5. Le « prince des jurisconsultes »
Histoire d’une incomplète réhabilitation
p. 119-140
Texte intégral
1C’est un homme à la fois blessé, amer et soulagé d’avoir évité une mise en accusation qui renoua avec la vie publique au début du Consulat. Grâce à l’amitié de Bonaparte, acquise dès la journée du 13 vendémiaire an IV (5 octobre 1795), Merlin de Douai commença une brillante carrière de magistrat au Tribunal de cassation, qui fit de lui l’une des grandes personnalités judiciaires du début du XIXe siècle ; sous la Restauration, un long exil, mis à profit pour réviser une vaste œuvre doctrinale, renforça encore son image de « prince des jurisconsultes », comme l’appela son contemporain Charles Toullier1. Parallèlement à cette croissante renommée, Merlin tenta d’oublier son propre passé, d’en conjurer à la fois les échecs, comme le 30 prairial (18 juin 1799), et les aspects antilibéraux, comme sa collaboration à la Terreur. Patiemment, il reconstruisit sa propre image, celle d’un homme que seul passionne le droit ; démarche étonnante que Ton pourrait croire vaine, mais qui aboutit pourtant partiellement dès la Restauration. A Bruxelles, nous rapporte Baudot, « les Français visitaient volontiers Merlin à cause de sa réputation de jurisconsulte ; sous le rapport politique, point »2. A la différence d’un Barère, encore très recherché, notamment par les Whigs anglais, Merlin n’était plus considéré comme un homme d’Etat ; le triomphe de l’Orléanisme allait encore encourager cette métamorphose.
Un juriste au service de l’empereur : la Cour de cassation et le Conseil d’Etat
2Au lendemain du 30 prairial an VII (18 juin 1799), un certain dégoût de la politique sembla envahir Merlin. Certes, l’homme conserva des convictions et soutint notamment avec ferveur l’Empire ; mais tout en devenant l’un des grands serviteurs de l’Etat, il se tint à l’écart des débats et de la scène politiques. Cette volontaire et assez surprenante discrétion n’est probablement pas étrangère à son souci de réhabilitation qui aboutit, dès l’an VIII, à son installation dans la vie judiciaire de la capitale.
3L’on n’est guère renseigné sur la vie de Merlin durant les dix mois qui suivirent son éviction du Directoire exécutif ; assurément, il mena une existence discrète. Il est possible qu’il se retira quelque temps dans son département d’origine, comme l’annonça Le Moniteur universel du 4 messidor an VII (23 juin 1799)3 ; mais, dès le printemps 1800, il reparut sur la scène publique. Le 19 germinal an VIII (9 avril 1800), il fut nommé substitut du commissaire du gouvernement près du Tribunal de cassation ; moins d’une année après avoir exercé le pouvoir exécutif, le juriste acceptait un poste pour le moins modeste, qui le plaçait sous l’autorité du commissaire du gouvernement, Bigot-Préameneu, et sur un pied d’égalité avec cinq autres substituts. Selon Louis Gruffy, Merlin fut attaché à la section des requêtes, l’une des trois que comptait le tribunal présidé par Murarie4.
4Dire que Merlin, après l’épreuve directoriale, aspirait à servir de nouveau l’Etat, même à un emploi modeste5, ne nous semble guère rendre compte de ses motivations. En fait, le jurisconsulte profita de sa nomination pour retrouver une certaine respectabilité ; ainsi, trois jours après son acceptation du poste, il fit sa rentrée à l’Institut, dont il n’avait pas suivi les séances depuis le 30 prairial6. Dans les années qui suivirent, Merlin continua de fréquenter cette assemblée où, après la disparition de la classe des Sciences morales et politiques (1803), il suivit les séances de la classe de Langue et littérature française, dont les quarante membres perpétuaient le souvenir le l’Académie fondée par Richelieu7.
5En 1800, par le biais du Tribunal de cassation et de l’Institut, Merlin avait renouvelé quelque peu son image. Une fois cet objectif atteint, probablement par ambition ou par fierté, son emploi de substitut ne sembla plus guère lui donner satisfaction et, vers le début de fructidor an IX (août 1801), environ seize mois après son entrée en fonction, il donna sa démission et laissa entendre qu’il renonçait aux affaires publiques. A cette occasion, au tout début de vendémiaire an X (septembre 1801), la Gazette de France et le Journal des débats rapportèrent qu’il entendait se fixer à Paris afin d’y exercer la profession d’avocat consultant8.
6Quelques mois plus tard, Merlin fut cependant nommé commissaire du gouvernement au Tribunal de cassation, en remplacement de Bigot-Préameneu, appelé à présider le Conseil d’Etat9. Cette fois, la fonction flattait ses ambitions autant que ses goûts, puisqu’elle le transformait en premier représentant du ministère public dans le tribunal suprême. Indubitablement, ce nouvel emploi facilita le renouveau de l’image de l’ancien conventionnel, tant dans le public que dans l’entourage du premier consul. Le 4 germinal an XII (25 mars 1804), Merlin de Douai fut ainsi nommé membre du Conseil de discipline et d’enseignement de l’Ecole de droit de Paris10. Au début du mois de floréal de la même année (avril 1804), peu avant la proclamation de l’Empire, le bruit circula même qu’il devait être appelé à un ministère11 ; la rumeur n’eut cependant aucune suite.
7Avec l’Empire, le Tribunal de cassation prit le titre de Cour, et le commissaire du gouvernement fut nommé procureur général impérial (28 floréal an XII-18 mai 1804). Ce changement de dénomination ne modifia cependant pas les fonctions de Merlin qui, jusqu’à la Restauration, conserva de mêmes pouvoirs. A la tête du ministère public de la Cour de cassation, l’une des premières places dans la hiérarchie judiciaire du pays, il était chargé de la surveillance de tous les procureurs généraux des juridictions criminelles et d’appel, et plus généralement de tous les magistrats du parquet. Sur ordre du gouvernement, il devait également dénoncer, à la section des requêtes de la Cour, les excès de pouvoir ou les délits commis par les juges dans l’exercice de leurs fonctions. Le procureur général impérial éclairait aussi les magistrats sur le sens exact des lois, et veillait à la bonne application des textes et des procédures. Si aucun pourvoi n’avait eu lieu, il pouvait requérir, dans l’intérêt de la loi, la cassation de tous les jugements viciés par des excès de pouvoir en matière civile ou par une violation quelconque d’un texte législatif en matière criminelle12.
8A la Cour de cassation même, le procureur général impérial, assisté de six substituts, également répartis entre les trois sections du tribunal, était entendu sur toutes les affaires et défendait celles où l’Etat avait un intérêt13. Ses conclusions, dont l’élaboration représentait une bonne partie de son travail, se caractérisaient souvent par leur richesse et leur longueur. Au dire de ses contemporains et de ses premiers biographes, Merlin excellait dans ce type d’exercices où ses connaissances et son sens du droit le servaient admirablement ; ses talents étaient même appréciés au-delà des frontières de l’Empire. Ainsi, en 1811, le Conseil d’Etat de Westphalie, faisant office de Cour de cassation, était divisé sur un point important de jurisprudence ; afin de le trancher, il prit Merlin pour arbitre et régla sa décision sur son avis14. Les détracteurs les plus farouches du jurisconsulte eux-mêmes, ne lui reniaient pas ces qualités, même s’ils en profitaient parfois pour le présenter comme un simple et docile organe de la loi15. Les aptitudes professionnelles et la renommée du jurisconsulte expliquent ainsi en grande partie sa brillante carrière impériale ; il est vrai également que Merlin manifesta longtemps un vif attachement à l’empereur, dont il avait salué la montée sur le trône en évoquant :
[Un] nouveau pacte social qui associe pour toujours la destinée du peuple français au nom du chef suprême qu’il s’est choisi, au nom du grand homme qui, comme cet autre héros dont parle Tite-Live, s’est élevé par son génie à un degré de gloire auquel ne peuvent plus rien ajouter les acclamations des quatre parties du monde16.
