Mike Kenny : une poétique de la « re-génération »
p. 101-108
Texte intégral
1Cette recherche s’est nourrie non seulement de la lecture des textes de Mike Kenny publiés en France à l’intention de la jeunesse, mais aussi d’une rencontre passionnante avec l’auteur organisée par sa traductrice Séverine Magois, le 17 janvier 2014.
2En France, Mike Kenny est publié chez Actes Sud-Papiers, et son statut d’écrivain de théâtre rejoint celui de ses confrères français, comme Jean-Claude Grumberg, Joël Pommerat, ou Joseph Danan pour n’en citer que quelques-uns parus chez le même éditeur. La poétique de la « re-génération » chez Mike Kenny : telle sera l’objet de notre étude à partir des textes dont nous avons connaissance à ce jour. Mais il est intéressant préalablement de faire un détour sur les différentes postures de l’écrivain Mike Kenny dans son pays d’origine, la Grande-Bretagne. Mike Kenny n’écrit qu’à la commande, ce qui implique qu’il écrit environ huit pièces par an et qu’il a à son actif une centaine de pièces, alors qu’une dizaine à peine sont connues et éditées en France. En Grande-Bretagne très peu de ses pièces sont publiées et celles qui le sont appartiennent plutôt au genre adaptation de contes ou de romans populaires pour la jeunesse.
Mike Kenny, un écrivain à plusieurs facettes
3À l’origine, Mike Kenny a conquis le statut d’auteur, sans l’avoir voulu délibérément, en répondant aux demandes de la compagnie « Théâtre in Education » de la ville de Leeds, où en tant qu’acteur/enseignant, il concevait des spectacles pour les écoles. Sollicité ensuite par d’autres compagnies et d’autres groupes, il a toujours travaillé dans un contexte où il connaissait le public auquel il s’adressait. Pour lui, « le théâtre n’est pas une forme littéraire, c’est une forme sociale »1. Ses pièces sont donc rarement représentées dans les lieux dédiés que sont les théâtres traditionnels.
4Mike Kenny a toujours cherché à échapper au rôle de « gardien de la maison »2 tel qu’il serait souhaité par la société anglaise, qui sous l’influence des États Unis, est de plus en plus exigeante en matière de sûreté et de sécurité. Il refuse de protéger à tout prix les enfants du noir et du sombre ; au contraire, il souhaite que certains de ses textes leur permettent d’explorer le côté obscur de la vie et les parts d’ombre qui les entourent. Même lorsqu’il adapte les contes de fées traditionnels qui sont censés être rassurants pour les enfants, il glisse des questions ou des messages clandestins qui lestent les contes d’une autre coloration ou d’un questionnement plus complexe.
5De plus, Mike Kenny essaie souvent de donner une voix aux gens handicapés ou démunis qui vivent aux marges de la société et sont privés de parole. Selon lui, la rencontre avec ces groupes en difficulté est source d’énergie créatrice et le lieu d’expérimentation pour un « art authentique ». Il a proposé une adaptation du roman de Steinbeck Des souris et des hommes où le rôle de Lenny était joué par un jeune trisomique. Pierre de Gué a été écrit pour un groupe de handicapés physiques où un acteur sourd déployait une expressivité corporelle étonnante. Enfin la pièce Bouh ! est à l’origine une commande de la compagnie « Mind the Gap » où l’un des acteurs était atteint du syndrome d’Asperger, tandis que d’autres souffraient de handicaps plus ou moins lourds. Mike Kenny dit avoir beaucoup appris de cette compagnie et avoir partagé avec elle des moments très joyeux.
6Enfin Mike Kenny a un autre pan de son activité théâtrale totalement méconnue en France. Dans sa ville de York, où il y a une forte tradition de mystères, il conçoit des aventures collectives qui fédèrent des collaborations avec différentes communautés de la ville. Il écrit par exemple pour 2000 acteurs quatorze heures de spectacle sur « le jugement dernier » ; elles seront finalement réduites à trois. En 2014 il écrit Blood and chocolate pour rendre hommage aux usines de chocolat aujourd’hui disparues et aux soldats de la grande guerre qui, au moment de leur départ, recevaient chacun une boîte de chocolat. Successivement différents espaces ont été pressentis, une fabrique de chocolat désaffectée, un cimetière, les bords de la rivière, ce qui a entraîné des variations dans le texte de la pièce, car Mike Kenny modifie son écriture en fonction des lieux. Dans le même esprit, Mike Kenny a adapté The Railwaychildren3, un des romans pour la jeunesse les plus populaires d’Angleterre. Cette commande émanait de la ville de York, où il y a un musée de la Locomotive. La pièce rencontra un tel succès qu’elle fut programmée à Londres dans la gare Victoria. Pour une fois, la presse nationale se déplaça et en rendit compte.
