Cendrillon au théâtre : enjeux de la réception enfantine du conte du XVIIIe au XXIe siècle
p. 157-170
Texte intégral
1Conte parmi les plus connus dans le monde, Cendrillon fait l’objet de multiples versions depuis l’époque médiévale1. Il est plus spécifiquement diffusé en France au XVIIIe siècle par le recueil de Perrault2 puis, au XIXe siècle3, par les traductions des frères Grimm. Si Perrault adresse deux « moralités » au public de l’Ancien Régime4, les frères Grimm renouent davantage avec la dimension initiatique du conte populaire par la place accordée au deuil5. Nicole Belmont souligne en effet que toutes les versions narratives de Cendrillon, à travers les époques et les cultures, trouvent leur origine dans la mort de la mère et que la construction de l’héroïne passe par la rupture « des liens fusionnels avec la mère »6. Le parcours initiatique, celui du passage de l’enfance à l’âge adulte, s’accomplit par une mise à l’épreuve que concrétisent la souffrance et la maltraitance.
2Sur le plan de la réception du conte, cette interprétation relève de l’implicite, qu’il s’agisse de l’adaptation française ou de la transcription des Grimm. Or une pièce récente de Joël Pommerat, issue du répertoire de jeunesse, fait émerger explicitement un tel sens. Peut-on pour autant affirmer que le genre théâtral serait le mieux à même de donner à voir « les images mentales »7 que le conte génère collectivement et plus ou moins intuitivement auprès des auditeurs ? L’hypothèse s’appuie d’une part sur les caractéristiques communes entre les deux genres établies par Christelle Bahier-Porte pour le XVIIIe siècle8 et, d’autre part, sur l’idée que le théâtre de jeunesse contemporain facilite la lecture du conte en dévoilant ses rouages9. L’exemple significatif de Cendrillon nous permettra d’approfondir la réflexion sous un angle historique, en analysant comment l’évolution du répertoire, du XVIIIe siècle à nos jours, peut éclairer la réception et la perception du conte par le jeune public10. Bien que ce soit le troisième conte le plus adapté au XVIIIe siècle et qu’il génère plus de trente pièces au siècle suivant11, peu d’entre elles sont destinées aux enfants12 et l’importance des genres spectaculaires pourrait nous laisser penser que l’émerveillement domine, que seule la magie est exploitée.
3Aussi nous demanderons-nous dans quelle mesure, du XVIIIe au XXIe siècle, le traitement théâtral favoriserait le décodage du conte merveilleux, au-delà du sens littéral propice au divertissement spectaculaire, auprès du public enfantin. Pour ce faire, nous ciblerons les divers enjeux que poursuivent ces pièces au fil du temps selon une démarche diachronique.
1. La théâtralisation du conte du XVIIIe au XXe siècle : une leçon d’éducation ?
1.1. La dimension morale : une spécificité du répertoire enfantin
4Les six réécritures de Cendrillon, recensées entre 1730 et 178513, relèvent de genres mineurs et se déroulent sur de petits théâtres, la Foire accueillant la moitié des représentations. Parmi les pièces retrouvées, les opéras-comiques de Marignier14 et d’Anseaume15, respectivement joués en 1730 et 1759 à la Foire Saint-Germain, mettent l’accent sur la tonalité grivoise qu’autorise le conte de Perrault à travers l’érotisme de la chaussure. La galanterie, évoquée par la première moralité de Perrault, donne lieu à un détournement et à un déplacement du comique – les métamorphoses improbables invitaient déjà le lecteur du conte à sourire – sur des scènes qui maintiennent la magie à distance. À l’inverse, La Pantoufle, dont nous avons mis au jour deux versions, est une pantomime à grand spectacle, jouée en 1779, au Théâtre des élèves de l’Opéra alors dirigé par Parisau16. Elle reprend au premier degré l’intégralité du conte sous la forme d’un divertissement mimé et dansé à grand renfort de machines : la fée descend par deux fois dans une gloire et des génies sortent de terre. Le conte devient un canevas propice à l’émerveillement et fournit aux jeunes danseurs l’occasion d’exercer leur talent avant d’entrer à l’Opéra17. Les pièces destinées aux adultes s’appuient donc sur le caractère divertissant du conte tant par les allusions grivoises que par l’enchantement scénique. C’est cette dernière perspective qu’aurait pu retenir la seule pièce enfantine du XVIIIe siècle : une féerie18 en prose de Maillé de Marencourt, jouée avec des marionnettes19 en 1785 sur le Théâtre des Ombres Chinoises de Séraphin, lui-même auteur de spectacles pour les enfants de la maison royale20. Mais les pièces de Séraphin donnent lieu, au début du XIXe siècle, à des dialogues moraux entre une mère et ses enfants visant le « plaisir » de la lecture et « l’instruction »21.
5Cette dimension pédagogique et morale est omniprésente jusqu’au début du XXe siècle dans le répertoire enfantin. Par ailleurs, nombre de ces pièces sont jouées par les enfants eux-mêmes au sein des familles ou des pensionnats avec des moyens scéniques limités. En cela, elles se distinguent de l’ensemble du répertoire du XIXe siècle qui évolue vers le grand spectacle au fil des progrès de la scénographie, mettant l’accent sur la magie du conte dans les féeries dramatiques, de manière plus ou moins parodique22.