9Se voulant entièrement au service de l’Etat et de l’empereur, Merlin ne se contenta pas de sa fonction de procureur général. Le 18 février 1806, il fut nommé conseiller d’Etat en service ordinaire, hors section17 ; cinq ans plus tard, le 7 avril 1811, tout en gardant les mêmes attributions, il fut promu conseiller d’Etat à vie18. Etabli par la Constitution de l’an VIII, et maintenu sous l’Empire, le Conseil d’Etat, l’un des maillons du pouvoir législatif, était chargé de préparer la rédaction des projets de lois, des décrets et des arrêtés, et était consulté sur l’interprétation des textes existants. Dès le Consulat, il avait également joint à ses compétences législatives un rôle de tribunal administratif. Composé d’une pléiade de juristes, nommés par le pouvoir exécutif, le Conseil d’Etat ne fut pas pour Merlin l’occasion d’un véritable engagement politique ; son rôle y fut terne et ne lui valut guère les hommages de ses contemporains. Le comte Molé, pour qui Merlin demeurait avant tout l’auteur de la loi des suspects, nous le présente comme un homme constamment attentif, « épiant chaque mouvement, chaque geste de celui qui parlait » ; s’il restait muet « dès que le débat s’échauffait, précisait-il, ou que l’empereur y faisait ce que l’on appelait de la réaction », il parlait à chaque fois que Napoléon le consultait et apportait alors autant de précisions qu’aurait pu en donner son Répertoire19. De son côté, l’empereur rapporta qu’il se servait de Merlin comme d’un « flambeau »20. Les procès-verbaux des séances du Conseil d’Etat confirment ce rôle modeste ; lors des débats importants, comme ceux qui concernaient l’établissement du Code pénal, Merlin se contentait le plus souvent ou de corriger la formulation d’un article, de manière à le rendre plus clair, ou de rappeler l’existence d’un texte utile à la discussion.
10Le jurisconsulte, renonçant à la scène politique, s’était retiré sur celle du droit ; il était devenu l’un des premiers légistes de l’empereur et paraissait satisfait de sa fonction. Indubitablement, les avantages sociaux de sa nouvelle situation avaient facilité son choix. Dans la vie de Merlin, l’Empire représente une sorte d’apogée social, dont les signes les plus apparents sont ces honneurs que lui prodiguèrent la générosité de l’empereur et la table des rangs. Dès le 4 frimaire an XII (26 novembre 1803), le commissaire du gouvernement fut intégré dans la Légion d’honneur avec le grade de chevalier, transformé, dès le 25 prairial de la même année (14 juin 1804), en celui de commandeur21. Le 30 juin 181122 Merlin devint grand officier de cet ordre dont il était par ailleurs, depuis six mois, membre du Comité de consultation23. La course aux honneurs le porta également, le 11 avril 1813, au rang de commandeur dans l’ordre impérial de la Réunion qui, depuis octobre 1811, perpétuait le souvenir de la réunion de la Hollande, des villes hanséatiques, de Rome, de la Toscane et du Piémont à la France en récompensant, d’après ses statuts, les personnes qui se distinguaient « dans l’exercice des fonctions judiciaires, dans l’administration et dans les armes »24.
11Avec la reconstitution d’une hiérarchie complète de titres, Merlin allait couronner sa réussite sociale par un nouvel anoblissement. Le 20 avril 1808, un mois et demi à peine après la publication des deux statuts impériaux, il demanda à l’archichancelier les lettres patentes de chevalier auxquelles sa Légion d’honneur lui donnait droit25. Ce titre, transmissible à sa descendance masculine par ordre de primogéniture, à condition qu’elle soit capable de justifier d’un revenu annuel de trois mille livres, lui fut ainsi conféré dès le 8 mai26. Quelques mois plus tard, le décret du 15 août 1809 le nomma comte. De par ses fonctions au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, il ne pouvait cependant prétendre qu’au rang de baron, aussi fut-ce par une largesse de l’empereur qu’il obtint ce titre normalement accordé aux ministres, aux sénateurs, aux conseillers d’Etat à vie, aux présidents du corps législatif et aux archevêques27. Par les honneurs reçus, mais aussi par sa fortune qui, vers 1811, dépassait le million de francs28, Merlin se rattachait à la haute société dont il fréquentait les tables et les salons.
12Au premier abord, le souvenir de la Révolution ne paraissait entretenir ni haine, ni division entre ces grands notables ; comme nombre d’anciens Conventionnels, Merlin parlait de certains « événements passés comme des accès d’un vrai délire révolutionnaire », pour reprendre les propos de Chaptal29. Le premier président de la Cour de cassation, qu’il côtoyait quotidiennement au Palais, et que l’on retrouve comme témoin dans l’un de ses actes de notoriété30, n’était-il pas Muraire, l’une des nombreuses victimes de la Terreur fructidorienne ? Cette paix retrouvée autour des valeurs impériales ne fut-elle pas célébrée par nombre de mémorialistes31 ? Ses ennemis d’hier étaient devenus ses frères francs-maçons32 ! Cette apparente réconciliation. Merlin l’avait lui-même scellée par un remariage assez révélateur. Après une longue et douloureuse maladie, sa première épouse, dont Talleyrand avait jadis raillé la bonhomie provinciale, était décédée à Paris, le 15 septembre 181133. A Dieppe, huit mois plus tard, Merlin se remaria à une comtesse d’Ancien Régime, Isabelle Caroline Rohart, veuve du comte Louis Aymard Lefournier de Wargemont, ancien commandant de la Haute-Normandie34.
13Cet événement ne trahit cependant qu’une partie de la réalité, car même s’il est indéniable que Merlin comptait des amis parmi ses anciens adversaires politiques, il est tout aussi évident que la réconciliation fut loin d’être parfaite. A lire les mémoires des contemporains, on est même surpris de l’extrême sévérité des jugements portés sur Merlin, et de l’absence totale d’écrits qui prennent sa défense ou en donnent un tableau favorable. Le portrait qu’en dresse Molé est assez représentatif de ce que l’on peut y trouver :
Je ne crois pas qu’aucune figure ait jamais été la représentation aussi fidèle de l’homme auquel elle appartenait. Mince et svelte, ses reins allongés, sa marche timide et incertaine, rappelaient ces animaux féroces et poltrons qui rôdent la nuit pour surprendre dans son sommeil leur proie. Ses cheveux courts, frisés et poudrés, des bésicles qui semblaient lui servir encore plus à masquer son regard qu’à l’étendre, des lèvres minces comme celles d’un chat, de l’hyène, des animaux naturellement sanguinaires35.
14Merlin restait avant tout le légiste de la Terreur, l’ennemi acharné des émigrés, et les haines, malgré les apparences, demeuraient encore bien vivaces. Le grand notable, apparemment intégré à la société impériale, ne pouvait faire oublier son passé politique ; en 1814, les Bourbons s’en souviendraient également.
Un retour manqué vers la politique : devenir l’un des « Trente-huit »
15Même si l’on ignore l’évolution des idées politiques de Merlin à la fin de l’Empire, il est certain qu’il déplora l’abdication de Napoléon, le 6 avril 1814. Qu’il eût ou non apprécié les dernières années de son règne, il ne pouvait applaudir au retour des Bourbons auxquels il vouait une haine farouche. Aux origines de cette hostilité, il y avait indéniablement des raisons politiques et sociales, mais l’on peut se demander si les motivations personnelles ne furent pas les seules déterminantes, la Restauration mettant simultanément en cause sa carrière, son rang social et sa fortune. En 1814, il paraissait évident qu’un régicide ne pourrait obtenir des responsabilités du nouveau gouvernement ; de grandes incertitudes planaient également sur le sort de la noblesse d’Empire et de la Légion d’honneur ; de plus, l’avenir des biens nationaux était incertain, alors que le comte détenait plus de sept cents hectares de terres d’Eglise36 ! Chez Merlin de Douai, la résistance au retour des Bourbons allait ainsi prendre ce double et étrange aspect d’un regain des principes révolutionnaires, et d’un véritable réflexe de conservation sociale.
16Prenant acte de l’abdication de l’empereur, Merlin put se sentir délié de ses serments de fidélité et chercha à conserver ses fonctions en se ralliant au gouvernement provisoire. Mais le nouveau pouvoir, peu désireux de s’attacher les services du régicide, tenta de l’exclure avec ménagement de ses hautes fonctions. Le Conseil d’Etat provisoire, établi dès le 16 avril 1814, ne comprenait que quelques personnalités proches du roi ; quant au nouveau Conseil d’Etat, établi et organisé par les ordonnances du 29 juin et du 5 juillet de la même année, s’il comptait nombre d’anciens conseillers comme Henrion de Pansey, Corvetto ou Français de Nantes, il excluait sans surprise les régicides et notamment Merlin37. Ce dernier conservait cependant son poste à la Cour de cassation ; malgré les pressions et malgré la méfiance du pouvoir qui le faisait surveiller, il refusait obstinément de donner sa démission aussi, le 15 février 1815, lors du renouvellement du personnel de la Cour, il fut mis d’office à la retraite et remplacé par Mourre, président de chambre près de cette même juridiction38.
