Les chartes de la Tour du Trésor : le chartrier des comtes de Provence jusqu’au début du xive siècle
p. 263-290
Texte intégral
1Ce que l’on nomme le chartrier des comtes de Provence se composee aujourd’hui de liasses de documents en parchemin occupant les cotes B 276 à B 746 de la série 1 B des Archives départementales des Bouches-du-Rhône et couvrant les années 977 à 1667. En tant que tel, et pour se cantonner à sa partie médiévale (les cotes B 276 à B 713, pour un total de 2 000 actes jusqu’en 1500), cet ensemble n’a jamais fait l’objet de la moindre étude globale. Pour les périodes les plus anciennes, il n’est certes pas le fonds le plus riche : le chartrier de l’abbaye Saint-Victor de Marseille ou ceux des Églises d’Arles et de Marseille le supplantent largement. Son apparente unité, ainsi que son appellation héritée du Moyen Âge et toujours employée de « chartes de la Tour du Trésor », cachent des apports divers et des manipulations dont l’essentiel ne doit rien aux temps médiévaux : ce chartrier résulte en dernier lieu de classements effectués à la fin du XVIIe siècle et dans les années 1860. Et les répertoires en sont encore insuffisants, si bien qu’il s’avère fort malaisé désormais de dénouer l’écheveau et de proposer une présentation détaillée du chartrier médiéval. Si bénéficient d’inventaires détaillés tous les documents anciens, jusqu’en 1112, puis les chartes antérieures à l’accession du comte de Provence à la couronne de Sicile, les analyses de celles qui suivent sont obsolètes et remontent au catalogue rapide que dressa l’archiviste Louis Blancard sous le Second Empire1. Seul l’inventaire analytique de son prédécesseur Louis Rostand, en 1820, qui se limite au seul chartrier de la Tour du Trésor en l’état sous la Restauration, constitue un instrument de travail commode2. Je me contenterai ici d’une première approche, portant mon attention principalement sur les temps précédant 1264, descendant accessoirement jusqu’au début du XIVe siècle, lorsque s’élabore l’archivium regium, qu’un archivaire apparaît dans la documentation, et que le chartrier ne constitue plus qu’un élément connexe des archives royales d’Aix.
I – Les « chartes de la Tour du Trésor »
2L’ensemble documentaire connu en Provence sous le nom de « chartes de la Tour du Trésor » est utilisé par les érudits depuis l’aube de l’historiographie locale3. Pourtant, à ma connaissance, on ne s’est interrogé ni sur son mode de constitution et de transmission, ni sur les relations que le fonds ancien entretient avec ce que l’on désigne aujourd’hui sous cette appellation fort trompeuse, empruntée à la période médiévale et qui renvoie à son lieu de conservation, le palais comtal d’Aix4. Au vrai, la critique documentaire, l’analyse codicologique, celle des filigranes des registres papier, ou encore la typologie documentaire, n’en sont encore qu’à leurs débuts. On en sait bien plus sur les fonds anciens de l’abbaye Saint-Victor de Marseille notamment, grâce aux travaux menés sur ses chartes et cartulaires du XIe siècle5. Mais les chartes des comtes de Provence n’ont donné lieu qu’à des travaux partiels, soit sur l’évolution de leur formulaire, les processus de romanisation, soit sur le développement du notariat6. Certes, on connaît mieux les nouvelles institutions qui se développent sous la monarchie angevine et qui ont joué un rôle déterminant dans la tradition et l’organisation de ces documents, la Chambre des comptes et ses services d’archives, depuis les travaux pionniers de Raoul Busquet, archiviste des Bouches-du-Rhône entre 1908 et 19417. Mais, pour ce qui est de la structure générale du chartrier, de son usage politique et idéologique, de ses modes de conservation, tout reste à faire à peu près. Aussi ne proposera-t-on ici que quelques remarques fort générales et peut-être un peu décevantes, tant les instruments de recherche restent encore imparfaits. Il faut toujours recourir au catalogue de Louis Blancard, dont les notices sont aujourd’hui accessibles en ligne sur le site des Archives départementales des Bouches-du-Rhône. Quant à l’inventaire complémentaire charte à charte dressé par l’archiviste Paul Santoni à la fin des années 1990, il n’est pas allé au-delà de 1264, date à laquelle le comte de Provence devient roi de Sicile8. On peut d’autant plus le regretter, que c’est le seul qui ait pris soin de répertorier les marques anciennes de catalogage au dos des chartes, unique moyen d’analyse pour entreprendre un jour la reconstitution du chartrier médiéval. Il doit être complété par l’utilisation du répertoire analytique de Louis Rostand établi en 1820, avant que les chartes de la Tour du Trésor ne soient mêlées à celles de la Chambre des comptes, et qui recourt aux cotes de 1682-1684. Du reste, cette ambition pourrait s’inscrire dans une réflexion plus large, puisque l’archivistique du Mezzogiorno a connu depuis plusieurs décennies un notable développement. Si la question des influences de la gestion documentaire entre Provence et monarchie napolitaine reste largement grevée par la disparition de l’Archivio di Stato di Napoli en 1943, la reconstruction des registres angevins qu’elle a nécessitée nourrit peu à peu la recherche, surtout autour des thématiques liées à l’enregistrement et aux structures administratives centrales, telles la chancellerie9.
II – Les premiers inventaires
3En premier lieu, le chartrier dans sa forme actuelle reflète-t-il un état ancien et renvoie-t-il à la période médiévale ? Ce chartrier a été transmis selon des étapes et des modalités fort imprécises. Ce n’est que bien tardivement, dans les premières décennies du XVIe siècle puis à la fin du XVIIe siècle, que l’on commence à pouvoir suivre sa trace avec précision. Le premier répertoire des chartes conservées dans la Tour du Trésor date de 1524 et remplace un plus ancien travail qui ne nous est pas parvenu10. Le chartrier, qui comporte alors environ 550 actes, est conservé dans une capsa nova, une magna capsa, et une troisième, que l’on situe dans la tour selon les points cardinaux, et dans divers cayssonis et sacs. L’inventaire ne suit pas d’ordre chronologique ni thématique apparent. Chaque pièce fait l’objet d’une analyse avec son millésime, un titre bref est placé dans la marge. Presque toutes sont déjà dotées d’une cote numérique, en chiffres romains (« et signatum de signo LII », au folio 1, par exemple), qui est relevée mais qui ne livre ni l’ordre d’énumération des titres ni celui de leur rassemblement dans chaque contenant. Le travail de récolement de ce premier témoin avec les actes existants n’a pas encore été entrepris. Un deuxième catalogue ne concerne que les registres de la Chambre des comptes, et il date vraisemblablement des années 156011.
4Nul inventaire plus ancien ne permet de connaître la composition et l’organisation éventuelle des chartes médiévales. Voilà une situation fort différente du chartrier capétien, qui dispose de celui de Pierre d’Étampes dès 131812, ou même de certains chartriers seigneuriaux locaux, tel celui des Baux-Orange doté d’un inventaire dès 142713. Nous manquons de jalons documentaires qui autoriseraient une mise en relation avec les processus archivistiques à l’œuvre dans une principauté telle la Savoie, au tournant du XVe siècle14. On en est réduit à collecter quelques indices épars. Une tentative de répertoire et de cotation nouvelle est identifiable à une date jugée « récente » en 1682. Mais le premier inventaire général et systématique qui nous soit parvenu est l’œuvre de l’intendance de Provence en 1682-1684, dans le cadre d’une commission royale qui demeure le seul point de départ de toute analyse historique de la tradition du chartrier.
III – L’inventaire de 1682-1684
5Le 14 mars 1682, Louis XIV commit en effet Thomas Alexandre Morant, alors conseiller, maître des requêtes et intendant de justice, police et finances en Provence (1680-1687), et le chargea d’une triple mission15. D’abord, se rendre à la Cour des aides et finances d’Aix, se faire ouvrir les lieux où sont conservés les archives et titres du roi, en présence du premier président au parlement de Provence et du procureur général, examiner les locaux et dresser un procès-verbal de visite. Puis se faire présenter les inventaires et répertoires par les officiers qui en ont la charge, afin d’effectuer une vérification et récolement à l’aide des actes originaux. Enfin, répertorier titres falsifiés, altérés ou perdus, contraindre à les restituer ceux qui les détiendraient, enquêter et poursuivre les contrevenants avec l’aide des officiers et sergents royaux. La finalité de la procédure était la sauvegarde et la pérennité des droits royaux16. C’est ainsi que le 13 avril 1682, en compagnie de son secrétaire François Mignet, Thomas Alexandre Morant se rendit au bureau des auditeurs et archivaires de la Cour des comptes de Provence et les trouva au travail. Il présenta sa commission à Jean de La Brillanne, ancien administrateur de la cour, et à Philippe de Meyronnes, procureur général, qui désignèrent deux archivaires sur les huit en poste, afin d’assister à la procédure et lui servir de guides : Pierre Bonaud (écrit parfois aussi Bonneau ou Bonau) et Jean Gastaud17. Les deux collègues indiquèrent où se trouvaient les archives royales et soulignèrent qu’un deuxième lieu, la Tour du Trésor, conservait d’anciens titres et parchemins dans de vieux coffres, mais qu’ils n’en connaissaient pas le détail. Le sieur de Meyronnes en détenant une clé, le commissaire l’interrogea sur la Tour du Trésor : il affirma n’y avoir pas pénétré depuis longtemps et en décrivit les quelques vieux coffres qu’elle contenait. La porte du local des archives royales fut ensuite ouverte par le même. En compagnie de Mignet et des deux auditeurs, Meyronnes et Morant y longèrent une voûte souterraine pour gagner une galerie dite « plus longue que large ». S’y trouvaient des armoires et des tablettes de bois portant trois à quatre rangées de registres de papier reliés de parchemin, renfermant des comptes, et de gros sacs de toile suspendus à des râteliers et remplis de papiers. Deux coffres se trouvaient sous la table de travail avec de vieux registres et parchemins sans ordre. S’étant rendus ensuite dans la Tour du Trésor, située dans l’enceinte du palais, les visiteurs trouvèrent trois coffres : une malle avec des titres rangés en liasses et un coffre vide, ainsi qu’un autre, de bois, comprenant des liasses de titres et parchemins. Meyronnes rappela les avoir rangées avec les sieurs Margaillet et Maliverny, ses confrères, sur l’ordre de la Cour des comptes. Mais ils durent interrompre leur travail par manque de temps. Cette première reconnaissance se solda par l’apposition de scellés sur les armoires, les coffres et tous les accès des deux lieux de conservation des archives.