6Les pièces enfantines peuvent en effet éluder considérablement les artifices de la magie au profit d’une leçon actualisée, adaptée aux conditions de vie du jeune public visé, sous un angle pragmatique. Tel est le cas de Cendrillon ou les Étrennes. De la modestie à la beauté23, pièce de 1813, qui utilise le conte comme un prétexte aux leçons de morale. Chaque tableau, pris en charge par la pantomime des personnages, est accompagné d’un vaudeville qu’interprète un récitant. Il s’achève systématiquement par une moralité vantant les qualités de la vertueuse Cendrillon contre la vanité de ses sœurs. Un tableau intitulé « Le choix à faire ou Le prince et son précepteur » rappelle même les principes d’un bon mariage :
Que doit chercher un jeune époux
Dans une jeune et belle épouse ?
Bon cœur, esprit facile et doux,
Humeur égale et point jalouse.
Dans le cher monde où nous vivons
Ces qualités sont assez rares :
On trouve bien des Cendrillons,
Mais sottes, vaines ou bizarres.24
Par cette antonomase, Cendrillon apparaît davantage comme une référence culturelle. Il en est de même dans un drame pour jeunes filles de 1868 qui dispense une morale chrétienne rendant un hommage final au sacrifice de Jésus25. Toute la pièce défend les bienfaits d’une éducation vertueuse pour les demoiselles pauvres : la courageuse Claire sauve ainsi ses deux sœurs superficielles en se plaçant au service de la sage et honnête Madame Langlois, figure idéalisée de l’éducatrice qui devient métaphoriquement la bonne fée des trois orphelines.
7Ces pièces exploitent donc le conte de Perrault comme une œuvre littéraire qui invite le lecteur à dépasser le sens littéral pour aboutir à une réflexion sur les valeurs personnelles et sur sa place dans la société. Elles ont tendance à désenchanter le conte pour en expliciter le message d’ordre social que les jeunes gens doivent respecter au quotidien.
1.2. Les implications du jeu
8Cette explicitation n’est pas absente des féeries avec tableaux ou pièces musicales de la seconde partie du XIXe siècle, mais elle se limite surtout au message final métathéâtral qui dispense une leçon de générosité26, de bonté27, de sagesse filiale28 ou de courage29. La structure littéraire du conte, telle qu’elle apparaît chez Perrault, dissociant la fiction des moralités, trouve son équivalent au théâtre dans l’adresse directe au public. Cette rupture de l’illusion théâtrale permet au jeune public de mieux percevoir le décalage énonciatif du conte et l’engage à réfléchir à partir et au-delà de la fiction. Ces pièces répondent au credo « plaire et instruire » en exploitant les caractéristiques de la version de Perrault : la fée, la métamorphose, la scène de bal et le pardon final. Néanmoins la reprise des éléments magiques s’opère de façon moins littérale qu’il n’y paraît grâce aux procédés de mise en jeu qui renvoient les métamorphoses à la matérialité des décors – tout particulièrement dans le théâtre de marionnettes30 – et des costumes31, bien plus qu’à l’émerveillement.
9Par ailleurs, on y décèle des motifs qui semblent issus de la version des frères Grimm, comme les subterfuges employés par les deux sœurs lors de l’essai du soulier ou encore le lamento de Cendrillon. Si la violence du premier motif, propre au folklore, est édulcorée en vertu de la vraisemblance et de la bienséance32, le traitement du second retient l’attention puisque la version germanique exploite plus nettement la dimension initiatique du deuil. De fait, l’opéra-bouffe de Madame Debierne-Rey s’achève par une morale laïque, chantée par la fée, qui promeut le mérite personnel et le courage nécessaire pour accomplir le chemin de la vie33. Le message insiste sur les épreuves traversées par Cendrillon et leur confère un caractère universel et philosophique. L’insertion de thèmes propres à la version de Grimm, qui commence à se diffuser en France, offrirait donc une lecture renouvelée du conte qui dépasse l’interprétation sociale pour adopter une dimension plus métaphysique.
10Cependant une telle interprétation de l’intertexte de Grimm est encore rare et la douleur de Cendrillon est parfois détournée pour vanter les « charmes du travail »34 que Berthe Vadier associe à une forme de consolation. De manière plus politique en 1906, Maurice Bouchor, qui emprunte à Grimm le motif des oiseaux, créera une pièce républicaine en faveur de la condition ouvrière35. Force est donc de constater que ces pièces dépendent moins de l’hypotexte choisi que du message à produire lors de la mise en scène selon le contexte politique et social. L’esthétique dramatique éclaire donc partiellement et comme de manière accidentelle la nécessité d’une lecture au second degré des motifs merveilleux chez Perrault ou du processus de deuil chez Grimm. En réalité, ces pièces se situent dans la visée pragmatique des pièces d’éducation dont l’intérêt repose essentiellement sur le jeu et la mémorisation, comme le souligne Madame Bellier qui y voit un excellent moyen d’enseignement et d’éducation.
En même temps qu’à bien dire, nos enfants apprennent à se bien tenir, ils se pénètrent des sentiments de l’action à laquelle ils prennent part, et le mot de la fin, la morale qui en découle, se gravent dans leur cœur sans qu’ils en doutent.36
11La plupart des pièces de la seconde moitié du XIXe siècle sont donc conçues pour être jouées par des enfants, selon des indications scéniques précises de répartition des rôles ou de costumes, si bien que la morale est une morale en actes qui se rapproche des principes du théâtre d’éducation tel qu’il est envisagé dès le XVIIIe siècle.