17Rejeté de toute fonction publique, Merlin de Douai resta dans la capitale et se fit avocat consultant39 ; un mois plus tard, le retour de l’empereur mit fin à sa quasi-retraite. Dès le 13 mars, par un décret daté de Lyon, il retrouva son poste à la Cour40 ; le 24 du même mois, il réintégra le Conseil d’Etat41 ; Napoléon, pour le récompenser de sa « fidélité », le nomma également ministre d’Etat, sans portefeuille particulier42. Merlin, qui se réjouissait du retour de l’empereur, manifesta sa satisfaction dans une adresse du collège électoral du Nord, dont il était président. Le jurisconsulte y paraissait retrouver sa verve révolutionnaire pour fustiger les Bourbons et célébrer les acquis de la Révolution, consolidés par l’Empire :
Le collège électoral du département du Nord, écrivait-il, [...] croit avoir, par les choix qu’il a faits, répondu à la volonté générale de la nation, de mettre enfin et pour toujours un terme à la lutte impie du despotisme contre la liberté, des anciens privilèges contre l’égalité des droits, de la féodalité et de tous ses abus contre la prospérité de l’agriculture, des intérêts et des passions de quelques individus contre la foi jurée par la nation entière aux innombrables acquéreurs de ses propriétés, des erreurs du treizième siècle contre les principes de tous les tems43.
18Pour Merlin de Douai, la Restauration n’était qu’une tentative désespérée pour rétablir un ordre politique et social désuet, rejeté par tout un peuple et soutenu par les seules armées étrangères ; avec le retour de Napoléon, l’ancien constituant paraissait revivre la glorieuse révolution de Quatre-vingt-neuf. Les allusions du document à la « volonté générale de la nation », au « pacte social », à la « liberté publique » et au droit naturel ne faisaient que renforcer cette parenté.
19Elu à la Chambre, Merlin participa aux travaux de la Commission chargée de proposer un projet de règlement intérieur44, mais intervint peu dans les débats, si ce n’est pour manifester son souci de préserver l’ordre public45. Parallèlement, afin de consolider l’Empire restauré, il se montra convaincu d’une nécessaire libéralisation des institutions. A cet égard, le jugement d’un Molé, qui écrivit que « les bonapartistes, couverts d’or et de cordons, tels que Regnault, Defermon, Boulay, Merlin, proposaient les mesures les plus violentes et poussaient à la dictature »46, ne nous semble pas pouvoir s’appliquer au jurisconsulte. Il est ainsi révélateur que Barras attribua l’acte additionnel aux Constitutions de l’Empire, non à Benjamin Constant, mais à Thibaudeau, Defermon et Merlin47 ! Même inexacte, cette affirmation n’en est pas moins significative.
20Cette double aspiration au libéralisme et à l’intransigeance politique n’est pas la seule ambiguïté relevée dans la conduite de Merlin durant les Cent-Jours. L’on peut également remarquer que, tout en acceptant des responsabilités et en se montrant attentif à l’ordre public, le notable laissa parfois transparaître un vague pessimisme. N’est-il pas étonnant, en effet, que le 30 mars 1815, peu après son retour aux affaires, il ait cherché à recouvrer ses dernières créances ? Le partage de la succession de sa femme, le 15 juin, quatre ans après le décès de celle-ci, n’est-il pas tout aussi révélateur de son incertitude quant à la survie de l’Empire48 ? Pendant les Cent-Jours, l’attitude de Merlin apparaît ainsi double ; réveillé par la Restauration, son sens politique le conduisit à soutenir sans concession l’Empire, dans lequel il voulait croire ; parallèlement, en grand notable, il chercha prudemment à mettre ses biens et sa fortune à l’abri. Derrière l’engagement irrépressible du politique contre les Bourbons se profilait ainsi une certaine résignation, ou tout au moins une évidente inquiétude. En ce sens, contrairement à ce qu’écrivirent nombre de ses biographes, Merlin ne manqua pas de clairvoyance49 ; il apparaît au contraire comme un homme conscient des dangers, mais convaincu qu’il n’a d’autre alternative que de lutter aux côtés de l’empereur. La chute et l’exil de Napoléon vinrent cependant briser ce bref retour aux affaires ; plus encore qu’en 1799, le jurisconsulte dut trouver les fruits de l’engagement politique bien amers et prendre la résolution de n’y plus goûter.
21De retour, les Bourbons ne montrèrent aucun ménagement envers les bonapartistes relaps, surtout lorsqu’ils étaient d’anciens régicides. Dès le début de juillet, le jurisconsulte perdit non seulement sa place au Conseil d’Etat et son ministère, mais aussi son poste de procureur général à la Cour de cassation50 ; comme l’année précédente, Mourre prit sa succession51. Sous la pression des puissances alliées et des ultras, Louis XVIII entreprit également de frapper sans attendre les plus fidèles soutiens de l’empereur, et confía au duc d’Otrante le soin de lui désigner des coupables52. Une ordonnance du 24 juillet 1815 prescrivit la traduction, devant des conseils de guerre, de dix-neuf généraux et officiers accusés de trahison, et plaça provisoirement trente-huit autres personnes sous la surveillance de Fouché. Merlin, Barère, Boulay de la Meurthe, Thibaudeau et bien d’autres, reçurent l’ordre de quitter dans les trois jours la capitale, pour se rendre dans un lieu que leur indiquerait le ministre de la Police générale ; ce serait aux Chambres qu’il reviendrait ensuite de décider de leur proscription ou de leur poursuite devant les tribunaux53.
22Disposant d’une villégiature à Wargemont, non loin de la côte normande. Merlin se fit remettre un passeport pour Dieppe54 ; mais peu disposé à se placer sous la surveillance de Fouché, il prit la route du Nord et trouva hospitalité chez de nombreux parents et amis. De juillet à septembre, la police le rechercha activement, mais sans succès55. Dès la fin de septembre 1815, en effet, Merlin s’était installé à Bruxelles, dans la rue Ducale, chez Philippe François Delcambe, un ancien administrateur de la Belgique conquise56 ; à l’époque, son hôte avait abandonné tout service public pour se consacrer à la gestion des biens de Paulée, le munitionnaire douaisien, dont il était l’un des principaux agents. C’est par l’intermédiaire de ce « profiteur » de la Révolution qui, selon les papiers de la police, lui devait l’essentiel de sa fortune57, que Merlin avait obtenu cet asile.
23Proche de la frontière, la ville de Bruxelles séduisit Merlin qui tenta rapidement de s’y fixer. Dès son arrivée, le 27 septembre 1815, il sollicita la « protection » de Corneille Félix Van Maanen, son ancien collègue au Conseil d’Etat, nommé depuis peu ministre de la Justice de Guillaume Ier58. Les Alliés, qui craignaient la naissance d’un foyer de bonapartistes influents, imposèrent cependant aux exilés compris dans l’ordonnance du 24 juillet le choix entre trois refuges, tous situés à l’est de l’Europe : la Prusse, la Russie ou l’Autriche. Le 17 décembre 1815, Guillaume Ier se plia à leur décision et ordonna aux personnes concernées de quitter sans attendre son royaume59. Le mois suivant, la « loi d’amnistie », complétée par une ordonnance du 17 janvier 1816, acheva de dissiper les espoirs de Merlin60 ; dans un même élan, les Chambres et Louis XVIII décidaient d’éloigner du royaume les trente-huit personnes placées en résidence surveillée l’année précédente. Pour Merlin, comme pour les régicides qui avaient ou voté l’acte additionnel, ou accepté des fonctions publiques lors des Cent-Jours, cet exil était prononcé « à perpétuité ».