6Le 14 avril suivant, les deux auditeurs et archivaires comparurent devant l’intendant et lui précisèrent que les archives étaient gardées par huit auditeurs et archivaires de la Chambre des comptes, chacun détenteur d’une clé, et que les titres du roi, des communautés et de particuliers y étaient conservés depuis trois ou quatre siècles, en un lieu étroit et obscur, humide et souterrain, et qui plus est sans ordre18. L’ensemble fut évacué avant l’incendie du palais comtal par Charles Quint en 1536, puis lors des trois épidémies de peste qui affectèrent la ville depuis le début du siècle, la dernière remontant à 1649, et ce sans aucune procédure spécifique, dans des coffres encore visibles dans le dépôt, et sous la garde de deux archivaires. En 1600, un nouveau local dit « grande salle » fut affecté aux archives. Il reçut des comptes et des titres extraits de l’ancien dépôt, selon des critères subjectifs de commodité établis par les archivaires. On installa de nouvelles armoires où Magna regestra19, aveux et dénombrements, hommages, titres, registres de clavaires et comptes des receveurs furent placés selon ce qui paraissait le plus utile aux archivaires, mais sans protocole particulier. On nota que les Magna regestra portaient une marque d’identification au dos placée par les archivaires, mais qu’il ne s’agissait nullement d’une cote. Quant aux Parva regestra et titres, ils furent placés dans une autre armoire, selon l’ordre des circonscriptions administratives. Deux répertoires furent dressés20, à partir des tables de chaque Magnum regestrum, ainsi que pour certaines nouvelles pièces (aveux et hommages), mais les Parva regestra ne disposèrent d’aucun catalogue. D’après les deux officiers, aucun récolement ne fut jamais établi. Les archivaires ajoutèrent qu’ils tenaient depuis quelques années des registres spécialisés selon cinq catégories définies ; ils précisèrent également l’organisation de la procédure d’expédition des actes.
7L’inventaire proprement dit débuta le 16 avril, quand l’intendant, son secrétaire, le premier président et les deux auditeurs archivaires entreprirent le récolement des archives21. Ils débutèrent par les « gros registres » (Magna regestra) pour progresser d’armoire en armoire. Ce travail se poursuivit jusqu’au 19 juin suivant22. Le 20 juin, l’intendant mit fin à l’inventaire et le confia à Le Gras avec mission d’achever le récolement nécessaire23. Dès les 11-13 juin 1682, sur son ordre, Thimoléon Le Gras, écuyer, conseiller royal et prévôt de Chaumont, Alexandre Le Gras, écuyer, avocat au parlement de Paris, et Jean-Baptiste Dugrou, notaire et futur directeur du domaine royal en 1697, avec l’aide des auditeurs et archivaires Pierre Bonaud et Jean Gastaud, avaient débuté le récolement des titres et registres en suivant l’ordre adopté par l’intendant dans sa précédente inspection. Ils rangèrent dans la grande salle des archives royales tous les registres désormais cotés et dont les folios furent renumérotés, de même pour les titres regroupés en liasses24. Par exemple, dans l’armoire A, ils placèrent 62 registres, dont 53 Magna regestra classés par ordre chronologique (le premier étant le Pergamenorum), avec un sac de vingt-neuf pièces intitulé Miscellanea. Quant à l’armoire Q, elle fut destinée à rassembler d’autres sortes de documents : les commissaires y disposèrent vingt carrés totalisant 104 liasses de titres et parchemins divers, et inventorièrent toutes les pièces : chaque liasse fut munie d’une lettre (de « a » jusqu’à « zzzz »), chaque titre porta un numéro, et l’ensemble fut rangé de manière méthodique selon la date, les matières et les lieux. Deux liasses cotées « oooo » et « pppp » concernèrent des Miscellanea, respectivement pour les XIIIe-XIVe et pour les XVe-XVIe siècles. Il s’agit là des chartes de la Chambre des comptes, pour l’essentiel sans doute des copies et vidimus des titres de la Tour du Trésor25.
8Cependant, après s’être fait présenter le récolement des titres de l’armoire d’Arles le 9 juillet 1682, Morant s’avisa qu’un répertoire, intitulé « Regestrum seu inventorium novum documentorum turris Thesauri »26, mentionnait des actes placés dans de grandes et petites caisses qui ne furent point trouvées lors de sa visite du dépôt. Les deux auditeurs s’avérèrent incapables de le renseigner, l’un d’entre eux précisant qu’en dix-neuf ans de service, il n’était rentré qu’une seule fois dans la Tour du Trésor. L’intendant ordonna donc que les coffres de cette dernière fussent portés et ouverts devant lui27. Un inventaire spécifique en fut dressé à partir du 10 juillet, consigné dans un recueil à part28. Les chartes furent désormais classées par matière, date et circonscription, en 31 liasses disposées dans neuf carrés, le tout dans une armoire unique. Chaque liasse fut détaillée, et chaque pièce munie d’une cote sous forme de lettres29. Les 29e et 31e liasses concernaient des Miscellanea. Le système de cotation rappelle celui de l’armoire Q, pour les titres de la Chambre des comptes. Enfin, Morant ne prononça la clôture de l’inventaire que le 5 janvier 1684, après avoir interpelé les auditeurs et archivaires sur l’absence de feuillets, de registres, de cotes, et divers autres problèmes30, tandis qu’un procès-verbal de conformité du récolement fut dressé le 15 juin 168431. Les dépositions de janvier 1684 nous apprennent que les chartes de la Tour du Trésor portaient des cotes anciennes « depuis un temps immémorial » et d’autres plus récentes liées à une tentative d’inventaire32.
9Il résulta de la procédure de 1682-1684 plusieurs répertoires33. Du reste, elle ne s’est pas bornée à un simple catalogage, puisqu’elle a aussi provoqué des remaniements d’organisation des registres, par constitution de recueils factices, sur lesquels il n’est pas possible de s’attarder ici, tandis que l’on opéra la cancellation systématique de tous les folios vierges, avec la plupart du temps renumérotation des folios prenant acte des lacunes. Le dernier folio de chaque recueil est ainsi muni d’une formule de corroboration et de la signature autographe des acteurs du récolement de 1682-1684, Dugrou, Bonaud, Gastaud et les deux Le Gras. Quant aux chartes qui nous occupent, le classement proposé en 1682-1684 reste fondé sur la dualité remontant à la période médiévale. Dans l’armoire de la Tour du Trésor, avec ses neuf « quarrés » et ses 31 liasses, se trouvent ainsi rassemblées 813 chartes. La liasse 1 comporte les titres politiques (traités, alliances matrimoniales, diplômes impériaux), la liasse 2 les édits, statuts, bulles pontificales, dont l’acte d’inféodation du royaume de Sicile par Clément IV, ainsi que 49 quittances attestant le paiement du cens au siège apostolique. Puis viennent une série de liasses de titres (3 à 27) réparties selon les circonscriptions administratives (Avignon, Orange, terres adjacentes, Nice, Gênes, Vintimille ; viguerie d’Aix, etc.). La liasse 28 recueille les actes d’hommages, tandis qu’un ensemble final (29 à 31) constitue les Miscellanea. Dans l’armoire Q, placée dans la salle des archives de la Chambre des comptes (dite Cour des comptes depuis le XVIe siècle), les vingt « quarrés » de 106 liasses suivent un ordre plus fonctionnel34. Les liasses 1-19 sont groupées d’abord selon la géographie politique et une chronologie par siècle, soit pour la première liasse (Lombardie, Piémont), « a » : pour le XIIIe siècle ; « b » : pour le XIVe siècle ; « c » : pour les XVe et XVIe siècles ; « d » : copies. Puis de même pour Sicile et Aragon, Orange et Avignon etc. La liasse 20 rassemble les bulles des papes, les liasses 21-25 les titres politiques, les liasses 26-28 les édits et statuts. Puis viennent des liasses suivant la géographie administrative des comtés de Provence et Forcalquier, par ordre alphabétique de circonscription depuis la viguerie d’Aix. Diverses liasses comportent en outre des actes de la Chambre des comptes, ceux du Trésor, ceux concernant la monnaie, les ordres du Temple et de l’Hôpital, les comtes d’Armagnac, une liasse rassemble des titres de la famille de Pons de Rousset, archivaire au début du XVe siècle, et enfin des Miscellanea dénombrent les biens domaniaux, les produits de leur vente, puis huit liasses recueillent les hommages des nobles : la dernière, cotée zzzz comportant les hommages du XVIe siècle. Au XIXe siècle, on y comptait 1777 chartes au total. Les plus récentes remontent aux années 1680. Chaque liasse est munie d’une lettre ensuite dédoublée, triplée et quadruplée (« a », « aa », « aaa », « aaaa », « b », « bb » etc.), suivie d’une cote numérique pour l’acte. Il s’agit donc d’une cotation pièce par pièce combinant un système alphabétique et numérique. Les cotes « oooo » et « pppp » rassemblent toujours la catégorie « divers ». Mais, alors que pour le chartrier de la Tour du Trésor la cotation s’opère au sein de chaque liasse sur chaque pièce (la liasse 2 comporte des pièces marquées de « a » jusqu’à « llll »), pour l’armoire Q la cotation alphabétique s’applique aux seules liasses et non aux pièces (liasse « a », liasse « b », jusqu’à la liasse « zzzz »).
10Ce classement persiste jusqu’aux années 1860. Et ce, malgré plusieurs déménagements des archives : le premier en 1746-1747, quand il fallut procéder à l’évacuation des pièces de la Tour du Trésor et de la Cour des comptes face à l’avancée des Autrichiens35, le deuxième lors des travaux de réfection et de réparation de la Tour du Trésor entre juin 1753 et juin 175636, le troisième en 1775, quand le palais comtal fut rasé et que les archives furent entreposées au couvent des Grands Carmes d’Aix, et enfin le quatrième à l’occasion du transfert des archives à la préfecture des Bouches-du-Rhône à Marseille en 180637.
IV – Les inventaires de Louis Rostand et de Louis Blancard
11Le premier archiviste des Bouches-du-Rhône, Louis Rostand (1812-1828) entreprit alors le tri des titres reçus à Marseille. Il proposa en 1820 un « Inventaire méthodique et raisonné » des seules chartes de la Tour du Trésor en deux tomes, avec un répertoire alphabétique par nom de lieu38. Ce travail est précieux : il est aujourd’hui le point de départ de toute opération de reconstitution du chartrier médiéval. Rostand ne modifia pas la cotation de 1682-1684. C’est son successeur Louis Blancard (1858-1901), qui opéra une refonte totale du chartrier et une recomposition de l’organisation de bon nombre de registres, par dissociation de recueils factices de cahiers et registres constitués à la fin du XVIIe siècle. Il produisit un inventaire en 1865 qui, pour le chartrier, classe par simple ordre chronologique tous les actes rassemblés en nouvelles liasses, entre les cotes B 276 et B 746, en regroupant les 813 chartes de la Tour du Trésor et les 1777 chartes de l’ancienne armoire Q, pour un total de 2600 pièces, avec des titres remontant jusqu’à l’année 1667. Louis Blancard mit un terme à la dualité du chartrier médiéval. Il inventa ainsi un nouveau chartrier dit aussi « de la Tour du Trésor », en regroupant originaux et copies, et en proposa un inventaire par liasses munies chacune d’une cote, tandis que les pièces ne furent pas numérotées individuellement. C’est là un net recul par rapport à la méthode précédente et à celle adoptée plus tard pour les chartriers ecclésiastiques de la série G ou des ordres religieux39. Du reste, les notices de Blancard sont succinctes, les dates parfois erronées, car les styles ne sont pas résolus et les actes vidimés sont classés sans méthode systématique. C’est ainsi que pour la période médiévale on dispose aujourd’hui de 2 000 pièces, entre les cotes B 276 et B 713 : voilà donc ce chartrier tel qu’il nous est parvenu.