12Mais au XXe siècle, la morale n’occupe plus la même place dans l’économie de la pièce et le divertissement final tend à rappeler par exemple le caractère festif d’une remise de prix en 191337. Progressivement, le divertissement semble dominer et le nombre des réécritures de Cendrillon décliner38. Aucune morale explicite n’est mentionnée dans Les Joujoux du théâtre, recueil de 1906 conçu pour les familles39. Il en va de même de la féerie de Gauthier, créée en 1934 pour les élèves du collège de Saint-Nazaire : elle repose sur le grand spectacle avec musique, danses et projections du fantôme maternel, même s’il s’agit vraisemblablement d’une adaptation christianisée du conte40. C’est la dimension récréative qui l’emporte dans le Théâtre d’ombres du Père Castor en 193641 comme dans la pièce de Maurice Jacquemont, mise en scène en deux jours pour clore une colonie de vacances en 1944. Cendrillon, jeu-féerie d’après le conte de Perrault est présenté comme « un jeu primitif où des enfants figurent les tableaux successifs d’une fable, aidés par un conteur-récitant »42. L’ampleur des indications de mise en scène souligne l’importance du spectacle auquel le conte source sert de prétexte, dans une adaptation libre où interviennent d’autres personnages de contes avant un finale en danses et en chansons, indépendamment du sort des deux sœurs et de toute morale, mais au profit d’un cliché trompeur : « Le mariage fut célébré en grande pompe et ils eurent de nombreux héritiers »43.
13Il faut donc attendre les années 1980 et le théâtre de jeunesse contemporain pour que s’opère le retour au conte source par le détour du genre théâtral.
2. Le conte dramatique dans le théâtre de jeunesse contemporain : décodage du message existentiel
14Les travaux de Christiane Connan-Pintado inventorient une grande partie des réécritures de contes en littérature de jeunesse. Force est de constater que les réécritures narratives sont de loin plus nombreuses que les transpositions théâtrales de Cendrillon, lesquelles relèvent souvent d’une simple mise en dialogues du conte. Aussi retenons-nous trois pièces d’auteurs qui proposent une interprétation singulière du conte source, dans la version de Perrault ou des Grimm : Cendres… Cendrillon de René Pillot, La Fille aux oiseaux de Bruno Castan et Cendrillon de Joël Pommerat. La première s’apparente davantage à une parodie au service de la dénonciation de la lutte des classes, non loin de la version de Maurice Bouchor de 1906. Nous ne développerons pas l’analyse de cette pièce burlesque, à laquelle Pommerat emprunte plusieurs scènes nouvelles, afin de circonscrire l’étude autour des « contes dramatiques »44, autour des procédés littéraires et dramaturgiques qui opèrent le guidage du lecteur spectateur.
2.1. Explicitation de l’implicite
15La pièce de Bruno Castan se réclame des frères Grimm, un choix que l’auteur explique par sa volonté de transmettre ce qui le « touche au plus profond », à savoir « l’abandon », la magie servant seulement à « dénouer l’histoire »45. Cette pièce poétique, qui renoue avec l’oralité des contes par sa musicalité, accroît la place du deuil qui occupe désormais un quart de l’ensemble, soit les 7 premiers tableaux. Le choix des décors permet d’expliciter certains passages du conte, tels que l’épisode du noisetier. Chez les Grimm, le père rapporte à sa fille le premier rameau qui heurte son chapeau sur le chemin du retour46, un noisetier que la jeune fille replante sur la tombe de sa mère. De manière moins neutre chez Bruno Castan, cette branche qui « cingle »47 le chapeau de son père met en lumière la vengeance et la souffrance de la petite orpheline qui se sent abandonnée :
Tu ne reconnaîtrais pas ta maison, maman, les deux pestes sont dans mon lit ; et dans le tien… Elles disent qu’elles sont chez elles, et pas moi… Père m’appelle Cendrillon, et cette branche l’a giflé… Heureusement tu n’es pas là pour voir tout ça, je suis sûre que tu en pleurerais… (Elle pleure). Petite branche, petit fouet, petite vengeance, petit souhait, te voilà bien installée, tu pourras vivre ici et grandir, pour que je n’oublie pas…48
Ce décor de la tombe, qui rythme toute la pièce, insiste visuellement sur le deuil et la solitude de Cendrillon, dont les seuls compagnons sont le noisetier et les oiseaux. En outre, il donne à voir l’assimilation entre la jeune fille et sa mère morte, symbolisée par les cendres, ce qui est le fondement de tous les contes de Cendrillon, comme le rappelle l’analyse onomastique d’Élisabeth Lemirre49.
