à sa requête, cette violation ou omission ne pouvait entraîner ouverture à cassation que lorsqu’elle avait « été alléguée par l’autre partie devant le tribunal dont celle-ci prétend[ait] faire annuler le jugement pour n’y avoir pas eu égard » ; Jean-Louis Halpérin remarque que cet article plaçait les parties devant leurs responsabilités et entraînait une restriction de facto des ouvertures à cassation, à une époque où les justiciables étaient souvent peu ou mal conseillés58. A la différence du domaine criminel, la limitation du nombre des ouvertures ne semblait cependant pas liée au contexte politique.
38Quoi qu’il en soit, l’influence de la Terreur sur le nouveau tribunal ne se limita pas à une nouvelle définition des ouvertures à cassation ; elle se révéla aussi par un certain recul, ainsi que par une remise en cause de son indépendance. En effet, parallèlement à la justice ordinaire se mit progressivement en place une justice révolutionnaire où les jugements étaient prononcés sans recours possible en cassation, donc hors de tout contrôle judiciaire. De plus, la Convention chercha à exercer une véritable surveillance du tribunal qui entraîna, dès le mois d’octobre 1793, de nombreuses annulations de jugements. Parce que la Convention se considérait en possession de la souveraineté nationale, elle se permettait d’intervenir dans l’ordre judiciaire et de casser des décisions de justice.
39Merlin ne semble pas avoir réprouvé cette pratique, bien au contraire, puisque son nom lui fut étroitement associé ! Ce fut en effet par un décret adopté sur son rapport que la Convention l’inaugura, le 26 vendémiaire an II (17 octobre 1793). Jusqu’au 9 thermidor (27 juillet 1794), elle annula ainsi dix-sept décisions du Tribunal de cassation, le plus souvent sur la proposition de Merlin ; après cette date, la pratique se prolongea jusqu’en germinal an III (mars-avril 1795), mais le député ne paraît plus y avoir joué le rôle de rapporteur du Comité de Législation59. Dans ses rapports, Merlin de Douai justifiait ces annulations par un souci proclamé de protéger les lois ; le 6 brumaire an II (27 octobre 1793), dans l’affaire Lecointre, il motivait son décret en affirmant « que le tribunal de cassation finirait par renverser toutes les lois dont il est chargé de maintenir l’exécution, si la Convention nationale laissait subsister ceux de ses jugements, qui sont marqués au coin de l’arbitraire »60. Avec l’assentiment du jurisconsulte, la Convention se transformait en un tribunal suprême, jouant un rôle assez proche de celui du Tribunal de cassation, tout en se plaçant au-dessus de lui ; l’Assemblée lui empruntait d’ailleurs ses méthodes, notamment l’annulation, ainsi que son discours et son argumentation61 ! ! Pour des raisons intimement liées à la guerre et aux troubles intérieurs, Merlin se montrait favorable à une intervention du législatif dans le domaine judiciaire ; la pratique répondait à une situation exceptionnelle et devait logiquement disparaître avec le retour à l’ordre.
40Les habitudes prises en l'an II furent cependant si prégnantes que Merlin et les Conventionnels eurent du mal à s’en détacher. Certes, en germinal an III (mars-avril 1795), les décrets d’annulation disparurent ; mais la pratique se déplaça de l’Assemblée au Comité de Législation qui, à son tour, annula des décisions du tribunal suprême62. Pourtant, Merlin semblait être revenu à ses idées de constituant : le 10 thermidor an II (28 juillet 1794), lors d’un débat qui l’opposa à Dubois-Crancé, il présenta ainsi la justice comme un véritable « pouvoir », indépendant du législatif et de l’exécutif63. La reprise des désordres suffit cependant à lui faire accepter une nouvelle violation de ce principe. Sous le Directoire, comme ministre de la Justice ou comme directeur, Merlin de Douai s’opposa ainsi assez fréquemment au Tribunal de cassation et limita plus d’une fois son indépendance ou ses compétences. Ainsi, dans l’affaire des Naufragés de Calais ou dans celle de Brottier et de La Villeheurnois, Merlin se heurta à la juridiction suprême dans sa volonté de faire juger ces contrerévolutionnaires par des tribunaux militaires64. Plus tard, au lendemain du 18 fructidor an V (4 septembre 1797), le nouveau directeur participa activement à l’épuration de ce tribunal65. Une nouvelle fois, les dangers politiques justifiaient l’ingérence d’un pouvoir dans la vie du Tribunal de cassation ; les interventions du Directoire exécutif dans la nomination des juges n’allaient cependant pas être sans lendemain, puisqu’elles annonçaient les transformations entreprises par l’Empire, où la nomination se substitua à l’élection.