V – Analyse du fonds
12L’analyse de la composition de cette masse ne peut s’effectuer pour le moment qu’à partir de son état actuel, d’autant plus que l’on est incapable de repérer les dates d’intégration des actes, tous n’ayant pas forcément rejoint l’ensemble dès leur rédaction. Au Moyen Âge, les chartes dites de la Tour du Trésor étaient les plus anciennes, et leur nombre ne s’est guère accru après l’émergence de la Chambre des comptes et de ses archives à partir de 1297. Si l’on en croit l’inventaire de 1820, les dépôts se sont poursuivis jusque dans les années 1330, devenant par la suite très sporadiques et résiduels. Aussi a-t-on pris le parti de s’en tenir pour le moment aux documents les plus anciens, en sachant que tous ne proviennent pas forcément du chartrier médiéval ainsi dénommé. Sur les 2 000 chartes de la période médiévale, entre 977 et 1500, on n’a donc considéré que les 837 chartes comprises entre 977 et 1299.
13Du reste, dans sa forme présente, le chartrier offre une structure très inégale. Pour ce premier corpus, on ne dénombre ainsi que six chartes antérieures à 1100, entre 977 et 1070 (0,7 % de l’échantillon retenu) ; au XIIe siècle, 99 chartes (11,8 %) ; entre 1201 et 1250, 282 chartes (33,7 %) ; entre 1251 et 1264, 139 chartes (16,6 %) et entre 1265 et 1299, 310 chartes (37,2 %), soit un poids total de 87,5 % pour le seul XIIIe siècle. Si l’on envisage la répartition par règne, jusqu’à celui de Charles d’Anjou († 1285), apparaissent 634 chartes depuis 977. Pour Raymond Bérenger Ier (1112-1131), quatre chartes seulement (0,6 % de l’échantillon), pour Raymond Bérenger II (1131-1162), 18 chartes (2,8 %), pour Raymond Bérenger IV (1166-1181), une seule charte (0,1 %), pour Alphonse Ier (1166-1196), 28 chartes (4,5 %), pour Alphonse II (1196-1209), 119 chartes (18,8 %), pour Raymond Bérenger V (1216-1245), 207 chartes, auxquelles s’adjoignent 18 chartes comprises durant l’interrègne de 1209-1216 (31,8 %), et enfin pour Charles d’Anjou (1246-1285), 286 chartes, plus trois autres dans l’interrègne de 1245 (43 %). Les trois derniers comtes ici retenus rassemblent ainsi 93,6 % du total.
14Au-delà de ce premier dénombrement, qui montre un chartrier encore récent vers 1300, il convient d’entrer dans des considérations plus précises. Qu’en est-il en effet de la place des originaux dans ces totaux comprenant également nombre de vidimus ? Jusqu’en 1264, avant l’accession du comte de Provence au trône de Sicile et date de fin provisoire des nouveaux inventaires détaillés du chartrier, on recense 516 chartes connues soit par des originaux (443, soit 86 % de cet échantillon), soit par des copies (73, ce qui donne 14 %). Ces dernières sont pour moitié des vidimus établis entre 1154 et 1402 et pour moitié des copies établies au XIIIe siècle, sauf dans un cas au XIVe siècle. Le travail de copie ou d’expédition n’est donc pas négligeable durant la période envisagée et il a permis de transmettre bon nombre de documents aujourd’hui dépourvus d’originaux. Ce type d’actes renvoie sans doute pour l’essentiel à ceux qui étaient conservés dans l’armoire Q de la Chambre des comptes.
15Quant à la composition de ces chartes, elle s’établit comme suit, à partir de catégories dont nous reconnaissons le caractère peu pertinent quelquefois, mais qui sont conçues comme de simples outils. Avant 1217 et l’installation au pouvoir de Raymond Bérenger V, on conserve surtout des titres et des diplômes consolidant le pouvoir comtal, aussi bien au regard de l’empereur que de l’aristocratie ou de l’Église locale. Sur 98 chartes, on compte en effet 25 % d’hommages et inféodations, 22 % de conventions, accords et arbitrages, 15 % de diplômes impériaux ou pontificaux, 11 % de traités de paix avec des puissances extérieures à la Provence. Sous le règne de Raymond Bérenger V, on voit se développer des actes se rapportant aux règlements de conflits, aux arbitrages et à la paix du comte, outre dans une moindre mesure ce qui renvoie à son œuvre législatrice (statuts), et à la gestion d’un domaine en pleine expansion. Sur 207 chartes, 28 % concernent des conventions, accords et arbitrages, 20 % encore des diplômes impériaux ou pontificaux, 9 % des hommages et inféodations, 7 % des juridictions, 6 % le domaine, 6 % la comptabilité (quittances surtout), 3,8 % les statuts, 7,7 % les traités extérieurs.
16Enfin, sous le règne comtal de Charles d’Anjou, on note la prédominance des accords de paix, des actes relatifs aux relations diplomatiques ou avec l’aristocratie et ceux renvoyant à la gestion du domaine et à l’exercice de la justice. Sur 286 chartes, 22 % sont des conventions et arbitrages, 22 % ont trait à la gestion domaniale, 13 % sont des hommages et inféodations, 15 % des traités, 8 % renvoient aux juridictions, 8 % sont des diplômes impériaux et pontificaux, 5 % des documents comptables. Mais peu d’actes évoquent l’œuvre législatrice : cette dernière est renvoyée aux registres, très différemment du règne suivant, où les chartes reprennent le dessus pour cette catégorie. Il ne faut sans doute pas sur-interpréter ces données. On a là probablement l’effet de l’introduction au XIXe siècle de chartes autrefois conservées dans la Chambre des comptes, tout comme celui du développement du registre comme support de l’œuvre législatrice et administrative, pour les statuts et ordonnances comtaux dès les années 1260.
17À partir de 1209, et de manière effective à partir de 1216, le comte de Provence gouverne aussi le comté de Forcalquier. Le chartrier des comtes de Forcalquier avant 1209 ne nous est plus accessible. Pourtant, beaucoup d’indices suggèrent dans cette principauté une certaine élaboration de la relation à l’écrit et le recours à des techniciens du droit et de l’acte notarié dans l’entourage comtal40. L’érudit Joseph Hyacinthe Albanès en a tenté une reconstitution à la fin du XIXe siècle en colligeant des actes épars41. Il a ainsi rassemblé 81 chartes depuis Guillaume Ier (1090-1129), fils d’Azalaïs et d’Ermengol d’Urgell fondateurs du comté, jusqu’à Guillaume de Sabran († c. 1245-1246), dont 70 jusqu’en 1209, date de disparition du dernier comte indépendant. Sur ces dernières, 21 proviennent des Hospitaliers, quatre d’établissements religieux divers et 12 sont des copies (vidimus des années 1280 et copies des XIVe-XVIe siècles). Dans ce corpus, il n’y a donc que 33 chartes originales, et la grande majorité concerne le dernier comte Guillaume, qui règne entre 1168 et 1209. En outre, onze chartes renvoient aux héritiers de Guillaume de Forcalquier, entre 1212 et 1244, avec seulement trois originaux, un vidimus de 1282, des copies des XIVe-XVIe siècles, ainsi que des pièces venues des fonds de Saint-Victor de Marseille et des Cisterciens de Silvacane. L’ensemble exhumé par le chanoine Albanès n’a rien d’un chartrier homogène, mais s’apparente à un corpus factice, trop faible au demeurant pour permettre de pousser plus loin l’analyse. Le chartrier originel, dont on doit se résoudre à presque tout ignorer, paraît s’être fondu en partie dans celui des comtes de Provence, vraisemblablement sous le règne de Raymond Bérenger V, le premier comte rassemblant sous un même nom les principautés de Provence et de Forcalquier. Le rôle des notaires qui portent le titre de « chancelier » et passés du service de Guillaume à celui de Raymond Bérenger a sans doute été déterminant dans ce processus, comme le suggère le parcours de maître Gautier de Forcalquier42. À moins que la transmission ait eu lieu plus tardivement, lorsqu’en 1256 la comtesse douairière Béatrice de Savoie abandonna ses possessions du comté de Forcalquier à son gendre Charles d’Anjou.
VI – Le chartrier et les institutions comtales
18Si les contours exacts du chartrier médiéval dit de la Tour du Trésor demeurent encore difficiles à saisir, on est capable en revanche de donner quelques jalons, non seulement sur l’évolution de la forme des actes, mais aussi sur les liens du chartrier avec les institutions comtales, sur le contexte de production des documents et sur leurs modes de conservation.
19Jusqu’au milieu du XIIIe siècle, qui voit s’implanter en Provence la dynastie comtale angevine, la production archivistique de l’administration comtale se limite à des chartes. Le premier usage du registre papier correspond à la période de changement dynastique, peut-être de manière contingente, encore que les Capétiens fassent usage du registre cartulaire, sur support parchemin tout d’abord, depuis le début du siècle43. Ainsi conserve-t-on en Provence un registre de comptes, confectionné par le notaire Raymond Scriptor, vers 1249 et 1251-1252, un autre consignant l’enquête domaniale générale achevée en 1252, un inventaire des droits royaux dans la viguerie de Marseille, de 1265, et le premier cartulaire des archives comtales de 1278-127944. Mais l’enquête de c. 1252 intègre un document daté du 25 décembre 1246 et dénommé « Cartularium albergarum, cavalcatarum et omnium servitiorum » : il est presque certain qu’il s’agissait déjà d’un registre45. Par ailleurs, si à partir de 1266 débute l’enregistrement des actes émis par la chancellerie du royaume de Sicile, cette pratique n’a rien de systématique ni de régulier en Provence avant le règne de Jeanne de Naples (1343-1382)46. Pourtant, il y existe des usages administratifs qui s’en rapprochent, dès le règne de Raymond Bérenger V. En témoigne l’occurrence du verbe insinuari, tributaire du Code justinien47, qui pourrait suggérer la pratique précoce d’un enregistrement, lorsqu’il est évoqué pour la première fois en août 1241 à propos d’une donation48. Mais il renvoie alors clairement à l’inscription dans une charte et non dans un registre.
20Sous la dynastie des comtes catalans de Barcelone jusqu’à la fin du XIIe siècle, la Provence occupe un rôle secondaire dans la production des chartes. Cette activité est intimement liée à leur conservation49. Dans l’entourage comtal, on identifie un à deux clercs issus du clergé cathédral et qui portent les titres de scriptor comitis (1126), scriptor regis et notarius regis (années 1170-1180), mais il ne s’agit pas de Provençaux50. Toutefois, dans les années 1170, le comté de Provence est doté d’un service qui lui est propre, en une période de sédentarisation de la cour à Aix qui devient peu après résidence comtale principale. Un service spécialisé est attesté au début du siècle suivant. Il revêt le nom de chancellerie, mais il s’agit en fait d’un simple bureau de notaires dont l’un est aussi garde du sceau. En 1200-1201, on rencontre la première attestation du terme pour le comté de Provence, avec ce maître Guillaume, comitis Provincie cancellarius, qui paraît à Aix et à Tarascon51. Le service semble se structurer sous le règne effectif de Raymond Bérenger V, à partir de 1216.