16C’est également sous l’angle du deuil et de l’abandon que Joël Pommerat interprète la source en dévoilant les sentiments du personnage que le conte n’explicite pas, en posant la question de la construction de soi. La situation est alors transposée dans le contexte actuel d’une famille recomposée. Comme dans le conte des Grimm, la mort de la mère déclenche l’action : Sandra se sent infiniment coupable de ne pas avoir compris sa mère dans ses derniers soupirs50, de pouvoir l’oublier un jour51, de continuer à vivre sans elle52. C’est pourquoi elle met tout en œuvre pour se punir. C’est elle qui suggère à sa belle-mère d’accomplir les tâches ménagères les plus dégradantes et qui se résout à dormir dans la cave malgré sa terreur53. La culpabilité liée au deuil offre donc une nouvelle explication, autre que celle de la cruauté de la marâtre, à la résignation initiale de Cendrillon, caractéristique de la version de Perrault comme de celle des Grimm. L’histoire de Cendrillon, relue par Pommerat, est celle d’une enfant qui n’accepte pas la mort de sa mère, qui refuse de dépasser la douleur du deuil, craignant de trahir la défunte. La rencontre avec le prince transforme sa vie mais, à l’inverse du conte, la métamorphose s’opère sans magie ni mariage. Sandra connaît la résilience en prenant du recul par rapport à sa propre situation, en révélant la vérité à son double, ce jeune prince à qui l’on dissimule le décès de sa mère. Elle livre ainsi son parcours intérieur :
Parce que c’est la vérité, ma mère est morte et tu sais moi aussi faut que j’arrête je crois de me raconter des histoires, me raconter qu’elle va peut-être revenir un jour ma mère, si je pense à elle continuellement par exemple non ! Elle est morte et c’est comme ça ! Elle va pas revenir ma mère ! Et elle est morte ! Comme la tienne ! Et rien ne pourra y changer ? Non rien.54
Le message dispensé par Joël Pommerat est donc un message d’espoir, un message philosophique, sous-jacent chez Perrault ou chez Grimm, sur le sens de la vie, sur la responsabilité de ses choix, sur la façon de surmonter les malheurs. Il paraît d’autant plus percutant qu’au théâtre, la magie est inopérante et/ou démystifiée par le mélange des tons.
2.2. Les procédés de distanciation
17Chez Bruno Castan, les oiseaux mettent à distance toute forme d’émerveillement par une verve dissonante qui s’appuie sur les ruptures de registre, les paronomases dysharmonieuses ou les jeux verbaux. Le sourire dédramatise le pathos de la situation de deuil, d’abandon et de maltraitance de Cendrillon55. Par ailleurs, les oiseaux dépassent leur fonction d’adjuvants magiques pour adopter parfois le rôle du chœur antique qui observe et commente les actions, jouant sur les effets de métathéâtralité56. Ces procédés contribuent à rompre l’illusion théâtrale au même titre que le récit cadre mis en place, chez Pommerat, par la voix de la narratrice, sans doute le fantôme de la jeune Cendrillon, qui présente toute la pièce comme une mise en abyme. De même, la mise en scène des métamorphoses burlesques de la fée apparaît comme un spectacle dans le spectacle au cours duquel la très jeune fille doit entrer dans une boîte magique57. Le personnage archétypal est certes tourné en dérision mais le rire n’est pas gratuit. L’impuissance de la fée, assimilée avec humour à une psychanalyste58, signifie que la solution aux malheurs et à la souffrance ne saurait venir de l’extérieur comme par magie.
18Mais toute la finesse de l’écriture de Pommerat réside dans le fait que le comique, qui évite de sombrer dans le pathos, n’épargne pas la petite orpheline elle-même, en proie à l’incompréhension de ses deux belles-sœurs, deux adolescentes superficielles, plus paresseuses que fondamentalement méchantes. Or ce sont leurs réactions interloquées face à l’étrangeté de Sandra qui permettent d’articuler subtilement les procédés comiques aux manifestations de désespoir. Le comique, lié au décalage des points de vue, met à distance la douleur de Sandra qui use des moyens apparemment les plus loufoques pour se souvenir de sa mère : faire sonner sa montre toutes les cinq minutes ou dormir avec une poupée géante. Le lecteur spectateur est invité à ne pas s’identifier complètement au personnage de Sandra, à ne pas se laisser submerger par l’émotion, mais à garder suffisamment de hauteur pour décrypter le message.
19Certes le théâtre de Pommerat fonctionne sur le principe de mimesis par la construction d’un personnage contemporain dont les enfants peuvent se sentir proches. De plus, la transmission directe de la parole, propre au genre dramatique, projette le personnage sur la scène imaginaire du lecteur. Mais si la pièce de Pommerat est aussi percutante, c’est parce qu’elle s’appuie sur de constants allers-retours entre distance et émotion. Elle repose sur un personnage conçu comme un « support affectif »59, pour reprendre l’expression de Jean-Pierre Ryngaert et de Julie Sermon qui font émerger l’idée de « figure ». La figure énonce une parole qui dépasse l’incarnation du personnage. Elle acquiert plus précisément dans le cadre de cette pièce la portée universelle des contes. En dispensant un message existentiel sur la mort, sur l’amour, sur le sens que chacun donne à sa vie, sur la responsabilité de ses choix, le personnage de Joël Pommerat oscille entre l’abstraction symbolique du conte et les sentiments humains qui lui donnent chair. Le lecteur-spectateur occupe alors une place singulière qui ne relève ni de la stricte identification, ni de la quête du sens par l’analyse purement littéraire. Il se situe dans un entre-deux à partir duquel il participe à la construction de la polysémie du conte dont il perçoit la dimension philosophique, voire métaphysique60.