41Malgré tout, au-delà des épisodes de Tan II et du Directoire, il est probable que l’attachement de Merlin à la nouvelle institution demeura toujours profond. Sous l’Empire et la Restauration, dans ses œuvres doctrinales, il en donna ainsi une image assez proche de celle développée dès 1790. Dans son Répertoire de jurisprudence, aux articles « Cassation » et « Cour de cassation », il plaçait la juridiction à la tête de l’organisation judiciaire du pays et faisait du « premier tribunal de la France » le juge des violations de la loi et des procédures66. Portant plus loin ses convictions d’ancien constituant, et dépassant définitivement les réticences des héritiers de Goupil de Préfelne et de Robespierre, Merlin contribua également à faire de la Cour de cassation la source d’une véritable jurisprudence ; très vite, en effet, ce tribunal ne se contenta plus d’appliquer « mécaniquement » la loi, mais procéda à son interprétation67.
42De 1789 à l’Empire, Merlin de Douai avait ainsi contribué à donner à la Cour de cassation son visage, et avait influencé d’une manière non négligeable les réalisations de l’an III et de l’an VIII. Si l’on observe l’évolution de l’organisation judiciaire de droit commun, l’on s’aperçoit que, dans son projet de 1792, Merlin avait retenu au moins trois juridictions qui s’imposeraient sous l’Empire : le Tribunal de cassation, le tribunal criminel et le tribunal d’appel ; malgré cette clairvoyance, les idées du jurisconsulte n’étaient cependant pas dénuées d’illusions comme en témoigne sa foi dans l’arbitrage et l’équité, par lesquels il croyait pouvoir dénouer l’essentiel des différends privés. Il est vrai que ce mélange de sagacité et d’illusion était commun à nombre de juristes des assemblées révolutionnaires. En matière pénale, par contre, Merlin fit toujours preuve d’une vision assez traditionnelle de la justice. Tandis que d’aucuns commençaient à parler amendement et redressement du condamné, il envisageait avant tout une modernisation et une rationalisation d’un système judiciaire jugé incohérent, complexe et inefficace. Les buts de la justice pénale étaient pour lui les mêmes que sous l’Ancien Régime, mais les moyens sortaient totalement bouleversés des mains des législateurs.
Notes de bas de page
1 Guyot J.N., Traité des offices, op. cit., tome I, 1786, p. 147.
2 Les cahiers du Tiers état de la ville et de la gouvernance de Douai demandèrent expressément leur maintien pour les villes de Douai et d’Orchies. Cf. art. 36 du cahier du Tiers état de la gouvernance de Douai (A.P., tome ΙII, p. 179-183) ; art. 28 du cahier de doléances du Tiers état de la ville de Douai (A P tome III, p. 184-186).
3 Guyot J.N., Répertoire de jurisprudence, op. cit., 2e éd. tome VI 1784 p. 269.
4 Guyot J.N., Traité des offices, op. cit., tome I, p. 17. Voir aussi le cahier du Tiers état de la gouvernance de Douai, art. 15 (A.P., tome III, p. 179-183), et le cahier du Tiers état de la ville de Douai, art. 36 (A.P., tome III, p. 184-186).