21L’entourage de sa mère, la comtesse Gersende, retirée dans le comté de Forcalquier après son veuvage de 1209, a joué dans ce processus un rôle déterminant. En effet, sous le grand-père et prédécesseur de celle-ci, Guillaume de Forcalquier († 1209), on rencontrait déjà un certain Pierre Grossi, prévôt du chapitre cathédral de Forcalquier entre 1164 et 1202 au moins, présent dans la suite comtale à Pavie en 117452 et disparu un 16 juillet en 1202 ou 1204. Il porte dès 1174 le titre de cancellarius53. Son neveu Isnard Gaucelin lui succède à cette prévôté entre 1204 et 1231. Pierre Grossi est assisté d’un scribe ou notarius comitis dénommé Pierre, signalé entre 1194 et 120254. De même, aux côtés de la comtesse Gersende en 1218 et 1219, on trouve maître Gautier de Forcalquier, sans doute issu lui aussi du chapitre Saint-Mary55. En 1218-1219, le voici notaire de la comtesse, en 1228, notaire de son fils Raymond Bérenger V à Tarascon, et en 1229 à nouveau rédacteur d’actes concernant Forcalquier. En 1232, chanoine de Riez et chantre, il participe à un accord souscrit à Grasse avec d’autres juristes, assiste le comte comme témoin lors des hommages de 1235 et arbitre en 1244 sans doute en tant que causidicus. En novembre 1232, il se dit cancellarius, et en 1233, il arbore une devise et un seing manuel. En passant au service de Raymond Bérenger V, peut-être Gautier a-t-il emmené avec lui une partie du chartrier des comtes de Forcalquier56. Auprès de Raymond Bérenger, et aux côtés du chancelier Gautier, on identifie plusieurs autres notaires et scribes, tout au plus un à deux instrumentant de manière concomitante : voilà sans doute l’embryon d’un service. Les notaires sont Pons Gantelmi en 1218-1219, Guillaume Poncii, de Seyne, en 1220 et 1226, Jean, comitis scriptor en 1222, Geoffroi de Brignoles en 1225, Bernard Raymundi entre 1227 et 123057, et Pierre Andree en 1229 et 123558. D’autres personnels œuvrent avec Gautier de Forcalquier : de manière temporaire, tel le notaire Bertrand Guillelmi, qui instrumente jusqu’en 1237, avec le titre de juge en 1233, de chancelier la même année59, et sa devise propre ; ou bien de façon plus régulière, tel Raymond, dit scriptor et notarius, signalé à partir de 1233 et jusqu’en 1245.
22Mais, s’il s’agit d’acteurs de la production documentaire, rien ne précise les modes de conservation des actes émanant de ce notariat. Ces divers individus devaient probablement au moins détenir des minutes des instruments donnés pour le comte. Au fur et à mesure que leur ouvrage change de nature et d’ampleur, de nouvelles formes de conservation s’avèrent nécessaires. Ce n’est que sous le premier comte angevin que des informations plus précises nous permettent de noter le rôle déterminant que le notaire de chancellerie joue dans le dépôt et l’archivage des papiers comtaux les plus récents. C’est un même individu qui a joué un rôle déterminant dans la transmission des savoir-faire administratifs au moment du changement dynastique de 1245-1246. Il s’impose comme mémoire vivante du comté en conservant dans sa maison aixoise une partie des archives sous le règne de Charles d’Anjou et vraisemblablement dès la fin du précédent. Il s’agit de Raymond Scriptor, notaire de la chancellerie du comte, qui paraît dès 1228. Il est le rédacteur du premier compte rationnaire général pour 1249-1250, et instrumente également pour l’archevêque d’Aix en 1251. Sans doute a-t-il aussi composé le cartulaire Pedis, dans sa première forme, en 1278-127960. Pour mener à bien cette toute première compilation des diplômes et chartes du comte sous l’égide du sénéchal, c’est lui qui supervise leur expédition et transcription : les agents du sénéchal lui empruntent puis lui restituent certains originaux en février 1279, lesquels sont replacés dans la maison du Temple d’Aix, à proximité du palais comtal61. Il s’agit bien de chartes, et non des moindres : le diplôme de Frédéric I er accordé en août 1162 au comte Raymond Bérenger III et sa confirmation par Frédéric II en août 122662. C’est donc vraisemblablement à la garde des Templiers que fut confié dans un premier temps le chartrier comtal. Mais une autre partie des archives leur échappe. Raymond Scriptor porte le titre de trésorier en 1269-1272, de maître rational en Provence en 1269, celui de rational de Provence en 1273, à l’époque des premières tentatives pour structurer le contrôle des comptes des officiers, et de procureur du roi en 127863 : il concourt lui-même à alimenter les stocks documentaires de nouveaux apports. Et il garde aussi l’autre partie des archives auprès de lui, surtout ce qui concerne la comptabilité et des recueils de titres, le noyau du futur archivium regium auprès de la Chambre des comptes, à savoir quaterni, regestra, cartularia et autres rationes. Encore en avril 1290, c’est dans sa propre maison aixoise que sont entreposées ces archives (in archivio curie) et que l’on va chercher un cartularium sive regestrum d’où l’on extrait des titres à propos de Digne64. Raymond Scriptor était pourtant décédé depuis longtemps, puisqu’il disparaît de la documentation après le mois de février 127965. Mais jusqu’à la veille de la fondation d’une Chambre des comptes, il est probable que s’est ainsi maintenue la dualité du fonds et des modes de conservation des archives comtales.
23Le processus d’organisation et de rassemblement d’un archivium regium Aquense spécifique et unifié est lié à la création de la Chambre des comptes de Provence entre 1288 et 129766. La première attestation de cette expression attachée au nom de la capitale comtale remonte à 130267. Mais ce processus doit sans doute beaucoup à celui qui s’opère dans le Regno. Depuis la mention en novembre 1275 de l’acquisition par le roi de deux maisons pour la conservation des archives, à Naples près du Castel Capuano, et à Capoue près de la Torre Sant’Erasmo, puis celles d’auditeurs chargés de surveiller les archives le 8 juin 1280 et d’un custos archivii en 1292, se fait jour un processus de concentration et de sédentarisation à Naples, au profit du Castel dell’Ovo où se trouvent l’administration financière et la cour des maîtres rationaux68. Du reste, dès les statuts de 1266-1267 sur les officiers, composés sous l’égide du maître rational Giozzolino della Marra, s’est posée la nécessité pour ce dernier office, dans le cadre de sa mission, de contrôler la masse documentaire produite par les autres serviteurs du roi69. Un officier responsable des archives en Provence n’est attesté qu’en 1312, avec le titre d’archivarius, et il s’agit aussi d’une émanation de la Chambre des comptes70 : Pierre de Limovicinio, dit par l’historiographie « de Limousin », trésorier en 1287, auditeur des comptes attesté en 1290 et receveur fiscal en 129671. Avec son successeur Hugues Honorati, la fonction se consolide et prend une forme pérenne. Notaire de la cour d’Aix à partir de 130572, signalé comme archivaire en 1319, Hugues Honorati est actif jusqu’au début de l’année 1360. Du fait de sa longévité, il est le véritable fondateur de l’office d’archivaire. Il est assisté d’un collègue à partir des années 1340, un dédoublement de la fonction désormais durable. Il s’agit d’une charge intégrée à la Chambre des comptes, la carrière d’archivaire constituant d’ailleurs un marchepied vers les fonctions de rational. Ce qui la différencie de la garde du trésor des chartes, attestée au début du XIVe siècle chez les Capétiens. En revanche, le chartrier comtal reste hors du champ de compétence de l’archivaire, probablement dès l’origine de cet office : c’est en effet le sénéchal et le juge mage qui en ont la garde exclusive. Il est probable que pareille situation renvoie à une organisation ancienne, à une évolution amorcée dès le milieu du XIIIe siècle et fondée sur la dualité des archives comtales.
24L’intégration de l’ensemble de la documentation archivistique des comtes de Provence en un même lieu, le palais d’Aix, perpétue ainsi une ancienne organisation duelle, associant une collection morte de titres anciens et un fonds alimenté principalement par l’activité de la Chambre des comptes. Celle-ci voit affluer des masses documentaires nouvelles que viennent grossir les nécessités de l’enregistrement. Ainsi, le 12 avril 1363, un édit royal donne obligation aux archivaires d’enregistrer sous deux mois tous les privilèges, donations et engagements, hommages, reconnaissances, fermes, et tous les actes de vente et d’achat domaniaux73. Il achève de donner aux archives de la Chambre des comptes des contours autonomes au regard du chartrier de la Tour du Trésor. Ce dispositif duel n’est précisément décrit que sous le règne de Jeanne Ire. En 1379, le palais royal est en effet l’objet d’une minutieuse description, à l’occasion de l’enquête menée dans la viguerie d’Aix par le maître rational Véran d’Esclapon et le rational et ancien archivaire Hugues Bernardi74. Les enquêteurs déterminent les lieux où se conservent les archives et leur organisation. Le procès-verbal nous évoque d’abord la Tour du Trésor, une « turris fortis et magna ». S’y trouvent plusieurs coffres (capsie) contenant les privilèges impériaux, munis de bulles d’or et de cire, et divers actes, des bulles pontificales de grande importance : ces titres légitiment la détention par la reine et ses prédécesseurs des deux comtés et du royaume de Sicile depuis Charles d’Anjou. Son accès est fermé par deux portes. La première est munie d’une serrure, dont la clé est conservée par le prieur et la prieure de Notre-Dame de Nazareth, le couvent de dominicaines fondé par Charles II, dans une bourse scellée du sceau du sénéchal. La seconde, de trois serrures, et leurs clés sont détenues par le sénéchal, le juge mage, le prieur et la prieure du couvent Notre-Dame de Nazareth. Le palais comporte aussi une tour de la Trésorerie qui se distingue de la précédente. Elle abrite un coffre accueillant les revenus du fisc mais pas d’archives, et c’est le trésorier qui en détient les clés. Ce premier ensemble constitué de chartes transmet l’héritage ancien des titres fondateurs des précédentes maisons comtales et des premières décennies de la maison d’Anjou, entre le Xe et le XIIIe siècle, précédemment gardé par les Templiers d’Aix et placé dans la Tour du Trésor probablement dès la fin du XIIIe siècle, au moment où le cartulaire Pedis a été élaboré. Celui-ci prend acte de cette dissociation et en pallie les inconvénients en mettant à la disposition des officiers les titres nécessaires à l’administration des comtés de Provence et de Forcalquier. Le chartrier est conservé en tant que trésor. Peu accessible, il est donc fort peu ou plus du tout alimenté. Comme à la fin du XVIIe siècle, on ne pénètre déjà plus guère dans la Tour du Trésor au XIVe siècle, et du reste la procédure d’accès est d’une bien grande complexité. C’est là une grande différence avec les chartes du Trésor des rois de France, en particulier sous les Valois75.
25L’archive vivante n’est point là en 1379. Une salle voûtée du palais, « camera fundata de crota », accueille l’archivium publicum, autrement dit l’archivium regium Aquense signalé depuis le début du siècle76. C’est lui qui est en relation avec les plus récents développements institutionnels et qui est alimenté par la production documentaire des organismes du comté : la chancellerie du sénéchal, les services du juge mage, la Chambre des comptes (l’essentiel de ce qui nous est parvenu provient de ce dernier service). S’y trouvent des armoires de bois fermant à clé contenant des registres anciens et récents77, des actes divers, les hommages des prélats, barons et communautés, ainsi que les transcriptions de divers privilèges dont les originaux sont conservés dans la Tour du Trésor. Les clés de ces armoires sont gardées par les archivaires, leur accès est donc facilité. Ces officiers ne peuvent révéler ou tirer des copies de ces registres sans autorisation préalable du sénéchal ou des maîtres rationaux. C’est dans cette camera archivii et auditorium que sont rendus les comptes des officiers, des fermiers du fisc et autres receveurs des droits royaux.