24Sans retraite, sans espoir d’un prochain retour au pays, Merlin, comme Sieyès et Cambacérès qui venaient d’arriver à Bruxelles61, se mit à la recherche d’une patrie d’accueil. Il écrivit à Hardenberg, qu’il connaissait, afin d’obtenir le droit de résider en Prusse, mais ne reçut aucune réponse62. Il se résolut alors à quitter l’Europe et organisa son voyage pour la République qui avait fait son admiration de patriote : les Etats-Unis. Accompagné de son fils, le général Eugène Merlin, il s’embarqua à Anvers, le 15 février 1816, sur le Lalis, un navire battant pavillon américain qui, outre son capitaine et dix-huit hommes d’équipage, emportait à son bord deux citoyens américains et un commis-voyageur de Gand63. Le navire n’atteignit cependant jamais son but ; au sortir des bouches de l’Escaut, à hauteur de Flessingue, non loin des côtes de l’ancienne île de Walcheren, il s’échoua et fit naufrage le 26 février. C’est le Journal de la Belgique qui donne de cet incident le récit le plus réaliste :
Le navire qui portait M. Merlin avec son fils a échoué sur un banc de sable pendant un temps calme ; mais, bientôt après est survenu un ouragan qui a fortement endommagé le vaisseau et l’a rempli d’eau ; de sorte que les passagers se sont trouvés exposés pendant quelques heures au plus grand danger, étant dans l’eau jusqu’au-dessus de la ceinture ; mais un petit navire détaché du port a ramené, sains et saufs, tous ceux qui étaient à bord64.
25A l’annonce de la nouvelle, des doutes s’élevèrent sur la spontanéité de l’accident, et le lieutenant de police générale du département du Nord écrivit à son ministre : « On prétend que ce légiste a payé très cher ce naufrage qui avait été préparé d’avance »65. Au début du siècle, Charles Vandepitte précisa qu’il aurait coûté quelque soixante mille francs66, somme qui semble astronomique pour une aventure dont personne ne pouvait augurer des suites ! Comme l’auteur ne cite aucune source à l’appui de son affirmation et qu’il se signale par une hostilité opiniâtre envers Merlin, son assertion nous laisse, tout comme en son temps Louis Gruffy, assez dubitatif67. En fait, hormis la lettre du lieutenant de police, aucun document ne qualifie ce naufrage de volontaire ; bien au contraire, la plupart des pièces conservées évoquent les malheurs de Merlin qui « perdit tout ce qu’il possédait et revint à Bruxelles fort incommodé »68. Il est certes exact qu’après cette mésaventure l’exilé bénéficia de la complaisance du souverain des Pays-Bas ; même s’il est impossible de dire si Guillaume Ier prononça effectivement la phrase : « Je vous l’ai donné, la mer me l’a rendu, je le garde »69, il est certain qu’il accorda au jurisconsulte des délais successifs qui lui permirent, finalement, de se fixer définitivement dans ses Etats. Pour autant, la situation de Merlin demeura précaire plus de deux années, et à maintes reprises il crut devoir quitter le pays.
26Après quelques mois passés discrètement à Laeken, qui était encore un bourg de la campagne brabançonne, et à Bruxelles, Merlin prit la route de Haarlem où il s’installa, à l’automne 1816, sous le nom de Levaillant, qui était celui de sa grand-mère maternelle ; c’est probablement par l’entremise de son ami Van Maanen qu’il avait obtenu la permission de s’y retirer70. Il y vécut presque secrètement, partageant ses journées entre l’étude du droit, la fréquentation de Defermon et une active correspondance avec des parents et des amis. Sans prendre plaisir à son exil, il se voulait tout au moins fier d’être « martir »71, et occupait parfois ses loisirs à écrire quelques vers en hommage aux « Trente-huit »72. En se valorisant les uns les autres, les exilés faisaient de leur proscription une gloire, et de la France bourbonienne un Etat barbare d’où le talent était banni. La belle solidarité entre ces victimes de l’ordonnance royale n’allait cependant guère durer ; dès la fin de l’année 1818, certains des amis de Merlin furent autorisés à rentrer au pays : Defermon, son compagnon d’exil, Courtin. son correspondant privilégié, mais aussi Lamarque, Exelmans et d’autres encore73. Pendant quelques mois, la clémence du roi le conduisit à espérer lui aussi ; mais, le 1er décembre 1819, Louis XVIII autorisa les derniers des Trente-huit à rentrer, sauf s’ils étaient compris dans l’article 7 de la loi du 12 janvier 1816 ; cette restriction, qui concernait les régicides proches de l’empereur, s’appliquait à quatre hommes : Barère, Thibaudeau, Carnot et Merlin74. L'espoir n’avait guère duré.
27Entre temps, Guillaume Ier permit au jurisconsulte de résider à Bruxelles, où il s’installa vers la fin du mois de juillet 181975. Dans cette capitale des Conventionnels en exil76, il se trouva un confortable domicile dont il se porta acquéreur en 1828, pour une somme de dix-huit mille neuf cents florins, soit environ quarante mille francs77. Située au no 18 de la rue de Namur, cette vaste maison comprenait un parloir, une antichambre, un salon et une salle à manger au rez-de-chaussée, neuf pièces au premier étage et neuf au second, « la plupart des appartemens ornés de belles cheminées de marbre et de glaces de premières qualité » ; une écurie pour cinq chevaux, des remises, une cour, un pavillon et un jardin faisaient de cette résidence un luxueux hôtel qui devait lui rappeler son domicile du faubourg Saint-Germain78. Confortablement installé et sans guère d’espoir de rentrer un jour au pays, Merlin de Douai s’organisa une nouvelle vie où, malgré son âge, il consacrait une bonne partie de son temps à l’étude, et notamment à la réédition du Répertoire de jurisprudence et des Questions de droit qui avaient fait sa réputation de jurisconsulte.
La renommée d'un grand jurisconsulte
28Le coup d’Etat du 30 prairial an VII (18 juin 1799), vécu comme un véritable camouflet, avait dirigé toute l’ambition de Merlin vers la pratique et l’étude du droit. Malgré ses fonctions publiques, il ne négligerait plus ses travaux de doctrine, dont l’élaboration progressive ne s’achèverait que vers la fin de son exil.
29Ce retour aux études de jurisprudence date ainsi de l’époque du Consulat. De l’an XI à l'an XIII, Merlin mit à profit l’expérience acquise au tribunal suprême pour publier les neuf volumes d’un Recueil alphabétique des questions de droit, qui se présentent le plus fréquemment dans les tribunaux ; ouvrage dans lequel sont fondus et classés la plupart des plaidoyers et réquisitoires de l’auteur, avec le texte des jugemens de la Cour de cassation qui s’en sont ensuivis79. Comme le titre l’indique, il s’agissait essentiellement d'une compilation de ses travaux de magistrat ; Merlin y avait également joint de nombreux articles rédigés entre 1784 et 1789 pour un supplément du Répertoire, ainsi que divers textes sur le droit intermédiaire. Malgré son austérité, l’ouvrage se vendit assez bien et une seconde édition, à la fois plus dense et plus complète, put être éditée en 181080.
30Parallèlement, Merlin se préoccupa de la mise à jour du Répertoire de jurisprudence de Guyot. Après avoir racheté à son ami les droits de propriété littéraire de cet ouvrage, vers le début de l’Empire, il en publia, en 1807-1808, une édition corrigée en treize volumes81. Le principe de la non-rétroactivité des lois permettait à des pans entiers de l’ancien droit de rester en vigueur, au moins pour quelques décennies, aussi la révision du Répertoire, même si elle entraîna la suppression de nombreux passages, exigea le maintien de l’essentiel des articles anciens ; de plus, Merlin intégra fréquemment, en les corrigeant à peine, des extraits de son Recueil général de jurisprudence (1790). Le procureur général impérial, assisté de quelques jurisconsultes de ses amis, parvint ainsi à rapidement rédiger, corriger et compléter ce vaste recueil82. Probablement encore plus prisé du public que les Questions de droit, le Répertoire connut une seconde édition dès 1812-181683.