20En somme, cette dimension métaphysique, pourtant présente chez Perrault, n’est exploitée que depuis peu dans le théâtre jeune public. À l’instar de Perrault qui invite le lecteur à dépasser la fiction, les pièces enfantines des XVIIIe et XIXe siècles, contrairement au répertoire pour adultes enclin au divertissement ludique et scénique, visent à décoder le conte pour en extraire une leçon de morale, souvent adressée aux demoiselles pour les mettre en garde contre la paresse ou la coquetterie. L’hypotexte des Grimm ne parvient que très marginalement à restaurer un sens initiatique.
21Le conte fournit alors un prétexte plaisant à la mise en jeu qui dispense une morale en actes, conformément aux principes du théâtre d’éducation. Mais si le conte n’est pas considéré seulement comme une fiction merveilleuse, c’est moins en vertu de sa dimension philosophique et universelle qu’en fonction de la conception pédagogique que s’en font les éducateurs jusqu’à la fin du XIXe siècle. Lorsque l’enseignement évolue au XXe siècle, le conte, toujours considéré comme un genre destiné aux enfants, devient un prétexte à un divertissement plus récréatif. L’équilibre entre conte et théâtre est donc respecté dans les pièces contemporaines de jeunesse parce que ce théâtre est un théâtre d’auteur, et non d’éducateur, qui repose sur une interprétation personnelle du texte source et qui ménage au destinataire une posture singulière de lecteur-spectateur par laquelle la proximité émotionnelle invite à une réflexion critique et métaphysique permettant la construction de soi. Mieux qu’un long débat interprétatif, le théâtre donne à voir et à sentir ce que l’enfant ne peut pas toujours formuler à partir du conte narratif. Ce théâtre de jeunesse exploite et matérialise, sur la scène réelle du théâtre ou sur la scène imaginaire du lecteur, les blancs du conte ; ce qui en fait un « théâtre de formation » selon l’expression de Marie Bernanoce61.
22Si le conte « continue de s’élaborer dans la transmission », s’il est fondé sur « la communicabilité des images et des mises en scène »62, le conte dramatique en est indéniablement un vecteur adéquat63. De fait, le conte dramatique réconcilie la version littéraire du conte, historiquement datée, et sa version orale ancestrale dans une pièce contemporaine au message universel, susceptible de toucher l’ensemble du public. La réédition de la pièce de Joël Pommerat, qui n’est plus dédiée au jeune public, ne serait-elle d’ailleurs pas le signe qu’une hybridation réussie entre les genres impliquerait de dépasser la réception enfantine ?
Notes de bas de page
1 Selon Nicole Belmont, la première version complète recensée est une version chinoise du IXe siècle mais le « récit structuré, déjà nomade » serait né au Moyen-Orient (Nicole Belmont et Élisabeth Lemirre (éd.), Sous la cendre. Figures de Cendrillon, Paris, José Corti, 2007, p. 11).
2 Charles Perrault, Cendrillon, ou la petite pantoufle de verre, dans Histoires, ou Contes du temps passé, avec des moralités, Paris, Barbin, 1697, p. 117-148.
3 De nombreuses traductions circulent en France dès 1824 même si la première édition officielle en français date de 1869 (Christiane Connan-Pintado et Catherine Tauveron, Fortune des Contes des Grimm en France. Formes et enjeux des rééditions, reformulations, réécritures dans la littérature de jeunesse, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2013, p. 23-44 et p. 372-373).
4 Le conte de Perrault débute lors des secondes noces du père de Cendrillon. L’orpheline se soumet aux brimades de sa belle-mère jusqu’au jour du bal, auquel elle se rend avec l’aide de sa marraine la fée et de ses métamorphoses burlesques. Devenue princesse grâce à l’épisode de la pantoufle de verre, elle accorde son pardon à ses deux belles-sœurs, qui contractent un noble mariage. S’ensuivent deux moralités versifiées qui jouent sur le double sens de « bonne grâce » : l’une oppose la beauté des apparences à la bonté ; l’autre évoque les soutiens nécessaires pour asseoir sa place dans la société d’Ancien Régime.
5 Les Grimm font commencer le conte au moment où la mère mourante laisse un message de piété à sa fille, sur qui elle promet de veiller. Cendrillon trouve ainsi du réconfort à ses souffrances, toujours liées à la jalousie de la marâtre, en allant pleurer et prier sur la tombe de sa mère. Les oiseaux qui s’y trouvent et l’arbre, qui croît sous l’effet des larmes, sont autant d’adjuvants magiques pour se rendre au bal. Comme chez Perrault, Cendrillon est reconnue par le prince grâce au soulier mais seulement après les tentatives d’imposture de ses belles-sœurs qui se coupent l’orteil ou le talon. Les usurpatrices, attaquées par des oiseaux le jour des noces, sont punies de cécité.
6 Nicole Belmont, « Cendrillon : une affaire de femmes ? », Sous la cendre. Figures de Cendrillon, op. cit., p. 377 et 379.
7 Nicole Belmont, Poétique du conte. Essai sur le conte de tradition orale, Paris, Gallimard, 1999, p. 230.
8 Christelle Bahier-Porte, « Le conte à la scène. Enquête sur une rencontre (XVIIe-XVIIIe siècles) », Féeries, Études sur le conte merveilleux, XVIIe-XIXe siècles, n° 4, 2007, p. 11-34.