26Au terme de ce survol, il apparaît que le chartrier médiéval des comtes de Provence n’existe pas encore. Il ne nous sera jamais accessible sans un travail critique approfondi. Nous n’en avons guère posé que quelques bases exploratoires. Ce tri préalable devra mobiliser une analyse systématique des mentions dorsales et des cotes anciennes des actes, et leur comparaison avec les seuls inventaires disponibles, celui de 1524, ceux de la commission de 1682-1684 et celui de 1820, alors qu’une histoire des pratiques de cotation des chartes et registres anciens reste à bâtir pour la Provence78. Le chartrier dans son état actuel ne saurait rendre compte qu’imparfaitement de celui de la Tour du Trésor, puisqu’il mêle sous ce même titre les pièces issues du fonds de ladite tour et celles que la Chambre des comptes a produites à partir de la fin du XIIIe siècle. Dans tous les cas, on ignore de surcroît les dates de dépôt des actes. On présuppose un dépôt initial au moment de leur rédaction, situation à peu près certaine pour les XIIe et début XIIIe siècles, tant que le chartrier reste lié au contexte de production des actes et à la chancellerie comtale. Sous les deux premiers Angevins, il devient peu à peu une collection morte, particulièrement après la confection du premier cartulaire dit Pedis en 1278-1279. On est donc incapable pour le moment d’en analyser les rythmes exacts d’enrichissement et d’accroissement. Au regard du développement institutionnel, apparaissent plus nettement ces processus de sédentarisation, associant le chartrier à un lieu, et de fossilisation, avec le recul d’apports nouveaux en lien avec les récentes institutions comme la Chambre des comptes. Le chartrier constitue ainsi précocement une mémoire morte, une collection de titres destinés au mieux à conforter les recherches d’éléments probatoires du personnel de la Chambre des comptes et à rassurer le souverain sur la légitimité de son gouvernement en Provence. Mais il n’est pas sûr qu’il joue le rôle d’« écrin de la mémoire dynastique », tel le Trésor des chartes des rois de France79.
Annexe
Annexe
Arch. dép. Bouches-du-Rhône, B 7, Sclaponi, registre papier (112 folios), enquête domaniale dans la viguerie d’Aix menée par le rational Hugues Bernardi et le maître rational Véran d’Esclapon en janvier 1379.
Éd. : folios 3-3v, lettres de commission du sénéchal Foulque d’Agoult, J. Bry, Les Vigueries de Provence. Aperçu de leur histoire jusqu’à la fin du XVIe s., Paris, 1910, p. 387-388 ; folios 5v-7, mais sans les titres 12 et 13 concernant la Tour du Trésor et celle de la Trésorerie : Noël Coulet, « La chambre des comptes de Provence », dans Ph. Contamine et O. Mattéoni (éd.), La France des principautés. Les chambres des comptes en France, XIVe-XVe siècles, 2, Textes et documents, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1998, p. 209-212.
Ind. : N. Coulet, « Aix, capitale de la Provence angevine », dans L’État angevin. Pouvoir, culture et société entre XIIIe et XIVe siècle. Actes du colloque international… Rome-Naples, novembre 1995, Paris-Rome, École française de Rome, « Collection de l’École française de Rome, 266 », 1998, p. 317-338. N. Coulet, « L’enquête de 1379 dans la viguerie d’Aix », dans Th. Pécout (dir.), Quand gouverner c’est enquêter. Les pratiques politiques de l’enquête princière, Occident, XIIIe – XIVe siècle, colloque d’Aix-en-Provence et Marseille, mars 2009, Paris, De Boccard, « Romanité et modernité du droit », 2010, p. 443-458.
[fo 5v]
[11] Item est sciendum quod ab alia parte in dicto palacio est sedes ordinaria et auditorium dominorum magnorum racionalium unde camera secreta in qua audiunt, decidunt et determinant rationes quorumcumque officialium et emptorum jurium et fiscalis pecunie perceptorum, ad dictam curiam reginalem pertinentibus et alia agunt, tenendo eorum consilia que pro utilitate dicte reginalis et bono statu fidelium subjectorum videntur pertranctanda et pariter ordinanda. [en marge gauche] XI Camera dominorum racionalium
[12] Item est sciendum quod in dicto palacio est quedam turris fortis et magna in qua sunt plures capsie in quibus conservantur privilegia imperialia sigillis aureis et aliis ceriis bullata, necminus quamplura alia instrumenta scripture et cautele diverse per quorum tenorem apparet evidenter quomodo et qualiter prefata reginalis majestas est et fuerunt ejus precessores, comitissa et comites, domini et domine comitatuum predictorum, et a tanto tempore citra de quo vix memoria reperitur seu habetur, necnon conservatur etiam infondatio facta serenissimo principi clare memorie domino regi Karolo80 tunc regis Francie filio secundo genito, pro se et ejus successoribus de regno Sicilie citra Farum et ultra Farum, et etiam bulle papales nonnulle magni ponderis. Et clauditur dicta turris et clausa tenetur duabus portis in quarum prima est una clavis magna et in secunda porta finit tres ferrature et claves sive clausure tribus clavibus, quarum unam tenet et custodit dominus senescallus, aliam dominus major judex et reliquam terciam cum clave prime porte et cum duabus aliis clavibus dictarum capsiarum existencium infra ipsam turrem, tenent et custodiunt prior et prioressa monasterii regalis beate Marie de Nazareth81 de Aquis in quadam bursa quam clauditur et sigillo domini senescalli continetur, ne possit aperiri sine ejus presencia et mandato et ne fraus aliqua valeat comitti vel aliqua substrahi vel etiam transportari.
[en marge gauche] XII Turris thesauri
[13] Item est sciendum quod in ipso palacio est quedam alia turris in qua contueri thesauraria cum quadam magna capsia ad custodiam fisci procuratoris, de quibus thesaurarius Provincie consuevit tenere claves.
[en marge gauche] XIII Turris thesaurarie juxta magnam aulam.
[fo 6]
[14] Item est in dicto palacio quedam alia camera fundata de crota in qua tenetur archivium publicum et custoditur. In quoquidem archivio sunt quamplura armaria fustea que cum clavibus claudiuntur, in quibus tenentur et custodiuntur regestra quamplura tam antiqua quam nova et alia quamplurima instrumenta et homagia prelatorum, baronum, nobilium et universitatum et aliorum vassalorum quorumcumque dictorum comitatuum, necminus transcripta diversorum privilegiorum quorum originalia in dicta turri Thesaurarii conservantur, juribus, juridictionibus et dominiis ad dictam reginalem curiam occasione dictorum comitatuum pertinentibus. Quorumquidem armariorum tenent claves archivarii reginales et dicta regestra et alia instrumenta habent et tenentur custodire et conservare, et non possunt nec debent ostendere alicui aliquid de eisdem seu dare vel concedere sine licencia domini senescalli vel dictorum dominorum magistrorum racionalium vel alterius eorumdem.
[en marge gauche] XIIII Camera archivii
[15] Item est sciendum quod in dicta camera archivii sunt sedes ordinaria recionalium Provincie ubi audiunt finaliter raciones cujus clavariorum, officialium et aliorum quorumcumque perceptorum fiscalis pecunie et aliorum jurium per eosdem racionales vel alterum eorumdem juxta ordinationem et distribucionem faciendum per ipsos dominos magistros racionales, que modo raciones predicte custodiuntur per archivarios supradictos.
[en marge gauche] XV Sedes racionalium in dicta camera ubi audiunt raciones, que raciones conservantur per archivarios.
Notes de bas de page
1 Un regeste concerne la partie la plus ancienne du chartrier, mais il inclut tous les documents antérieurs à 1112, quelle que soit leur origine (chartriers ecclésiastiques pour l’essentiel) : André Villard et Édouard Baratier (Arlette Playoust éd.), Catalogue des chartes antérieures au XIIe siècle (687-1112) conservées dans les fonds des Archives départementales des Bouches-du-Rhône, Marseille, Archives départementales des Bouches-du-Rhône, 1998. L’inventaire le plus précieux s’interrompt malheureusement en 1264 : Pierre Santoni, Chartes de la Tour du Trésor : inventaire analytique, 1998 (dactylographié). Louis Blancard, Inventaire sommaire des archives départementales des Bouches-du-Rhône antérieures à 1790. Bouches-du-Rhône. Archives civiles, série B, tome 1, Paris, Paul Dupont, 1865 [de B 1 à B 1499] ; du même, Inventaire sommaire des archives départementales des Bouches-du-Rhône antérieures à 1790. Bouches-du-Rhône. Archives civiles, série B, tome 2, Marseille, Typogr. et lithogr. Cayer, 1879 [de B 1500 à B 3312] ; avec un instrument de travail qui en est tiré, mais qui est resté manuscrit : Édouard Baratier, Table alphabétique des matières, des noms de personnes et de lieux, tomes 1 et 2 (dactylographiés). Sur les divers archivistes des Bouches-du-Rhône mentionnés au cours de ce travail : Madeleine Villard, « Archivistes à Marseille au service de l’érudition provençale », Provence historique, t. 38, 1988, p. 323-333.
2 Arch. dép. Bouches-du-Rhône, B 750 et 751. Sauf indication contraire, toutes les cotes d’archives renvoient aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône.
3 Honoré Bouche, La chorographie ou description de Provence, Aix, Charles David, 1664, en fait un large usage. De même Jean-Pierre Papon, Histoire générale de Provence, Paris, Moutard, 1776-1786, qui édite un certain nombre d’actes dans ses preuves (tomes 2 et 3), tirés des « archives du roi à Aix, armoire Q », avec la mention du carré et de la cote.
4 Peut-être le désigne-t-on sous ce nom de chartes de la Tour du Trésor depuis la fin du XIIIe siècle. Dans le cartulaire B 143, Pedis, daté de 1278-1279, on rencontre ainsi plusieurs fois la mention : « originale est in Thesauraria apud Aquis ». Mais le terme renvoie-t-il déjà à cette date à la Tour du Trésor ? Sur la topographie du palais comtal aixois : Noël Coulet, « Aix, capitale de la Provence angevine », L’État angevin. Pouvoir, culture et société entre XIIIe et XIVe siècle. Actes du colloque international. Rome-Naples, 7-11 novembre 1995, Paris et Rome, École française de Rome, « Collection de l’École française de Rome, 245 », 1998, p. 317-338.
5 Benoît-Michel Tock et ses collaborateurs : B.-M. Tock (dir.), M. Courtois et M.- J. Gasse-Grandjean (éd.), Inventaire des chartes originales antérieures à 1121 conservées en France, Turnhout, Brepols, 2001 ; Jean-Baptiste Renault, L’écrit diplomatique à Saint-Victor de Marseille et en Provence (ca. 950 - ca. 1120), thèse de doctorat, Université de Strasbourg, dir. B.-M. Tock, 2013 ; B.-M. Tock, « Les chartes originales de l’abbaye Saint-Victor de Marseille », Saint-Victor de Marseille. Études archéologiques et historiques. Actes du colloque Saint-Victor, Marseille, 18-20 novembre 2004, Michel Fixot et Jean-Pierre Pelletier (dir.), Turnhout, Brepols, 2009, p. 283-293. Entre autres travaux de ces auteurs : Michel Lauwers, « Consécration d’églises, réforme et ecclésiologie monastique. Recherches sur les chartes de consécration provençales du XIe siècle », Mises en scène et mémoires de la consécration de l’église dans l’Occident médiéval, Didier Méhu (dir.), Turnhout, Brepols, 2007, p. 145-194 ; Monique Zerner, « L’abbaye de Saint-Victor de Marseille et ses cartulaires : retour aux manuscrits », Les Cartulaires méridionaux, Daniel Le Blévec (dir.), Paris, 2005, p. 163-216 ; Florian Mazel, « De l’emprise aristocratique à l’indépendance monastique : patrimoine et culte des saints à Saint-Victor de Marseille (Xe - XIe siècle) », Saint-Victor de Marseille, M. Fixot et J.-P. Pelletier (dir.), op. cit., p. 255-282.