31Merlin de Douai poursuivit son œuvre durant ses années d’exil ; à Haarlem, puis à Bruxelles, il mena une importante activité que l’âge et la maladie allaient progressivement réduire. Vers 1826, il subit une crise cardiaque accompagnée de paralysie, qui l’obligea à ralentir ses travaux84. Quelques années plus tard, il se plaignait du déclin de sa vue qui le condamnait à vivre chez lui, « presqu’en reclus »85. Malgré le poids des ans, l’œuvre de l’exilé fut pourtant considérable puisqu’en quinze années, il réalisa une nouvelle édition de son Répertoire de jurisprudence86 et deux de ses Questions de droit87. Alors que la réédition de ses œuvres demandait de longs efforts, le jurisconsulte se laissa même encore séduire par quelques entreprises nouvelles ; il fut ainsi l’un des rédacteurs, aux côtés de Lanjuinais, de Berlier et de Benjamin Constant, de L’Encyclopédie moderne, ou dictionnaire abrégé des sciences, des lettres et des arts, publiée par son ami Courtin de 1823 à 183288. Sans se faire inscrire, à la manière de Mailhe, de Ramel ou de Prieur de la Marne, au barreau de la Cour supérieure de justice de Bruxelles, il se fit également avocat consultant89, écrivit en collaboration avec des amis comme Mailhe ou Berlier, et fut sollicité de toute l’ancienne Europe napoléonienne : de Paris, mais aussi de Cologne et de Parme90.
32La fréquente hostilité que faisait naître le nom de Merlin, surtout en France, où il était parfois banni des tribunaux91, ne semble pas avoir entravé la popularité internationale de ses ouvrages. Sous la Restauration, l’on vit ainsi paraître deux livres qui tentèrent de faciliter l’accès des œuvres du jurisconsulte au public. En 1826, l’avocat Roussel publia ses Annotations sur chaque article des cinq codes, de toutes les questions de droit traitées dans le nouveau Répertoire92 ; deux ans plus tard, Rondonneau édita une Table générale des matières contenues dans le Répertoire de jurisprudence et dans le Recueil des questions de droit, par laquelle il proposait au lecteur d’accéder plus aisément à la « doctrine de Merlin »93. Même si, pour la connaissance des Codes, des œuvres modernes comme les recueils de Dalloz ou de Sirey menaient une concurrence de plus en plus vive aux travaux de Merlin94, ceux-ci n’en demeuraient pas moins unanimement appréciés. Dans les années 1830, le Répertoire et les Questions de droit connurent d’ailleurs une édition italienne95. Dupin aîné, avocat célèbre avant de devenir, sous la Monarchie de Juillet, procureur général à la Cour de cassation, pouvait ainsi écrire :
M. Merlin est un très-savant jurisconsulte. Ses ouvrages n’ont été critiqués que par ceux qui n’aimaient point sa personne. Mais ils sont dans toutes bibliothèques ; on les cite dans tous les procès, et ils ne laissent pas que d’être consultés en secret et avec fruit par ceux-là même qui leur rendent le moins de justice en public96.
33Le jugement de Dupin est loin d’être isolé et ne fait que refléter la reconnaissance dont jouissait alors Merlin. Pour Charles Toullier, nous l’avons dit, l’ancien procureur général était le « prince des jurisconsultes »97 ; quant à Rondonneau, il écrivit en 1828, dans l’introduction de sa Table générale des matières : « Merlin est regardé comme le plus savant jurisconsulte de notre siècle »98. Dans toute l’Europe, et pour de longues années encore, Merlin de Douai serait cité comme l’une des principales autorités doctrinales. Les dernières années de sa vie furent profondément marquées par cet immense prestige, même si l’ombre de son passé politique ne put disparaître.
Gloire professionnelle et désintérêt politique : les dernières années de Merlin
34Dans sa retraite bruxelloise, Merlin mena une existence paisible et cossue, bien loin de toute agitation politique ; l’homme ne manquait ni de temps pour les études, ni d’argent pour sa vie mondaine. Même si toutes ses terres avaient été partagées entre les héritiers de sa première femme, il avait conservé d'importantes sources de revenus en France, qui n’étaient peut-être autres que les biens cédés à ses enfants. Toujours est-il que, dès son séjour à Haarlem, Merlin se fit adresser l’argent dont il avait besoin par l'intermédiaire de Paulée99. Complétées par les profits de ses consultations et de ses éditions d’ouvrages juridiques, ces ressources lui permettaient d’entretenir, en 1829, une demoiselle de compagnie, une cuisinière et une femme de chambre100.
35Comme au temps de l’Empire, le comte Merlin fréquentait des tables amies et organisait réceptions et dîners dans son grand salon. S’y retrouvaient de nombreux voyageurs français ou étrangers de passage à Bruxelles, des amis fidèles comme David, Ramel et Mailhe, ainsi que nombre de « magnats » parmi lesquels Cambacérès, Sieyès, Chazal, Berlier et Thibaudeau101 ; Merlin, assure Baudot, était « le centre de ce qui restait de titres en déconfiture »102. Pour la police de France et des Pays-Bas, ces réunions paraissaient le plus souvent anodines, même si de jeunes libéraux les fréquentaient parfois103. En fait, la surveillance de Merlin s’était nettement relâchée, et son nom n’apparaissait plus qu’incidemment dans les rapports de la police·104. Il était en effet notoire que le vieil homme avait renoncé à tout combat. A la fierté d’avoir vécu l’une des grandes périodes de l’histoire devait se mêler, chez lui, une réelle déception politique, ainsi qu’un refus de se souvenir, qui aboutissait à une certaine amertume. Baudot nous rapporte qu’à Bruxelles, le baron Eugène Merlin critiquait sévèrement la condamnation de Louis XVI dans le salon même de son père ; mais le comte, écrit le mémorialiste, « souriait et laissait dire ». Sans conclure, comme Baudot, que Merlin n’avait « aucune conviction politique »105, l’on peut penser que les rudes échecs de l’an VII et de 1815 l’avaient définitivement éloigné de tout engagement.
36La Révolution de Juillet ne changea guère son attitude, même s’il est indéniable que Merlin se réjouit de la chute des Bourbons, qui lui ouvrait le chemin de la France. Avant même le rappel des proscrits·106, de nombreux exilés rentrèrent au pays ; Thibaudeau et Chazal quittèrent Bruxelles dès les premiers jours d’août 1830, et Merlin vers la fin de ce mois107. Ce ne fut cependant qu’entre la fin septembre et le début de novembre qu’il s’établit définitivement dans la capitale, son premier séjour étant probablement justifié par la recherche d’un domicile108. Comme une quarantaine d’anciens Conventionnels, Merlin retrouva sa patrie et ses anciens amis, notamment son homonyme de Thionville avec lequel, dès son retour, il renoua d’étroits et amicaux contacts109. Toujours passionné par le droit et unanimement reconnu comme l'un des plus grands jurisconsultes, il continua également à donner des consultations, le plus souvent avec de grands noms du barreau comme Teste, Parquin et surtout Odilon Barrot, avocat de talent et bientôt meneur du parti du mouvement110.
37Pour cet homme, heureux de retrouver son pays, la Révolution de 1830 apparaissait comme libératrice. Le nouveau gouvernement n’avait-il pas rapporté ce que Merlin avait appelé « l’acte tirannique du 12 janvier 1816 », qui avait ordonné son exil111 ? Les Trois Glorieuses et le triomphe d’une monarchie libérale ne rappelaient-ils pas Quatre-vingt-neuf ? Tout porte en effet à penser que Merlin se montra assez satisfait des orientations politiques du régime orléaniste. En 1833, dans une lettre appuyant une démarche d’Alexandre Andryane, frère de son gendre et ancien carbonaro, qui postulait pour le poste de bibliothécaire de la Chambre des députés, Merlin parlait de la « conformité de ses principes » aux siens, ainsi qu’à ceux de son interlocuteur ; la lettre était adressée à l’un des piliers du régime, Dupin aîné, procureur général à la Cour de cassation et président de la Chambre112 !