9 Béatrice Ferrier, « Le conte au théâtre : un genre remotivé », Synergies France, Théâtre et langue(s) : interactions, créations, perspectives, n° 8, 2011, p. 23-29.
10 Le corpus principal est constitué des pièces enfantines suivantes : Maillé de Marencourt, Cendrillon, 1785 ; Cendrillon ou les Étrennes. De la modestie à la beauté, Paris, Marcilly, [1813] ; [Rolland, avoué], Cendrillon, pièce féerie en 3 actes et 5 tableaux, Petit théâtre de marionnettes d’un père de famille pour ses enfants, Douai, Adam d’Aubers, 1854, p. 1-24 ; Cendrillon, drame en trois actes pour jeunes filles par l’auteur de Bataille au coin du feu, Paris, Paul Leloup libraire-éditeur, 1868 ; Madame Truc, Cendrillon ou la vertu récompensée, comédie en deux actes avec chant, Limoges, Barbou frères, 1872 [1870] ; Berthe Vadier, Cendrillon, féerie enfantine en trois tableaux, Théâtre de famille, Paris, Sandoz et Fischbacher, 1876, p. 1-72 ; L. Debierne-Rey, Cendrillon, opéra bouffe sur les premiers airs de l’enfance, à l’usage des Communautés, des Pensions, des Familles, des Écoles des plus petits hameaux, Auteuil-Paris, 1886 ; Marie Bellier, La Pantoufle de Cendrillon, saynète-opérette en quatre actes, Théâtre du jeune âge, Paris, Paul Ollendorf éditeur, 1898 [1897], vol. 3, p. 333-374 ; Maurice Bouchor, Cendrillon. Féerie en quatre actes, Théâtre pour les jeunes filles, Paris, Armand Colin, 1906, p. 203-293 ; Clovis Hugues, Cendrillon, Les Joujoux du théâtre, Paris, Delagrave, 1906, p. 13-65 ; Sancho del Castillo, Cendrillon. Petite féerie en trois tableaux pour enfants, Namur, Auguste Godenne, 1913 ; Donatien Gauthier, Cendrillon. Féerie en trois actes avec danses, chants et projections, Saint-Nazaire, chez l’auteur, 1934 ; Kate Wolff, Cendrillon ou la pantoufle de vair, Théâtre d’ombres du Père Castor, Paris, Flammarion, 1936 ; Maurice Jacquemont, Cendrillon, jeu-féerie d’après le conte de Perrault, Paris, Les éditions françaises nouvelles, 1943 ; René Pillot, Cendres… Cendrillon, Lille, Éditions La Fontaine, 1993 [création : 1984] ; Bruno Castan, La Fille aux oiseaux, Montreuil-sous-Bois, Éditions théâtrales, 2011 ; Joël Pommerat, Cendrillon, Arles, Actes Sud, 2012.
11 Martial Poirson, « Introduction », Perrault en scène. Transpositions théâtrales des contes merveilleux 1697-1800, Saint-Gély-du-Fesc, Éditions Espaces 34, 2009, p. 28.
12 Comme le fait remarquer Marie-Emmanuelle Plagnol-Diéval, le théâtre d’éducation du XVIIIe siècle offre peu de place au merveilleux (« Théâtres privés et contes de fées dans la seconde moitié du XVIIIe siècle », Féeries, n° 4, 2007, p. 51-70). Les pièces du corpus ont été sélectionnées en fonction de leur destinataire enfantin à partir des critères suivants : le nom de l’auteur, la préface, la scène visée, la maison d’édition et/ ou le titre du recueil.
13 Nous nous fondons sur le répertoire établi par Martial Poirson, Perrault en scène, op. cit., p. 311-315.
14 Isabelle Degauque, « Des contes des mille et une nuits à la pantoufle de Marignier (1730) », Féeries, n° 4, 2007, p. 117-130.
15 Jeanne-Marie Hostiou, Judith le Blanc et Jean-Charles Léon, « Notice » de l’édition critique de Cendrillon de Louis Anseaume, Perrault en scène, op. cit., p. 71-89.
16 Attribuée à Parisau, elle aurait été jouée, en 3 actes, le 13 septembre 1779. En réalité, nous avons retrouvé la partition inédite de cette pantomime qui aurait été préalablement représentée sur ce même théâtre, en deux actes, le 17 mai 1779 (BnF musique : Vm6- 132), sous le titre suivant : La Pantoufle, ballet pantomime en deux actes exécuté au théâtre des élèves de l’Opéra à Paris, le 17 mai 1779. Musique de M. Rochefort de l’académie royale de musique et directeur de la musique des élèves. Nous avons également retrouvé cette même pièce dans une version imprimée en 1781, en trois actes, sans nom d’auteur, sous un autre titre : [Le Gambu], Programme de Cendrillon ou La Pantoufle. Ballet-Pantomime en trois actes, Paris, 1781. De nouveaux passages spectaculaires ont été ajoutés comme le finale où la fée, descendue « dans son char » (III, 11, p. 8), « transporte les époux dans le temple de l’Hymen, qui allume son flambeau à celui de l’amour » (III, 12, p. 8) avant la fête générale des noces.