6 Par exemple : Gérard Giordanengo, « Vocabulaire romanisant et réalité féodale en Provence », Provence Historique, t. 25, 1975, p. 255-273.
7 Une première approche avait été donnée par L. Blancard dans le cadre de son reclassement des archives : L. Blancard, Notice sur la cour des comptes de Provence, leurs sources, leur composition, l’inventaire qui en a été rédigé, Marseille, 1879 ; Raoul Busquet, « Les origines de la cour des comptes de Provence », Provincia, t. 2, 1922, p. 148-159 ; N. Coulet, « Le personnel de la chambre des comptes de Provence sous la seconde maison d’Anjou (1381-1481) », La France des principautés. Les Chambres des comptes, XIVe-XVe siècles, Philippe Contamine et Olivier Mattéoni (dir.), Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1996, p. 135-148, et du même, « La chambre des comptes de Provence », Les Chambres des comptes en France, XIVe-XVe s., 2, Textes et documents, Ph. Contamine et O. Mattéoni (éd.), Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1998, p. 199-232 ; Michel Hébert, « L’ordonnance de Brignoles, les affaires pendantes et l’information administrative en Provence sous les premiers Angevins », Information et société en Occident à la fin du Moyen Âge, Claire Boudreau, Kouky Fianu, Claude Gauvard et Michel Hébert (dir.), Paris, 2004, p. 41-56, et du même, « Computus, quaternus, ratio : une instruction administrative en Provence en 1297 », Un Moyen Âge pour aujourd’hui. Mélanges offerts à Claude Gauvard, Julie Claustre, Olivier Mattéoni, Nicolas Offenstadt (dir.), Paris, Presses universitaires de France, 2010, p. 339-346 ; Jean-Luc Bonnaud, « La transmission de l’information administrative en Provence au XIVe siècle : l’exemple de la viguerie de Forcalquier », Provence historique, t. 46, 1996, p. 211-228.
8 P. Santoni, Chartes de la Tour du Trésor : inventaire analytique, 1998 (dactylographié).
9 Jole Mazzoleni, I Registri della Cancelleria Angioina ricostruiti da Riccardo Filangieri con la collaborazione degli Archivisti napoletani, t. 37, 1264-1434 : Storia della ricostruzione della Cancelleria Angioina, Naples, Accademia Pontaniana, 1987. Stefano Palmieri, La Cancelleria del regno di Sicilia in età angioina, Naples, Accademia Pontaniana, 2006 ; Valentina Niola, « Les formulaires de la chancellerie angevine de Charles Ier à Jeanne Ire », Rives nord-méditerranéennes, t. 28, 2007, p. 57-91.
10 B 203 (48 folios), intitulé « Regestrum sive inventarium novum documentorum turris Thesauri ». Au folio 1, l’intitulé est plus développé et précise sa date et ses auteurs : « Repertorium sive inventarium novum documentorum regiorum et aliorum existentium in turre Thesauri, factum de anno Domini millesimo quinquegesimo vicesimo quarto et post exquessionem factam in provincia Provincie de Carollo de Molpunsie <domino de Borbonio> conestabulo regio qui sua presumpta audasia Provinciam invaserat, per nos Petrum Alberti, Honoratum Digne, Folhanum de Mehanis et Ludovicum Borrilli regios secretarios, rationales et archivarios, mandato magistrorum dominorum presidentium et magistrorum rationalium camere computorum ». En 1684, les cotes anciennes repérées sur les chartes de la Tour du Trésor, et remontant à un temps « immémorial », renvoient sûrement au catalogage de 1524 : B 748, f° 87v-88v et B 749, f° 67-67v. En juillet 1682, est mentionné ce même « Regestrum seu inventorium novum documentorum turris Thesauri » (B 1, f° 64-64v). Il est à rapprocher du répertoire des Magna regestra, actuellement B 51, probablement des années 1560.
11 B 51 (567 folios) : le catalogue inventorie les actuels registres cotés B 2 (Pergamenorum) à B 49 (Potentia), avec une table classée par ordre chronologique ; le registre le plus récent est alors B 48, Ursus, de 1555-1560. À chaque fois, le scribe indique le nom du recueil qui figure aussi sur sa couverture (qui devient ensuite un titre courant), la date de l’acte le plus ancien qu’il contient (avec des omissions), une brève analyse des actes contenus, le folio correspondant, et il place en marge gauche leurs titres, le plus souvent issus des titres et marges du registre lui-même.
12 Pierre d’Étampes, chanoine de Sens et clerc du roi, fut entre 1307 et 1324 le gardien du Trésor des chartes capétien, dont le lieu de conservation était la sacristie de la Sainte-Chapelle. L. Dessales, « Le Trésor des chartes, sa création, ses gardes et leurs travaux, depuis l’origine jusqu’en 1582 », Mémoires présentés à l’Académie des Inscriptions par divers savants, Paris, 1844, p. 365-461 ; surtout Henri-François Delaborde, « Étude sur la constitution du Trésor des chartes et sur les origines de la série des sacs, dite aujourd’hui Supplément du Trésor des chartes », dans, du même, Layettes du Trésor des chartes, t. V, Ancienne série des sacs dite aujourd’hui Supplément, Paris, Plon-Nourrit, 1909, p. I-CCXXIV. Depuis ces travaux fondateurs et ceux d’Olivier Guyotjeannin, la question a été renouvelée dans une perspective anthropologique, en insistant sur la nature du fonds au regard de la collection de titres, sur l’usage politique du dépôt et sa dynamique d’enrichissement face au développement institutionnel : Yann Potin, La mise en archives du Trésor des chartes (XIIIe-XIXe siècle), Thèse de l’École nationale des chartes, 2006 (dactylographié) ; voir le résumé publié dans les Position des thèses soutenues par les élèves de la promotion de 2007 pour obtenir le diplôme d’archiviste paléographe, Paris, École nationale des chartes, 2007, p. 173-182 ; du même, « Archives en sacristie. Le trésor est-il un bâtiment d’archives ? Le cas du Trésor des chartes des rois de France (XIIIe-XIXe siècle) », Livraisons d’histoire de l’architecture, t. 10, 2005, p. 65-86 ; O. Guyotjeannin et Y. Potin, « La fabrique de la perpétuité. Le Trésor des chartes et les archives du royaume (XIIIe-XIXe siècle) », Revue de synthèse, 5e série, 2004, p. 15-44.
13 Arch. dép. Vaucluse, 2E 25/1 (86 folios, en français, les chartes n’étaient cependant pas cotées individuellement) ; Claude-France Hollard, Répertoire numérique détaillé des archives des princes, de la principauté, du parlement et du conseil de guerre d’Orange, Avignon, Impr. Laffont, 2005, p. 23 ; Jacques de Font-Réaulx, « Le Trésor des chartes des Baux », Provence historique, t. 4, 1954, p. 141-150.
14 Peter Rück, « Die Ordnung der herzoglich savoyischen Archive unter Amadeus VIII. (1398-1451) », Archivalische Zeitschrift, t. 67, 1971, p. 11-101, et trad. ital., L’ordinamento degli archivi ducali di Savoia sotto Amedeo VIII (1398-1451), Rome, 1977 ; Guido Castelnuovo, « Contra morem solitum : un conflit d’archives savoyard en 1397. Quelques réflexions sur l’écrit, ses pouvoirs et les pouvoirs dans une principauté du bas Moyen Âge », Reti Medievali. Rivista, t. 9, 2008, 1, p. 1-19 ; Bernard Andenmatten et Guido Castelnuovo, « Produzione e conservazione documentarie nel principato sabaudo, XIII-XV secolo », Bullettino dell’Istituto italiano per il Medio Evo e Archivio Muratoriano, t. 110, 2008, 1, p. 279-348. Pour les comtes de Namur, voir l’entreprise récente fondée sur un inventaire encore plus précoce : Pierre Dehove et Jean-François Nieus, « Aux origines de la science princière des archives. Le premier chartrier des comtes de Namur et son inventaire de 1263 », BEC, t. 168, 2010, p. 95-149.
15 François-Xavier Emmanuelli, L’Intendance de Provence à la fin du XVIIe siècle : édition critique des mémoires « pour l’instruction du duc de Bourgogne », Paris, Bibliothèque nationale, 1980 ; Anette Smedley-Weill, Les intendants de Louis XIV, Paris, Fayard, 1995, ad indicem. Thomas Alexandre (1642-1713), marquis de Mesnil-Garnier, est fils de Thomas Morant, seigneur d’Étreville, maître des requêtes et intendant de Languedoc et Touraine notamment, jusqu’en 1661, et de Catherine Bardier, d’une famille de financiers. Après avoir exercé à Moulins en 1674-1677, il devient intendant de Provence le 1er novembre 1680, puis en 1687 premier président au Parlement de Toulouse. La procédure de 1682 est connue par le registre actuellement coté B 1 : celui-ci était conservé dans la bibliothèque de Jean-Louis Bonaud de Saint-Pons de La Galinière (auj. com. Châteauneuf-le-Rouge, Bouches-du-Rhône), conseiller de la Cour des comptes en 1692, et transmis par son fils Ignace qui lui succède à cet office en 1730, puis relié par son arrière-petit-fils Pierre Joseph Fortuné († septembre 1800) en juillet 1800. Le département des Bouches-du-Rhône en fit l’acquisition en 1816 (toutes ces informations sont consignées sur la page de garde). Il existe deux autres exemplaires de la commission royale du 14 mars 1682 : B 748, fo 86v-87v et B 749, fo 66-67. Les archives de l’intendance sous Thomas A. Morant ne semblent pas conserver de trace de la procédure de 1682-1684 (C 2182-2205 et C 4590), si ce n’est la mention de Jean Lescallier le 14 août 1682, « employé au travail qui se fait aux archives de Provence, pour la recherche des titres concernans les droits du Roy et de son domaine, comme ayant une pleine connoissance des anciens caractères et vieilles escritures », venu aux côtés de l’intendant pour collationner et transcrire des titres justifiant des droits royaux dans les archives de l’archevêché d’Arles (C 2183, fo 272-289).
16 B 1, fo 1-2.
17 B 1, fo 2-5.
18 B 1, fo 5-6v.
19 L’appellation de Magna regestra correspond aujourd’hui aux grands registres cotés B 1 à B 141 (jusqu’en 1791, la partie médiévale étant malaisée à isoler, bon nombre de registres modernes contenant des copies d’actes anciens, mais correspondant aux cotes B 2 à B 49 avec quelques exceptions), et celle de Parva regestra, aux cotes B 142 à B 203 (jusqu’au XVIIe siècle).