38D’ailleurs, le gouvernement de Louis-Philippe faisait tout pour se concilier les anciens Conventionnels ; ils étaient une caution politique du régime, une justification supplémentaire de la rupture dynastique de 1830. De différentes manières, l’on tentait de renouer le fil coupé au lendemain des Cent-Jours. A peine rentré au pays, Merlin fut réintégré sur l’état des grands officiers de la Légion d’honneur, avec le traitement y afférent113. De plus, de 1832 à 1835, la Grande Chancellerie lui versa quarante et un mille francs en réparation des gages non perçus durant sa radiation de l’ordre, de janvier 1816 à septembre 1830114. La réhabilitation de Merlin se fit également par l’intermédiaire de l’Institut, dont le gouvernement fit renaître la classe des Sciences morales et politiques, disparue dès 1803. En octobre 1832, les anciens membres encore en vie, parmi lesquels Sieyès, Rœderer, Daunou et Merlin, se réunirent, sans toujours y croire, pour reconstituer cette ancienne et éphémère institution115. Une fois intégré dans la nouvelle Académie des sciences morales et politiques116, qui comptait trente membres partagés en cinq sections117, Merlin, même s’il n’avait plus guère la force de travailler, suivit assidûment les séances de la section de Législation, droit public et jurisprudence : du 23 novembre 1832 au 27 octobre 1838, il ne les manqua qu’exceptionnellement118. Chaque semaine, il retrouvait Dupin, Daunou, Bassano et Siméon ; à l’Institut, il rencontrait également Guizot, Mignet, et bientôt Michelet, Tocqueville et Rossi.
39S’il faut en croire les auteurs qui décrivirent les dernières années de sa vie, Merlin ne cessa jamais d’étudier le droit ; l’on rapporte même que ce fut en écoutant lire le Digeste qu’il s’éteignit, le matin du 26 décembre 1838, à l’âge de quatre-vingt-quatre ans119. Deux jours plus tard, il fut inhumé au cimetière de Montparnasse, après de surprenantes obsèques par lesquelles l’Eglise, tout en acceptant cet homme parmi les siens, voulut marquer sa réprobation pour son passé de révolutionnaire régicide. Plutôt que d’être accueilli dans l’église de sa paroisse, Sainte-Valère, son corps fut emmené dans une vaste tente élevée pour l’occasion dans une cour de la rue de Bourgogne ; c’est là que des magistrats, des amis et diverses personnalités politiques lui rendirent hommage. Par leurs fonctions ou leurs qualités, les personnes présentes rappelaient au public les grandes étapes de la vie du jurisconsulte : Martin, un ancien membre du barreau douaisien, député du Nord et ministre du commerce, évoquait l’attachement de Merlin pour sa « petite patrie » ; Dupin aîné, procureur général à la Cour de cassation et ancien président de la Chambre des députés, réveillait le souvenir d’une brillante carrière de magistrat et de représentant de la nation ; Auguste Mignet, Pellegrino Rossi et Adolphe Blanqui, membres de l’Académie des sciences morales et politiques, rendaient hommage au savant et au libéral ; David d’Angers à son ami120.
40Conformément au souhait exprimé par Merlin quelque temps avant sa mort, aucune allocution ne fut prononcée sur sa tombe ; dans les semaines et les mois qui suivirent, nombre de nécrologies et d’éloges funèbres furent cependant écrits et lus par des hommes comme Dupin aîné, Auguste Mathieu et Auguste Mignet121. Sous la plume de ces personnes, généralement attachées à la monarchie orléaniste, seuls les aspects les plus consensuels de la riche existence de Merlin étaient évoqués ; les auteurs évitaient soigneusement de s’appesantir sur l’an II ou les crises du Directoire, et insistaient particulièrement sur le libéralisme et les qualités professionnelles du jurisconsulte. L’image de Merlin était celle d’un homme de talent, qui s’éleva à force d’étude et d’obstination, et d’un libéral de cœur un moment égaré par l’esprit jacobin ; en ce sens, ces récits de vie livraient une vision tronquée et fausse de son fluctuant parcours. Pour Mignet, comme pour la plupart des historiens libéraux, la Terreur, vécue comme un tout, ne pouvait être interprétée qu’uniment et rejetée dans son ensemble. Dès 1838, l’image d’un Merlin, fameux jurisconsulte et piètre politique était fixée dans tous les esprits, probablement à tort.
41De l’Empire à la Monarchie de Juillet, à force de labeur et de discrétion politique, le conventionnel régicide avait réussi sa propre réhabilitation ; chez ses contemporains, il était avant tout un juriste d’exception. Certes, l’homme de la Révolution ne pouvait totalement faire oublier son passé ; cependant, par un véritable déni de mémoire, volontaire ou non, qui laissait dans un brouillard de plus en plus dense sa collaboration à la Terreur et son échec directorial, Merlin avait laissé croire que ce furent le hasard, la maladresse ou l’inconscience qui avaient attaché son nom à des actes réprouvés par un libéralisme triomphant. Tout laisse ainsi à penser que Merlin devint très vite incapable d’assumer certains de ses anciens engagements politiques. Plutôt que de défendre, à la manière de Baudot, l’idée d’une Terreur imposée par les Circonstances122, il laissait son fils critiquer la Convention ; plutôt que de justifier sa politique directoriale, fondamentalement répressive envers les ennemis présumés de la nation, il décidait de n’évoquer jamais, ni dans d’éventuels mémoires, ni dans sa correspondance, ces souvenirs désormais pénibles. La Révolution était close et l’ancien homme d’action ne se souciait plus que de gagner, par son talent, le rang et la reconnaissance sociale qu’il pensait depuis longtemps mériter.
Notes de bas de page
1 Voir Duvivier Paul, L’exil du comte Merlin dans les Pays-Bas (1815-1830), d’après des documents inédits, Malines, imp. Godenne, 1911, p. 81.
2 Baudot Marc-Antoine, Notes historiques sur la Convention nationale, le Directoire, l’Empire et l’exil des votants, Paris, imp. D. Jouaust, L. Cerf, 1893, p. 29.
3 Le Moniteur universel, ri 274 du 4 messidor an VH (23 juin 1799), réimpression, tome XXIX, p. 716.
4 Gruffy Louis, op. cit., p. 83.
5 Ibid., p. 82.
6 Merlin reparut dans la séance de la section des Sciences morales et politiques le 22 germinal an VIII (12 avril 1800). Voir A. Institut, SMP A2, procès-verbaux des réunions de la seconde section de l’Institut, p. 118.
7 Voir Franqueville comte de, op. cit., tome I, p. 25 et 98. Précisons que Merlin fut exclu de l’Institut par l’ordonnance royale du 21 mars 1816 (ibid., tome I, p. 26-27 et 98).
8 Textes cités dans Aulard Alphonse, Paris sous le Consulat. Recueil de documents pour l'histoire de l'esprit public à Paris, Paris, Léopold Cerf, Noblet et Quantin, tome II 1904, p. 553-554.
9 9 nivôse an X (30 décembre 1801).
10 Duvivier Paul, op. cit., p. 18.
11 A.N., F7 3832, rapport de la préfecture de police du 10 floréal an XII (30 avril 1804). Reproduit dans Aulard Alphonse, Paris sous le Consulat..., op. cit., tome IV, 1909, p. 766.
12 Voir le Répertoire..., 5e éd., Paris, J.-P. Roret et Garnery, tome II, 1827, article « Cassation », p. 362.
13 La section des requêtes, la section civile et la section criminelle. Après la loi du 12 avril 1810, les substituts prirent le nom d’Avocats généraux. Voir Godechot Jacques, Les institutions de la France sous la Révolution et l’Empire, Paris, P.U.F., 1951 ; 3e éd., Paris, P.U.F., 1985, p. 622 et 630.
14 Voir le Répertoire..., op. cit., 5e édition (Belgique), tome XXXI, « Serment », p. 24-27 ; cité dans Duvivier Paul, op. cit., p. 17.
15 Pasquier Etienne Denis, chancelier, Histoire de mon temps. Mémoires du chancelier Pasquier, publiés par le duc D’audiffret-Pasquier, Paris, Plon, tome I, 1893, p. 267-268.
16 Discours prononcés à la séance de la Cour de cassation, pour la prestation du serment de fidélité des Avocats. Le jeudi 11 prairial an douze [31 mai 1804], imprimerie de Testu, s.d., p. 5.
17 A.N., AF IV* 438, « Liste générale détaillée de MM. les conseillers d’Etat, maîtres des requêtes, auditeurs au Conseil d’Etat », no 88. Durand Charles, Etudes sur le Conseil d’Etat napoléonien, Paris, Presses universitaires, 1949, p. 749 et 762.
18 A.N., AF IV* 438, no 88.
19 Noailles marquis de, Le comte Molé, 1781-1855. Sa vie. Ses mémoires, Paris, Edouard Champion, tome I, 1922, p. 72.
20 Las Cases comte de, Mémorial de Sainte-Hélène, Paris, chez l’auteur, 1823, 8 vol. ; rééd., Paris, Garnier, 1961, tome II, p. 398.