17 Philippe Chauveau, Les Théâtres parisiens disparus 1402-1986, Paris, Éditions de l’Amandier, 1999, p. 534.
18 La féerie n’est autre, au XVIIIe, que la mise en scène de contes merveilleux, un divertissement largement hérité des pratiques de la cour et des théâtres de société (Roxane Martin, La Féerie romantique sur les scènes parisiennes 1791-1864, Paris, Champion, 2007, p. 13-15).
19 Le texte demeure introuvable mais la pièce est recensée parmi les pièces de marionnettes jouées chez Séraphin et écrites par Maillé de Marencourt (Feu le théâtre de Séraphin depuis son origine jusqu’à sa disparition. 1776-1870, Paris, Rouquette, 1872, p. 27).
20 Ibid., p. 7. Le théâtre de Séraphin devient officiellement « Spectacle des enfants de France » le 22 avril 1781, précise Arthur Pougin (« Un théâtre enfantin. Les ombres chinoises de Séraphin », Revue universelle illustrée, 3e année, Paris, Librairie de l’art, 1890, t. I, p. 11-22). C’est en 1784 que l’entrepreneur ouvre son théâtre au Palais-Royal : « On y jouait de petites pièces enfantines parfois fort gentilles et d’une moralité irréprochable, de telle sorte qu’il convenait parfaitement aux enfants, aux jeunes filles, et même (ce que ne manquaient pas de faire remarquer ni les affiches, ni l’“aboyeur” placé à la porte) “à messieurs les ecclésiastiques”, qui s’y rendaient volontiers en soutane » (ibid., p. 13).
21 Théâtre de Séraphin, ou des ombres chinoises, historiquement dialogué, commenté, abrégé et moralisé pour les enfants, Paris, Desmarest, 1809, t. I, p. VI.
22 Noémie Courtès, « Cendrillon mise en pièces ou la seconde immortalité de Perrault au XIXe siècle », Féeries, n° 4, 2007, p. 73-88. Voir aussi Pierre Vidal, « Cendrillon sur les scènes parisiennes », dans Olivier Piffault (dir.), Il était une fois… les contes de fées, Paris, Seuil, BnF, 2001, p. 263-269.
23 Un subterfuge (le travestissement de l’écuyer en prince) permet de découvrir le bon cœur de Cendrillon que le précepteur choisit pour son élève princier. En l’absence de fée et de métamorphose, une rose fait office d’objet magique sublimant la beauté et l’esprit de la jeune orpheline sans altérer sa bonté, « heureux don de la nature », ni sa simplicité (Cendrillon ou les Étrennes. De la modestie à la beauté, op. cit., p. 17).
24 Ibid., tableau 2, p. 5. Ce principe pédagogique rappelle celui des cantiques spirituels du début du XVIIIe siècle.
25 Cendrillon, drame en trois actes pour jeunes filles, op. cit., III, 5, p. 35.
26 Berthe Vadier, Cendrillon, féerie enfantine en trois tableaux, op. cit., III, 5, p. 71-72.
27 Marie Bellier, La Pantoufle de Cendrillon, saynète-opérette en quatre actes, op. cit., IV, 2, p. 374.
28 Cendrillon, pièce féerie en 3 actes et 5 tableaux, op. cit. Madame Truc, Cendrillon ou la vertu récompensée, comédie en deux actes avec chant, op. cit., II, 18, p. 112.
29 L. Debierne-Rey, Cendrillon, opéra bouffe sur les premiers airs de l’enfance, op. cit., III, p. 24. Il existe aussi la partition d’une opérette bouffe de Legouix, parue en 1885 au Magasin des demoiselles.
30 Cendrillon, pièce féerie en 3 actes et 5 tableaux, op. cit., I, 5, p. 11 : « Cendrillon : Merci, bonne fée ; mais un obstacle se présente encore devant moi. Comment sortir de cette chambre avec cette voiture ? Les portes sont trop petites. / La fée : J’ai tout prévu ; le fond de cette cuisine va disparaître, et tu te trouveras ainsi en rase campagne. J’en serai quitte pour le reconstruire après d’un coup de baguette. Regarde… Le fond tombe ».
31 L. Debierne-Rey, Cendrillon, opéra bouffe sur les premiers airs de l’enfance, op. cit., p. 4 : « Cendrillon est habillée pour le bal et elle a par-dessus, une blouse grise, qui est retenue sur les épaules par un bouton ; au moment du bal on détache le bouton, et la blouse, à laquelle on attache une petite quille, est ainsi enlevée ».
32 L’une des sœurs a recours à l’eau glacée, l’autre veut couper un cor dans la pièce de marionnettes de 1854.
33 L. Debierne-Rey, Cendrillon, opéra bouffe sur les premiers airs de l’enfance, op. cit., III, p. 24 : « L’existence est un voyage, / Où tout n’est pas le bonheur. / Il faut avoir du courage, / De la patience et du cœur. / Avec cela, / Un jour viendra / Où l’on aura / Ce qu’on voudra. / Et l’on dira en soi-même : / C’est moi qui ai fait cela ».
34 Berthe Vadier, Cendrillon, féerie enfantine en trois tableaux, op. cit., I, 3, p. 16.
35 La pièce, qui est contextualisée dans la période révolutionnaire en 1789-1790, vise la « glorification du travail » selon l’avertissement de l’auteur. Cette pièce peut s’ouvrir à un public qui dépasse celui des jeunes filles et s’adresser à un « auditoire populaire » (Maurice Bouchor, Cendrillon, féerie en quatre actes, op. cit., p. 205).