20 L’un d’entre eux est vraisemblablement le répertoire B 51, cité plus haut.
21 B 1, fo 6v-64v.
22 B 1, fo 63v.
23 B 1, fo 63v-64.
24 B 1, cahier non folioté, dit « 1er cahier » ; B 50, fo 1-200v et fo 204-205v (Armoire B).
25 B 50, fo 103v-190v et B 1, cahier non folioté, dit « 1er cahier ». La cote B 747 conserve un double de l’inventaire de l’armoire Q, sous forme autonome : du folio 1 au folio 199 on retrouve le détail des 20 « quarrés » totalisant les 104 liasses, identique à l’inventaire B 1. Toutefois, le B 747 a été muni d’une table par liasse (18 pages finales non numérotées) et d’une table sommaire par ordre alphabétique des entrées. Le B 747 est une copie de 1784 effectuée pour Pierre Joseph Fortuné Bruno Bonaud de La Galinière et acquise par les archives départementales en 1816.
26 Il nous est parvenu : B 203, cité plus haut.
27 B 1, fo 64v.
28 B 748, fo 1-85v et son double, B 749, fo 1-65v. L’inventaire des chartes de la Tour du Trésor est effectué par Thimoléon Le Gras, écuyer, conseiller et président, prévôt de Chaumont, Alexandre Le Gras, écuyer et avocat au parlement de Paris, en présence de Jean-Baptiste Dugrou, et des conseillers Balthazar d’André et Margaillet.
29 Ainsi, la première liasse comporte dix-sept pièces, cotées de « a » à « r » ; la deuxième liasse, 83 pièces, cotées de « a » à « llll ».
30 B 50, fo 200v, B 748, fo 87v-88v et B 749, fo 67-67v. La clôture est prononcée en présence d’Antoine de Seguiran, premier président de la Cour des comptes. L’intendant remet les inventaires aux archivaires, conformément à leur mission précisée dans la lettre royale du 25 mai 1683 (B 111, fo 1).
31 B 50, fo 202v.
32 B 748, fo 87v-88v et B 749, fo 67-67v.
33 On conserve ainsi un premier registre, le plus riche au regard de la procédure et des commissions, copié en 1785 par Joseph Antoine Louis Bonaud de La Galinière (1737-1816), conseiller au parlement en 1772 et à la Cour des comptes en 1774 : B 1, fo 1-65 et cahier non folioté (lettres de commission royales, procès-verbal de visite des archives, inventaire et récolement des archives de la Chambre des comptes). L’inventaire B 50 (222 folios), original, concerne tous les registres de la Chambre des comptes ainsi que ses titres regroupés dans l’armoire Q. Le B 747, une copie de 1784 pour Pierre Joseph Fortuné Bonaud de La Galinière, dotée d’une table des matières, consigne le répertoire de la seule armoire Q. Enfin, le chartrier de la Tour du Trésor est détaillé par un répertoire spécifique original, en double : B 748, fo 1-85v et B 749, fo 1-65v.
34 B 1 et copie B 747 effectuée en 1784.
35 B 748, fin du registre, non foliotée (à partir du fo 88v) et B 50, fo 204-211v : au retour, vérification des armoires entre le 5 novembre 1746 et le 19 juin 1747, par Jacques Joseph Gabriel Benoît d’André et François Xavier Bruno de Rians, conseillers en la Cour des comptes et commissaires au bureau de l’audition.
36 B 748, feuillet volant au début du registre : les titres sont retirés de « l’armoire en bois blanc » de la Tour du Trésor et placés dans une caisse scellée, puis replacés et recollés à l’aide des inventaires.
37 Suite au traité du 24 mars 1760, le transfert de certains registres et chartes au roi de Sardaigne et leur copie ont provoqué également de nombreuses manipulations dont rend compte un procès-verbal du 11 août 1762 : B 50, fo 212-222 et 224. On note aussi en 1736 la mention d’une « descente » de deux nouveaux registres à la Tour du Trésor : B 748, fo 88v.
38 Louis Rostand fut d’abord commis au tri des archives de la Préfecture en 1812, le poste d’archiviste qui lui échut ne fut créé qu’en 1818 : Raoul Busquet et Joseph Fournier, Les Bouches-du-Rhône. Encyclopédie départementale, t. 5, La Vie politique et administrative, Paris-Marseille, 1929, p. 277-278. Inventaire méthodique et raisonné par ordre de date et de matière des chartes, diplômes, titres et papiers des Archives de la Préfecture du département des Bouches-du-Rhône, 1re division, Archives de la cidevant Cour des comptes de Provence, Tour du Trésor, B 750, tome 1, des lettres A à N (300 folios) ; B 751, tome 2, des lettres de N à V (225 folios), avec une table des noms propres ; le fil de cet inventaire comporte quelques transcriptions et traductions d’actes.
39 Les mieux élaborés concernent les chartes du chapitre cathédral Saint-Sauveur d’Aix et l’abbaye Saint-Victor de Marseille : Emmanuel de Grasset, Répertoire numérique de la série G. Chapitre métropolitain d’Aix. 1, Analyse des chartes du fonds (1012-1470) [2G 1 à 386], Marseille, impr. J. Aschero-Vial, 1921 ; Joseph Hyacinthe Albanès [† 1897], Inventaire de la sous série 1H, abbaye de Saint-Victor de Marseille, Marseille, 1978 (dactylographié).
40 Damien Carraz, « Aux origines de la commanderie de Manosque. Le dossier des comtes de Forcalquier dans les archives de l’Hôpital (début XIIe-milieu XIIIe siècle) », La mémoire des origines dans les ordres religieux-militaires au Moyen Âge, Actes des journées d’études de Göttingen, 25-26 juin 2009, Mathieu Olivier et Philippe Josserand (dir.), Münster, Lit Verlag, 2012, p. 137-177 (nous remercions l’auteur de nous avoir amicalement communiqué son manuscrit alors inédit).
41 26F 41, p. 413-610, copies d’actes concernant les comtes de Forcalquier jusqu’en 1258.
42 Thierry Pécout, Raymond Bérenger V (1216-1245), l’invention de la Provence, Paris, Perrin, 2004 ; Damien Carraz, « Aux origines de la commanderie de Manosque », op. cit.
43 Pour une généalogie de ces registres de chancellerie, dans le cadre d’une réflexion sur l’enregistrement : Robert-Henri Bautier, « Cartulaires de chancellerie et recueils d’actes des autorités laïques et ecclésiastiques », Les Cartulaires. actes de la table ronde de décembre 1991, Olivier Guyotjeannin, Laurent Morelle, Michel Parisse (dir.), Paris, Droz et Champion, « Mémoires et documents de l’École des chartes, 39 », 1993, p. 363-377, notamment p. 363-368.
44 B 1500, registre papier, 180 x 140 mm (80 folios), présentation sommaire dans Richard Sternfeld, Karl von Anjou als Graf der Provence (1245-1265), Berlin, R. Gaertner, 1888, p. 252-253 : compte général de recettes et dépenses par le trésorier du comte de Provence et notaire de l’archevêque Raymond Scriptor (f° 34-62v), comptes des bailes de l’archevêque, depuis mars 1251 jusqu’au 26 février 1252 et Computus Rostagni, archipresbiteri Aquensis, pour les paroisses d’outre Durance, 1251 (f° 66-68 et 70, le compte des dépenses est intercalé au f° 69) (édité partiellement dans Étienne Clouzot et Maurice Prou (éd.), Pouillés des provinces d’Aix, d’Arles et d’Embrun, Paris, Imprimerie nationale et C. Klincksieck, « Recueil des Historiens de la France, Pouillés, 8 », 1923, p. VI-VII et 1-8). Thierry Pécout, « Aux origines d’une culture administrative : le clergé des cathédrales et la genèse d’une comptabilité princière en Provence à la fin du XIIIe siècle », De l’autel à l’écritoire. Aux origines des comptabilités princières en Occident (XIIe-XIVe siècle), Actes du colloque international d’Aix-en-Provence, 13-14 juin 2013, Thierry Pécout (dir.), Paris, De Boccard, 2015, p. 49-67. B 169, Turris antiqua, 103 folios (présenté et édité dans É. Baratier, Enquêtes sur les droits et revenus de Charles Ier d’Anjou en Provence (1252 et 1278), Paris, Bibliothèque nationale, « Collection de documents inédits sur l’histoire de France, série in 4° », 1969, notamment p. 19-23). B 812 (47 folios, papier, « Redditus civitatis Marssilie extracte per dominum Guillelmum de Gonnessa, vicarium dicti loci », entièrement rédigé en provençal), en cours d’édition par Marc Bouiron (Service de l’archéologie, Ville de Nice) : Thierry Pécout (dir.), L’enquête générale de Charles II en Provence (1297-1299), Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2016. B 143, Pedis, 177 folios, présenté et analysé dans Thierry Pécout, « Mémoire de l’État, gestion de la mémoire. À propos de deux cartulaires de la Chambre des comptes de Provence (1278 - c. 1332) », Memini. Travaux et documents, Société des études médiévales du Québec, t. 8, 2004, p. 29-58. Le premier rationnaire, de 1263-1264, est en revanche en parchemin (B 1501). Dans le même temps, le notariat connaît une évolution analogue de ses usages (premier registre de notaire, papier, en 1248, pour Marseille : Arch. mun. Marseille, 1 ii 1, 151 folios). Sur ce processus et sa bibliographie, voir en dernier lieu : Henri Bresc et Isabelle Heullant-Donat, « Pour une réévaluation de la “révolution du papier” dans l’Occident médiéval », Scriptorium, t. 61, 2007, 2, p. 354-383.
45 Édouard Baratier, Enquêtes sur les droits et revenus de Charles Ier d’Anjou, op. cit., no°218.
46 Riccardo Filangieri, I Registri della cancelleria angioina ricostruiti, 1, 1265-1269, Naples, Accademia Pontaniana, 1950.
47 Insinuare, insinuari et insinuatio apparaissent à de multiples occurrences dans le Code, ainsi par exemple au seul livre 5 : 5.3.20 ; 5.16.25 ; 5.40.2.
48 F. Benoît (éd.), Recueil des actes des comtes de Provence (1196-1245), Monaco, Imprimerie de Monaco, et Paris, Picard, 1925 [abrégé désormais en RACP], no°245 : Hanc donationem et concessiones […] in actis publicis apud nos facimus insinuari.
49 Sur les pratiques de l’écrit et les scribes comtaux, essentiellement des clercs séculiers ou réguliers, chez les comtes catalans au début du XIIe siècle : Josep Trenchs, « La escribanía de Ramón Berenguer III (1097-1131) », Saitabi. Revista de la Facultad de geografía et historia de la Universidad de Valencia, t. 31, 1981, p. 11-36.
50 Martin Aurell (éd.), Actes de la famille Porcelet d’Arles (970-1320), Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2001, nos 73, 134, 135 et 161. Bernat de Calidis, scriba regis (Ana Isabel Sánchez Casabón, Alfonso II rey de Aragón, conde de Barcelona y marqués de Provenza. Documentos (1162-1196), Saragosse, Institución « Fernando El Católico », 1995, no°42), à Tarascon en 1176 (no°216), scriba regis à Arles en 1167 (no°42) et Montpellier en 1176 (no°214), tabellio regis à Jarnègues en 1176 (no°215) ; Guilhem de Bassa, notarius regis à Perpignan, Marseille et Digne en 1176 (nos 213, 220, 226-227) et à Montpellier en 1181 (no°327) ; Sanç de Petra Rubea, scriba regis à Hyères en 1182 (no°357) ; Ponç de Osor, précenteur de Barcelone, clericus regis à Aix en 1185 (nos 402-403) ; Peire de Blandis, regius notarius en 1189 à Aix (no°502) et en 1190 à Saint-Rémy et Aix (nos 505-506) ; Joan de Batx à Aix et Tarascon en 1190 (nos 503-504) ; Joan de Beradiensis regis notarius à Aix en 1193 (no°590) et Columbus, notarius regis en 1193 à Grasse (no°592).