21 Lievyns, Verdot, Begat, Fastes de la Légion d'honneur. Biographie de tous les décorés accompagnée de l'histoire législative et réglementaire de l'ordre, Paris, Bureau de l’administration, tome III, 1844, p. 29.
22 Ibid.
23 Depuis le 18 décembre 1810. A.N., AF IV* 438, liste des membres du Conseil d’Etat, no 88 ; ce Comité de consultation était notamment chargé de la surveillance de la discipline des légionnaires et de la défense des intérêts de l’ordre.
24 Stalins Jean-Luc, Ordre impérial de la Réunion, Paris, Bloud et Gay 1958, p. 86.
25 A.N., BB30 1116 A-1, l.a.s. de Merlin à « Monseigneur le Prince archichancelier de l’Empire, président du Conseil du sceau des titres », datée de Paris, le 20 avril 1808.
26 A.N., CC 240 (microfilm), premier registre pour la transcription des lettres patentes portant création de titres héréditaires conformément aux statuts impériaux du 1er mars 1808, fi 188.
27 Voir le premier statut du 1er mars 1808, articles 4 et 8. A.P., seconde série, tome X, p. 12-14.
28 Voir le chapitre 15.
29 Chaptal Jean Antoine Claude, comte, Mes souvenirs sur Napoléon par le comte Chaptal, Paris, Plon, 1893, p. 231.
30 AN., BB30 1063, pièce 2, acte de notoriété constatant la propriété de Merlin sur un hôtel de la rue de Grenelle, devant Lenglancé, à Paris, le 1er septembre 1810.
31 Caulaincourt Armand Augustin Louis, Mémoires du général de Caulaincourt, duc de Vicence, Grand écuyer de l’empereur, Paris, Plon, tome II, 1933, p. 304 ; voir aussi Chaptal, op. cit., p. 231.
32 En 1804, Merlin était grand officier d’honneur du Grand Orient de France ; Ligou Daniel, s.dir., Dictionnaire de la franc-maçonnerie, Paris, P.U.F., 1987, p. 792.
33 A.N., MC III 1363, liquidation de la communauté de biens qui a existé entre le comte et la comtesse Merlin, devant Maître Vernois, à Paris, le 15 juin 1815 (voir la troisième observation).
34 Le mariage fut célébré le 14 mai 1812. Voir A.N., LH 1840/49, certificat délivré par Florent Louvet, juge de paix du 10e arrondissement de Paris, le 1er janvier 1839.
35 Noailles marquis de, op. cit., tome I, p. 71-72.
36 Voir le chapitre 15.
37 Le Conseil d’Etat. Son histoire à travers les documents d’époque (1799-1974), Paris, C.N.R.S., 1974, p. 201-216.
38 Douarche Aristide, op. cit., tome II, 1907, p. 927.
39 Voir Helie Faustin et Cuzon, op. cit., p. 56.
40 Voir Gruffy Louis, op. cit., p. 93 et Duvivier Paul, op. cit., p. 20.
41 Sur la reconstitution du Conseil d’Etat impérial voir Le Conseil d'Etat, op. cit., p. 225-226.
42 30 mai 1815. Voir Gruffy Louis, op. cit., p. 94.
43 Adresse du collège électoral du département du Nord à Napoléon, datée du 15 mai 1815, publiée dans Le Moniteur universel, no 141, du 21 mai 1815, p. 575.
44 A.N., C I* 202, procès-verbaux de la Chambre des représentants des Cent Jours, séance du 10 juin, p. 63 ; et séance du 8 juin, p. 59.
45 Voir par exemple Le Moniteur universel, no 155 du 4 juin 1815, séance du 3 juin, p. 629 ; ibid., no 167 du 16 juin 1815, séance du 15 juin, p. 682.
46 Noailles marquis de, op. cit., tome I, p. 233.
47 Barras Paul, op. cit., tome IV, 1896, p. 299.
48 Sur ce partage, voir le chapitre 15.
49 Gruffy Louis, op. cit., p. 95.
50 Dès le 7 juillet. Rappelons qu’on l’y avait maintenu pendant dix mois durant la première Restauration.
51 Merlin céda son siège à Mourre le 12 juillet 1815 ; celui-ci l’occupa jusqu’à sa retraite, le 17 août 1830. Douarche Aristide, op. cit., tome II, p. 927.
52 Duvivier Paul, op. cit., p. 21.
53 A.N., F7 6678, dos. 1, Bulletin des lois, no 9, p. 89-90, ordonnance datée des Tuileries, le 24 juillet 1815.
54 Le 27 juillet 1815. A.N., F7 6678, notices sur les individus compris dans l’ordonnance du 24 juillet [1815].
55 Voir A.N., F7 6682 ; voir aussi notre thèse, op. cit., tome I, p. 307-308.
56 Duvivier Paul, op. cit., p. 140.
57 Merlin lui aurait facilité l’obtention de fructueux marchés publics. Voir A.N., F7 6678, document s.d. (probablement octobre 1815), intitulé « Merlain de Douai » ; voir aussi Duvivier Paul, op. cit., p. 33.
58 A.G.Royaume des Pays-Bas, La Haye, papiers Van Maanen, lettre de Merlin à Van Maanen, datée de Bruxelles, le 27 septembre 1815 ; document reproduit in extenso dans Duvivier Paul, op. cit., p. 23-24.
59 Duvivier Paul, op. cit., p. 40-41.
60 A.N., F7 6678, dos. 1, Bulletin des lois, no 58, p. 18-19, texte no 349, loi du 12 janvier 1816 ; et Bulletin des lois, no 59, p. 21, texte no 354, ordonnance du roi du 17 janvier 1816.
61 Sieyès arriva à Bruxelles le 21 janvier 1816, Cambacérès le 7 février. Voir Duvivier Paul, op. cit., p. 44.
62 Ibid., p. 43.
63 Ibid., p. 45-46.
64 Le Journal de la Belgique, no 63 du 3 mars 1816 ; cité dans Duvivier Paul, op. cit., p. 46-47.
65 La minute de ce document, datée de Lille, le 25 mai 1816, est conservée aux A.D.Nord, M 135/79, dossier Merlin de Douai. On peut également consulter la lettre adressée au ministre aux A.N., F7 6682.
66 Vandepitte Charles, op. cit., p. 57.
67 Gruffy Louis, op. cit., p. 102.
68 A.N., F7 6682, pièce sans date.
69 La répartie s’adressait à La Tour du Pin, alors ambassadeur, qui aurait insisté pour obtenir le départ de Merlin vers l’Amérique. L’anecdote est rapportée par Baudot Marc-Antoine, op. cit., p. 303.
70 Sur son séjour à Haarlem, voir notre thèse, op. cit., tome I, p. 311-312..
71 B.M.Douai, ms. 1710, La. de Merlin à Courtin, datée du 25 octobre 1818.
72 Ibid., l.a. de Merlin à Courtin, datée du 3 août 1818.
73 A.N., F7 6678, dos. 7, rapport au roi, du 12 mai 1819. A cette date, onze des trente-huit personnes touchées par l’article 2 de l’ordonnance du 24 juillet 1815 avaient obtenu le droit de rentrer au pays.
74 A.N., F7 6678, dos. 1., Bulletin des lois, no 342, p. 65, texte no 8157 daté du 1er décembre 1819.
75 Duvivier Paul, op. cit., p. 61-62.
76 Voir Sergio Luzzatto (Il Terrore ricordato, Memoria e tradigime dell’esperienza rivoluzionaria, Genova, Cota Editrice Marietti, 1988 ; trad. franç., Mémoire de la Terreur, Lyon, P.U.L., 1991, p. 14), à qui nous empruntons cette expression.
77 Voir Duvivier Paul, op. cit., p. 63-76.
78 La description est faite d’après l’affiche de mise en vente publique de cette maison, extraite du Journal de la Belgique, no 157, du 6 juin 1833. Document cité dans Duvivier Paul, op. cit., p. 122.