36 Théâtre du jeune âge. Répertoire de Mme Bellier-Klecker, Paris, Paul Ollendorf éditeur, 1897, p. 63.
37 Sancho del Castillo, Cendrillon. Petite féerie en trois tableaux pour enfants, op. cit., III, 4, p. 42. Cette pièce, représentée pour la première fois à Madrid au Théâtre de la « Princesa » par les élèves du collège français de demoiselles à l’occasion de la distribution des prix du 26 juin 1913, prône certes la « vertu » et la « résignation » (ibid.) par la voix de la fée lorsque le soulier révèle la vraie nature de Cendrillon : la leçon s’adresse à la belle-mère qui a refusé de lui faire l’aumône sous son apparence de mendiante, trahissant ainsi la « dureté de [son] cœur », ainsi qu’aux deux sœurs qui sont bien punies. Toutefois la pièce ne se termine pas par l’adresse traditionnelle et moralisante au public mais par un pardon collectif qui précède le cortège nuptial (ibid., III, 5, p. 44). La superposition de deux hypotextes, Cendrillon et Les Fées avec l’apparition de la fée mendiante, met en évidence les libertés prises à l’égard de l’hypotexte qu’il ne s’agit pas de respecter à la lettre ni d’interpréter selon une réalité sociale.
38 Le répertoire s’essouffle au XXe siècle où fleurissent davantage des réécritures narratives pour la jeunesse.
39 Clovis Hugues, Cendrillon, Les Joujoux du théâtre, op. cit. Cette pièce semble adaptée au cadre familial évoqué dans la préface : l’histoire d’amour est transformée en une scène de reconnaissance entre le Prince et sa jeune sœur Cendrillon enlevée dans son berceau.
40 Le chambellan interprète l’essai réussi de la chaussure comme un miracle (Donatien Gauthier, Cendrillon. Féerie en trois actes avec danses, chants et projections, op. cit., III, 7, p. 61). Le chœur final renvoie également à une vision chrétienne de la « Providence » qui « récompense » la « souffrance », « cette alliance » entre Cendrillon et le Prince étant « la réponse aimable de Dieu » (ibid., III, 8, p. 63). Précisons que la dispute entre la baronne et la fée rythme de manière burlesque cette adaptation qui mêle les tons.
41 Kate Wolff, Cendrillon ou la pantoufle de vair, Théâtre d’ombres du Père Castor, op. cit. La version de Perrault, découpée en 6 tableaux présentés sous forme de canevas avec consignes de jeu, est adaptée en théâtre de papier, avec figurines en carton à découper.
42 Maurice Jacquemont, Cendrillon, jeu-féerie d’après le conte de Perrault, op. cit., p. 3.
43 Ibid., IX, p. 23.
44 Nous reprenons la distinction établie entre « parodie dramatique » et « conte dramatique » (B. Ferrier, « Le conte au théâtre : un genre remotivé », Synergies France, op. cit., p. 26).
45 Bruno Castan, La Fille aux oiseaux, op. cit., p. 93.
46 Les frères Grimm, Cendrillon, Contes pour les enfants et la maison, éd. et trad. par Natacha Rimasson-Ferton, Paris, José Corti, 2009, t. I, p. 140.
47 Bruno Castan, La Fille aux oiseaux, op. cit., 12, p. 42.
48 Ibid., 13, p. 43.
49 Élisabeth Lemirre, « Du côté des hommes », Sous la cendre. Figures de Cendrillon, op. cit., p. 389.
50 Joël Pommerat, Cendrillon, op. cit., I, 2, p. 8.
51 Ibid., I, 2, p. 10.
52 Ibid., I, 13, p. 63.
53 Ibid., I, 6, p. 28.
54 Ibid., II, 12, p. 122.
55 Bruno Castan, La Fille aux oiseaux, op. cit., 3, p. 13.
56 Ibid., 10, p. 39.
57 Joël Pommerat, Cendrillon, op. cit., II, 4, p. 87-89.
58 Ibid., I, 13, p. 71.
59 Jean-Pierre Ryngaert et Julie Sermon, Le Personnage théâtral contemporain : décomposition, recomposition, Montreuil-sous-Bois, Éditions théâtrales, 2006, p. 141-146.
60 Dans la lignée des analyses de Jean-Paul Sermain (Le Conte de fées du classicisme aux Lumières, Paris, Desjonquères, 2005, p. 220) sur le destin, précisons que la version de Perrault est ici interprétable à partir de la grâce divine.
61 Marie Bernanoce, « Les réécritures de contes dans le théâtre contemporain pour les jeunes : un nouveau regard sur les regards sur les relations familiales ? », dans Catherine d’Humières (éd.), D’un conte à l’autre, d’une génération à l’autre, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2008, p. 146.
62 Nicole Belmont, Poétique du conte. Essai sur le conte de tradition orale, op. cit., p. 233.
63 Notons à ce sujet que P. Saintyves fait du drame liturgique profane la forme originelle des contes (Pierre Saintyves, Les Contes de Perrault et les récits parallèles. Leurs origines (coutumes primitives et liturgies populaires), Genève-Paris, Slatkine reprints, 1990 [1923], p. 163-164).
Auteur
MCF Littérature française, Université d’Artois, Textes et Cultures, EA 4028
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