5 Voir les séances de l’Assemblée des 24 mai, 12 août, 19 novembre, 7 et 24 décembre 1790, 27 janvier, 3, 24, 27 et 28 février, ainsi que celle du 28 avril 1791.
6 Cf. notre thèse, op. cit., tome II, p. 530.
7 A.N., BB2 20, l.s. de Merlin à Duport-Dutertre, ministre de la Justice, datée du 2 avril 1791.
8 A.P., tome XLV, p. 102, séance du 12 juin 1792.
9 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75 : l.a.s. de Merlin, président du Tribunal criminel du Nord, au président de l’Assemblée nationale, datée de Douai, le 30 mai 1792 ; suivie de son « Projet pour la réformation de l’ordre judiciaire », 8 p. non autographes, s.d., avec annotations de Thorillon.
10 Jacques Godechot écrivait qu’excepté les lenteurs de la justice, « les tribunaux de districts ne suscitèrent aucune plainte ». Godechot Jacques, Les institutions de la France..., op. cit., p. 157.
11 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre Ier, art. 1.
12 Convention nationale. Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire ; par Ph.-Ant. Merlin (de Douai) ; imprimées par ordre de la Convention nationale, Imprimerie nationale, thermidor an IIΙ, 12 p. in-8°.
13 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre II, art. 1.
14 Et contredire quelque peu le classique et toujours utile Darnis Lucien, Des tribunaux de famille dans le droit intermédiaire, thèse de droit, Paris, Henri Jouve, 1903, p. 77 et 109-122. Sur les recherches récentes concernant les tribunaux de famille voir Royer Jean-Pierre, Histoire de la Justice en France, op. cit., p. 299-300.
15 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre II, art. 1.
16 Darnis Lucien, op. cit., p. 66-67.
17 Cf. Clere Jean-Jacques, « Recherches sur l’histoire de la conciliation en France aux XVIIIe et XIXe siècles », Mémoires de la Société pour l'histoire du droit et des institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands, fasc. 46, 1989, p. 210.
18 Loi des 16-24 août 1790, titre X, art. 1 et 2. Signalons que par la loi des 16-27 mars 1791, l’Assemblée nationale constituante exclut de la conciliation toutes les affaires intéressant l’Etat, les communes et l’ordre public, qui furent confiées à des juridictions administratives. Voir Clere Jean-Jacques, « Recherches sur l’histoire de la conciliation en France... », op. cit., p. 203 et 210.
19 La conciliation avait lieu devant le juge de paix et ses assesseurs réunis dans un « bureau de paix et de conciliation » si toutes les parties résidaient dans le même canton ; dans le cas contraire, l’affaire était portée devant le bureau de paix du chef-lieu de district où siégeaient six citoyens, dont deux hommes de loi, choisis pour deux ans par le conseil général de la commune. Hiver, Histoire critique des institutions judiciaires de la France de 1789 à 1848, Paris, Auguste Durand, 1851, p. 112-113.
20 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre II, art. 2.
21 Ibid., titre II, art. 4.
22 Ibid., titre II, art. 3 et titre III, art. 2.
23 Sur cette réforme, voir Godechot Jacques, Les institutions de la France..., op. cit., p. 476-481.
24 Voir Darnis Lucien, op. cit., p. 122-123.
25 Convention nationale. Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire..., op. cit., p. 2.
26 Ibid., p. 5, art. 2.
27 Ibid., p. 6, art. 4.
28 Voir A.N., 108 mi 36 (partie no 85, pièce no 77), l.s. du ministre de la Justice Merlin à Cambacérès, datée du 19 floréal an IV (8 mai 1796).
29 Cf. notre thèse, op. cit., tome II, p. 540.
30 Bongert Yvonne, « La philosophie pénale de Saint-Just » R.D.Nord 1986, no 268, p. 242-244.
31 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre ΙII, art. 1, 2 et 3.