79 Paris, Danel, Porthmann et Rondonneau, an ΧΙ-an ΧIII, 9 vol. in-4°.
80 Paris, Gamery, 1810, 5 vol. in-4°.
81 Paris, Bertin et Danel, 1807-1808, 13 vol. in-4°.
82 Dupin aîné parle de « bons articles » de Tarrible, un ancien membre du Tribunat, et de Henrion de Pansey (Profession d'avocat, Paris, Alex-Gobelet et B. Warée, 1832, tome II, p. 479) ; collabora également au Répertoire : Lagarde, ancien préfet de la Seine-et-Mame (voir 5e éd., Paris, tome ΧII, 1827, article « Préfet », p. 657-660).
83 Paris, Gamery, 1812-1816, 14 vol. in-4°.
84 A la date retenue, qui est celle avancée par Mignet, Paul Duvivier (op.. cit., p. 84-85) préférait l’année 1822 ; il fondait sa démonstration sur une lettre de Delcambe. Une lettre de Merlin à Farez, datée du 31 mai 1823, semble cependant le contredire ; voir B.M.Douai, ms. 1710, l.a.s. de Merlin à Farez, avocat à Cambrai, datée de Bruxelles, le 21 mai 1823.
85 Lettre de Merlin au baron J.F. de Mey de Streefkerk, datée du 14 novembre 1828. Citée dans Duvivier Paul, op. cit., p. 98.
86 La cinquième édition du Répertoire eut simultanément lieu à Paris et à Bruxelles : Paris, Gamery, Dondey-Dupré et J.-P. Roret, 1827-1828, 18 vol. in-4° ; Bruxelles, H. Tarlier, 1825-1828, 36 vol. in-8°. Voir notre thèse, op. cit. tome I p. 318-319.
87 Troisième édition, Paris, Gamery, 1819-1827, 6 vol. in-4°. La quatrième édition fut publiée à la fois à Paris et à Bruxelles : Paris, Gamery-Remoissenet, 1827-1830, 8 vol. in-4° ; Bruxelles, H. Tarlier, 1828-1830, 16 vol. in-8°. Voir notre thèse, op. cit., tome I, p. 318-319.
88 Courtin E.M.P.M.A., Encyclopédie moderne, ou dictionnaire abrégé des sciences, des lettres et des arts, Paris, Bureau de l’Encyclopédie, 1824-1832, 26 vol. in-8° ; les trois premiers volumes de cette collection ont également paru chez Mongie aîné, en 1823 et 1824. Voir notre thèse, op. cit., tome I, p. 317.
89 Duvivier Paul, op. cit., p. 77.
90 Ibid., p. 147-158.
91 Ainsi, Baudot rapporte qu’un procureur du roi de la ville d’Apt s’éleva contre un avocat qui avait cité l’autorité de Merlin dans un plaidoyer. Cité dans Duvivier Paul, op. cit., p. 79.
92 Roussel, Annotations sur chaque article des cinq codes, de toutes les questions de droit traitées dans le nouveau Répertoire et les 15e, 16e et 17e volumes de supplément, Paris et Lille, 1826.
93 Rondonneau L., Table générale des matières contenues dans le Répertoire de jurisprudence et dans le Recueil des questions de droit, Paris, Gamery et J.-P. Roret, 1828, p. 7.
94 Les héritiers Leblond et Remoissenet, contre M. Michel, président du Tribunal de Commerce, imp. Félix Locquin et Cie, s.d. [1838], p. 14 (B.N., 8° FM 1756).
95 Dizionario universale ; ossia, Repertorio ragionato di giurisprudenza e questioni di diritto di Merlin... versione italiana di una società di avvocati sotto la direzione dell’avvocato Filippo Carillo. 1 ed. veneta, riscontrata sul testo ed arrichita di una giunta relativa a cangiamenti apportati dalle leggi civili e penali attualmente in vigore presso tutti i regni e stati italiani..., Venezia, G. Antonelli, 1834-1842.
96 Dupin aîné, Profession d’avocat, op. cit., tome II, p. 479.
97 Voir Duvivier Paul, op. cit., p. 81.
98 Rondonneau L., op. cit., p. 5.
99 Paulée réceptionnait l’argent en France, puis chargeait Delcambe de le transmettre à Merlin après l’avoir prélevé sur ses recettes. Duvivier Paul op cit p. 57-58.
100 Voir ibid., p. 89-90.
101 Ibid., p. 91-92.
102 Baudot Marc-Antoine, op. cit., p. 18.
103 Luzzatto Sergio, op. cit., p. 123.
104 Voir Duvivier Paul, op. cit., p. 108-111 ; et A.N., F7 6682, extrait d’une note particulière, datée du 29 mai 1827 ; lettre du ministre de l’Intérieur au préfet de police, datée du 1er juin 1827 et lettre du même au préfet du Nord, datée du 1er juin 1827.
105 Baudot Marc-Antoine, op. cit., p. 304.
106 Loi du 11 septembre 1830.
107 Duvivier Paul, op. cit., p. 117.
108 Contrairement à ce qu’affirme Paul Duvivier (op. cit., p. 118), qui se fonde sur le registre de recensement de Bruxelles pour l’année 1829, Merlin quitta sa ville avant le 8 novembre 1830. Ainsi, il chercha à revoir son ami Merlin de Thionville plusieurs jours avant le 6 novembre ; voir B.N., N.A.F. 245, f° 222, l.s. de Merlin à Merlin de Thionville, Paris, 6 novembre 1830.
109 Voir B.N., N.A.F. 245, f° 220, l.s. de Merlin à Merlin de Thionville, datée de Bruxelles, le 7 août 1830 et f° 222, l.s. de Merlin au même, Paris, 6 novembre 1830.
110 Voir notre thèse, op. cit., tome III, p. 980.
111 Voir B.N., N.A.F. 245, f° 220, l.s. de Merlin à Merlin de Thionville, Bmxelles, 7 août 1830.
112 B.M.Douai, ms. 1710, l.s. de Merlin au procureur général [Dupin], datée de Paris, le 21 décembre 1833.
113 Voir A.N., LH 1840/49, l.s. de Merlin à Lebœuf, chef de division à la Grande Chancellerie de la Légion d’honneur, datée de Paris, le 20 octobre 1830.
114 Ibid., compte du règlement des gages de Merlin en tant que grand officier de la Légion d’honneur pour les années 1816-1830.
115 Voir Franqueville comte de, op. cit., tome I, p. 28 ; et A.N., 29 AP 111, pièces 552 et 553 : lettre de Senohen à Rœderer, datée du 15 octobre 1832 et l.s. de Merlin à Rœderer, datée du 23 octobre 1832.
116 Merlin fut nommé membre de l’Académie des sciences morales et politiques par l’ordonnance du 26 octobre 1832. Voir Franqueville comte de, op. cit., tome I, p. 98.
117 Sections de Philosophie, de Morale, de Législation, droit public et jurisprudence, d’Economie politique et statistique, et enfin d’Histoire générale et philosophique. Voir A.Institut, 2 D 1, p. 3, ordonnance du 26 octobre 1832.
118 En 1832, il ne manqua aucune séance, en 1833, il en manqua deux, en 1834 trois, en 1835 neuf, en 1836 deux, en 1837 une. En 1838, ses absences furent plus fréquentes (du 13 janvier au 10 mars, puis du 25 août au 8 septembre). A. Institut, 2 D 1 et 2 D 2.
119 Welvert Eugène, Lendemains révolutionnaires. Les régicides, Paris, Calmann-Lévy, 1907, p. 358.
120 Sur la cérémonie, voir un extrait de la Feuille de Douai, reproduit dans Wagon président, La vie intime à Douai de Philippe Antoine Merlin, communication présentée devant la S.A.S.A. de Douai, le 14 février 1930 (texte dactylographié conservé aux A.M.Douai, 1 ii 68), p. 30-31.,
121 Dupin aîné, « Audience solennelle de rentrée du 4 novembre. Discours de M. le procureur général. Cour de cassation », Gazette des tribunaux, 4 novembre 1839 ; Mathieu Auguste, Eloge historique de Merlin (prononcé à la séance d’ouverture des conférences de l’ordre des avocats le 23 novembre 1839), Paris, imprimerie de Bruneau, 1839 ; Mignet Auguste, « Notice historique sur la vie et les travaux de M. le comte Merlin, par M. Mignet, secrétaire perpétuel, lue à la séance publique du 15 mai 1841 », Paris, Mémoires de l’Institut, tome IV 1844 p. XLI-LXXVI.
122 Baudot Marc-Antoine, op. cit., p. 245-246 et 254.
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