51 RACP, nos 12, 14 (1200-1201) et 27 (1203).
52 B 287. Sur sa prévôté, Joseph Hyacinthe Albanès, L. Fillet et Ulysse Chevalier (éd.), Gallia Christiana Novissima, t. 1, Montbéliard-Valence, Société anonyme d’imprimerie montbéliardaise, 1899, col. 787. Il est mentionné en 1173 : « qui hanc cartam dictavit » (B 287) ; de même en 1177, B 288. Il est conseiller de l’abbé Saint-Victor vers 1192 (Benjamin Guérard (éd.), Cartulaire de l’abbaye de Saint-Victor, Paris, Lahure, « Collection des cartulaires de France, 8-9, Collection des documents inédits sur l’histoire de France, 1, Histoire politique », 1857, no°978) et dispose de connaissances précises sur la notion de franc-fief : Gérard Giordanengo, Le Droit féodal dans les pays de droit écrit. L’exemple de la Provence et du Dauphiné, XIIe-début XIVe siècle, Rome, École française de Rome, « Bibliothèque des Écoles françaises de Rome et d’Athènes, 266 », 1988, p. 87-88 et n. 107.
53 56H 4413 ; B 22, fo 166, en 1183 ; B 296, en 1194 ; B 300, en 1201. J. H. Albanès, L. Fillet et U. Chevalier (éd.), Gallia Christiana Novissima, t. 1, col. 787.
54 Scriptor comitis (B 296, en 1194), « scripsit et dictavit » en 1199 (B 298), notarius comitis en 1199 (B 299), scriba comitis en 1201 (B 300). Le 14 juin 1201 : « Petrus Grossi prepositus Forcalquerii dictavit », « Petrus scriba comitis scripsit » (B 300) ; également les deux le 25 juin 1201, avec son neveu Isnard Gaucelinus causidicus (B 300) ; scriba comitis, juin 1202 (B 301), en juin 1202, notarius comitis, en compagnie de Pierre Grossi prévôt. C’est peut-être encore lui qui exerce auprès de Raymond Bérenger en 1216.
55 Th. Pécout, Raymond Bérenger V, op. cit., p. 244-245.
56 L’hypothèse est de D. Carraz, « Aux origines de la commanderie de Manosque », op. cit.
57 B 317, B 316, B 318.
58 Raoul Busquet et Victor-Louis Bourrilly, La Provence au Moyen Âge. Histoire politique. Les Institutions. L’Église, 1112-1481, Marseille, Champion, 1924, p. 246-249 ; RACP, Introduction, p. XLVII-LII.
59 RACP, nos 174, 178, 179.
60 Ce cartulaire rapporte 72 actes antérieurs à 1277 extraits du chartrier (35 pour le règne de Charles d’Anjou et 20 pour celui de Raymond Bérenger V depuis 1216, l’acte le plus ancien remontant à 921). Ils constituent le premier cahier, œuvre probable de Raymond Scriptor, rassemblant statuts, diplômes impériaux, ordonnances monétaires, testament de Raymond Bérenger V, liste des castra de c. 1239, traités avec Piémont, Dauphins, comtes de Toulouse etc., hommages, notamment ceux des Baux. Il est suivi d’additions successives jusqu’aux années 1320.
61 B 143, fo 28 et 29 : « Originale istum fuit restitutum pro domino senescalo in domo Templi, Raymundo Scriptori, apud Aquis anno Domini MCCLXXVIII die XI februarii », pour les deux premiers de ces actes, le troisième n’étant pas daté. L’église du Temple d’Aix, vouée à sainte Catherine et à sainte Marie de Bethléem, la commanderie et ses annexes, se situaient juste au nord du palais comtal : Jean Pourrière, Recherches sur la première cathédrale d’Aix-en-Provence, Paris, Firmin-Didot, 1939, p. 81-88.
62 Les chartes correspondantes nous sont parvenues, elles sont aujourd’hui cotées B 285, mais pas en originaux : il s’agit d’un vidimus de 1274.
63 Alain de Bouärd (éd.), Actes et lettres de Charles Ier, roi de Sicile, concernant la France (1257-1284), Paris, De Boccard, 1926, nos 151 (26 juillet 1269) et 659 (2 juillet 1273), entre autres, et le récapitulatif de sa carrière et de ses titres donné par N. Coulet, « La chambre des comptes de Provence », Les Chambres des comptes en France, Ph. Contamine et O. Mattéoni (éd.), op. cit., p. 202-207.
64 Éd. Baratier, Enquêtes sur les droits et revenus de Charles Ier d’Anjou en Provence, op. cit., p. 25, n. 2.
65 Sur sa carrière, N. Coulet, « Le personnel de la chambre des comptes de Provence sous la seconde maison d’Anjou (1381-1481) », La France des principautés, Ph. Contamine et O. Mattéoni (dir.), op. cit., p. 135-148, et du même, « La chambre des comptes de Provence », Les Chambres des comptes en France, Ph. Contamine et O. Mattéoni (éd.), op. cit., p. 199-232 ; Th. Pécout, « Mémoire de l’État, gestion de la mémoire. À propos de deux cartulaires de la Chambre des comptes de Provence (1278 - c. 1332) », op. cit., p. 33 et n. 13.
66 Sur l’élaboration institutionnelle de la Chambre des comptes, voir supra n. 6.
67 B 262, fo 124 ; N. Coulet, « Aix, capitale de la Provence angevine », op. cit., p. 326.
68 Voir le récapitulatif et la bibliographie donnée par S. Palmieri, La Cancelleria del regno di Sicilia in età angioina, op. cit., p. 45-52, et surtout du même, « L’Archivio della Regia Zecca », dans, du même, Degli archivi napoletani. Storia e tradizione, Bologna, Il Mulino Napoli, Istituto italiano per gli studi storici, 2002, p. 321-353, et du même, « I registri della cancelleria angioina editi dagli archivisti napoletani », Le Eredità normanno-sueve nell’età angioina. Persistenze e mutamenti nel Mezzogiorno. Atti delle quindecesime giornate normanno-sueve, Bari, 22-25 ottobre 2002, G. Mosca (dir.), Bari, Dedalo, 2004, p. 381-406.
69 S. Palmieri, La Cancelleria del regno di Sicilia, op. cit., p. 36-37.
70 B 2, fo 75 : le 12 mars 1312, maître Pierre de Limocinio [sans doute pour Limovicinio], archivarius archivii regii Aquensis, assiste à l’hommage du procureur de l’évêque de Toulon Pons Martini, le précenteur et official Guillaume Amati, au juge mage et professeur de droit civil Nicola di Gioia, lieutenant du sénéchal, pour ses droits sur le castrum de Solliès, à Aix, dans l’auditoire des appels, en compagnie de Durand Giraudi, professeur de droit civil, Gilles Raymundi jurisperitus, Jean de Sancto Marco, notaire d’Aix, et du notaire Bernard Garde de Sisteron, rédacteur de l’acte.
71 B 382, 3 janvier 1287 : versement d’un arrérage à la reine de France Marguerite de Provence ; Pierre de Limovicinio est alors trésorier. B 1079, fo 1-1v (44 folios), l’auditor computorum Pierre de Limovicinio est commis le 8 octobre 1290 par le sénéchal Bérenger Gantelmi pour enquêter sur les biens des clercs et des non nobles dans le comté de Forcalquier. L. Blancard, Notice sur la cour des comptes de Provence, leurs sources, leur composition, l’inventaire qui en a été rédigé, Marseille, 1879 ; R. Busquet, « Les origines de la cour des comptes de Provence », Provincia, t. 2, 1922, p. 148-159 ; V.-L. Bourrilly et R. Busquet, La Provence au Moyen Âge, op. cit., Marseille, 1924, p. 294, n. 1. Sur l’enquête de 1290 et le registre B 1079 : M. Hébert, « Les ordonnances de 1289-1294 et les origines de l’enquête domaniale de Charles II », Provence historique, t. 143, 1986, p. 45-57.
72 B 428, le 5 juillet 1305 : Hugues Honorati est alors notaire d’Aix et assiste comme témoin à un accord entre le précepteur des Hospitaliers de Gap, Raymond Ozasecha, le sénéchal et Jean Cabassole, professeur de droit civil, à propos des juridictions sur deux localités. Nous avons retracé les principales étapes de sa carrière dans Th. Pécout, « Mémoire de l’État ». Nous avons présenté une communication intitulée « Au cœur de l’Archivium regium : scribes d’archives en Provence angevine, milieu du XIIIe - fin du XIVe siècle » lors du colloque sur « Le Scribe d’archive dans l’Occident médiéval : formations, carrières, réseaux », Namur, mai 2012.
73 B 556, édit de Jeanne rédigé par le maître rational de la grande cour de Naples et lieutenant du protonotaire, Tommaso de Busilis, et adressé aux sénéchal, trésoriers, juge mage, maîtres rationaux résidant à Aix, procureurs fiscaux et archivaires de Provence.
74 B 7 (112 folios). N. Coulet, « Aix, capitale de la Provence angevine », L’État angevin, op. cit., p. 317-338 ; et « L’enquête de 1379 dans la viguerie d’Aix », Quand gouverner c’est enquêter. Les pratiques politiques de l’enquête princière, Occident, XIIIe-XIVe s., colloque d’Aix-en-Provence et Marseille, mars 2009, Th. Pécout (dir.), Paris, De Boccard, « Romanité et modernité du droit », 2010, p. 443-458.
75 O. Guyotjeannin, « Super omnes thesauros rerum temporalium : les fonctions du Trésor des chartes du roi de France (XIVe-XVe siècles) », Écrit et pouvoir dans les chancelleries médiévales. Espace français, espace anglais. Actes du colloque international de Montréal, 7-9 septembre 1995, Kouky Fianu, DeLloyd J. Guth (éd.), Louvain-la-Neuve, Fédération Internationale des Instituts d’Études Médiévales, 1997, p. 109-131.
76 N. Coulet, « Aix, capitale de la Provence angevine », op. cit., p. 326.
77 En 1356 déjà, on entreprend des travaux d’installation d’étagères pour disposer les registres et cartulaires sous le banc où sont calculés les comptes : N. Coulet, « Aix, capitale de la Provence angevine », op. cit., qui mentionne B 1599, f° 297, un compte de clavaire d’Aix.
78 O. Guyotjeannin, « Les méthodes de travail des archivistes du roi de France (XIIIe - début XVIe siècle) », Archiv für Diplomatik, t. 42, 1996, p. 295-373.
79 O. Guyotjeannin, « Super omnes thesauros », op. cit., p. 110.
80 Charles d’Anjou, comte de Provence et de Forcalquier, roi de Sicile et de Jérusalem (1246-1285).
81 Le monastère des dominicaines de Notre-Dame de Nazareth, situé au sud de la cité, et fondé par Charles II. N. Coulet, « Un couvent royal : les dominicaines de Notre-Damede-Nazareth d’Aix au XIIIe siècle », Cahiers de Fanjeaux, t. 8, Les Mendiants en Pays d’Oc au XIIIe siècle, Toulouse, 1973, p. 233-262.
Auteur
Professeur à l’Université Jean Monnet – Saint-Étienne – CERCOR, Laboratoire d’études sur les monothéismes (LEM, UMR 8584).
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