32 A.P., tome XXXVII, p. 114, séance du 7 janvier 1792, lettre de Merlin, datée du 2 janvier 1792, qui annonce à l’Assemblée l’installation du Tribunal criminel du département du Nord.
33 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre IV, art. 1.
34 Ibid., titre IV, commentaire de l’art. 2.
35 Ibid., titre IV, art. 4, 5 et 6.
36 Ibid., titre IV, art. 7 et 8.
37 Cf. A.N., BB2 29, minute (avec quelques annotations autographes de Merlin) d’une circulaire du ministre de la Justice Merlin sur les juges de paix, 18 ventôse an V (8 mars 1797).
38 Convention nationale. Vues sur l'organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire..., op. cit., p. 4.
39 Ibid., p. 8, en note, art. 7. Excepté si les séances du jury d’accusation y mettaient obstacle.
40 Ibid., p. 7-8, en note, art. 6.
41 Ibid., p. 3.
42 Ces propositions dérogeaient aux art. 6-13 du titre Ier, de la seconde partie de la loi du 16 septembre 1791. Cf. Convention nationale. Vues sur l'organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire..., op. cit., p. 11, note, loi réglementaire relative au paragraphe 3.
43 Hiver, op. cit., p. 413-415.
44 Ibid., p. 417 ; Convention nationale. Vues sur l’organisation constitutionnelle du pouvoir judiciaire..., op. cit., p. 12, art. 4.
45 Voir ses interventions des 24 mai (A.P., tome XV, p. 665-668), 12 août (A.P., tome XVII, p. 741) et 19 novembre 1790 (A.P., tome XX, p. 538).
46 A.P., tome XV, p. 666-667, séance du 24 mai 1790.
47 Ibid., p. 666.
48 Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 63 et 73.
49 Ibid., p. 59 ; et A.P., tome XV, p. 665-667, séance du 24 mai 1790.
50 A.P., tome XVII, p. 741, séance du 12 août 1790.
51 Si l’on ne tient pas compte des condamnations par contumace, qui ne pouvaient faire l’objet d’un recours en cassation. Cf. Gouillard-Deperchin Annie, op. cit., p. 84.
52 Voir Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 111-113.
53 A.N., AA 53, pl. 6, pièce 75, titre HI, art. 4, 6 et 7.
54 Le Moniteur universel, no 34 du 4 du 2e mois an II (25 octobre 1793), séance du 2 du 2e mois (23 octobre), réimpression, tome XVIII, p. 208.
55 Ibid. ; et Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 134.
56 Voir notre thèse, op. cit., tome II, p. 553.
57 Cf. A.P., tome LXXVII, p. 478, séance du 3 brumaire an II (24 octobre 1793) ; ibid., tome LXXXVI, p. 638, 28 ventôse an II (18 mars 1794) ; ibid., tome LXXXVIII, p. 714,28 germinal an II (17 avril 1794). Voir aussi Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 135, et notre thèse, op. cit., tome II, p. 553.
58 Le Moniteur universel, no 187 du 7 germinal an II (27 mars 1794), séance du 4 germinal (24 mars), réimpression, tome XX, p. 52-53 ; Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 136.
59 Cf. Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 150-162 et 174.
60 A.P., tome LXXVII, p. 672, séance du 6 brumaire an II (27 octobre 1793) ; cité dans Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 152.
61 Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 153.
62 Ibid., p. 184.
63 Le Moniteur universel, no 316 du 16 thermidor an III (3 août 1795), séance du 10 thermidor (28 juillet), réimpression, tome XXV, p. 364. Voir aussi Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 193.
64 Cf notre chapitre 4.
65 Voir Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 237.
66 Expression extraite de Merlin P.A., Répertoire de jurisprudence, op. cit., Paris, 5e éd., tome IV, 1827, « Cour de cassation », p. 33 ; voir aussi ibid., « Cassation », p. 360.
67 Voir Halperin Jean-Louis, Le Tribunal de cassation..., op. cit., p. 269.
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