7La France découvre une partie des textes de Mike Kenny grâce aux traductions de Séverine Magois qui fait connaître son œuvre en France à partir de 1996. L’auteur toujours très sollicité par les nombreuses commandes qu’il reçoit, envoie ses textes à sa traductrice, qui les met de côté jusqu’au moment où elle a le temps de traduire une nouvelle pièce, en choisissant parmi celles qui l’ont le plus marquée ou celles qui ont le plus de chance d’avoir un avenir sur les scènes françaises. C’est ainsi qu’en 2011, Séverine Magois relit le texte Bouh ! qu’elle avait reçu deux ans plus tôt avec d’autres pièces de l’auteur. À la grande surprise de ce dernier, elle choisit de traduire Bouh ! : « Bonne pioche » dit la traductrice elle-même, puisque la pièce est immédiatement publiée chez Actes Sud-Papiers, collection Heyoka-Jeunesse ; elle est créée à la Comédie de Valence par Valérie Marinese en janvier 2013 et elle vient d’être reprise par Simon Delattre au théâtre de Sartrouville dans le cadre du festival Odyssées 78.
8Mike Kenny, dans un entretien dans Griffon en février 2009, dit qu’il écrit souvent pour un théâtre qui n’existe pas vraiment au Royaume Uni. Il ne partage pas une certaine propension au naturalisme, le kitchen sin writing, tel qu’Osborne l’avait introduit dans Looking back in anger. Alors que les jeunes auteurs britanniques de talent se tournent vers le cinéma et la télévision, Mike Kenny est depuis longtemps attiré par les mises en scène de ses pièces en France. « Il est difficile de dire qu’elle est cette sensibilité particulière que je rencontre en France mais elle s’accorde bien avec mon écriture »4.
« - Qui s’occupera de moi ? » ou les relations intergénérationnelles
9Dans l’étude qui va suivre, nous privilégierons trois pièces publiées en France où le lien générationnel ou intergénérationnel est très présent : il s’agit de Bouh ! parue en 2012, de Allez, Ollie à l’eau, pièce publiée en 2014 chez Actes Sud-Papiers et créée à la Comédie de Béthune par la Compagnie Odile Grosset-Grange, ainsi que de L’Oubliance parue en 2010 aux éditions Théâtrales Jeunesse.
Je crois que j’ai tout le temps un enfant présent à l’esprit. Écrire, c’est avoir une conversation avec cet enfant et souvent une conversation avec l’enfant et les adultes qui l’entourent. Je crois que dans mes pièces, on trouve souvent deux pièces : une pièce destinée à l’enfant et une pièce destinée aux adultes. Dans l’idéal, les enfants et les parents devraient assister ensemble à la représentation, pour que puisse s’instaurer un échange entre la scène et le spectateur, mais également parmi les spectateurs.5
L’observation des rapports parents et enfants, jeunes et vieux est une constante dans l’œuvre de Mike Kenny, qui se décline selon plusieurs variations, frère/ sœur, mère/fils, grand-père/petit-fils, arrière grand-mère/arrière petit-fils et même dans L’oubliance, une situation plus fantaisiste et paradoxale, où Tobias, 84 ans, le personnage le plus âgé, croit qu’il a dix ans, c’est-à-dire l’âge de son arrière petit fils Toby. « L’Oubliance parle de cet enfant que l’on garde en soi et l’idée était d’écrire comme une image en miroir d’une autre de les pièces, Le Jardinier ».
10Dans un entretien paru dans Ère de jeu, Mike Kenny dit :
J’espère que mes pièces posent des questions qui ont un sens pour nous en raison de notre humanité plutôt qu’en raison de notre âge. – Où va t-on quand on meurt ? ou – Qui s’occupera de nous ? sont des questions qui peuvent être abordées par un enfant de trois ans comme par une personne très âgée. Et ni l’un ni l’autre n’aura la réponse définitive.6
Ces questions très simples traversent de façon essentielle toute l’œuvre de Mike Kenny.
11Dans Bouh !, Mike Kenny met en présence et en parallèle dans le temps et l’espace deux fratries : Bouh et son frère Benny, condamnés à vivre ensemble depuis la mort de leur mère qui a fait promettre à Benny son fils ainé de s’occuper de son petit frère atteint du syndrome d’Asperger, et un deuxième couple nommé garçon/fille, mais dont on découvre qu’ils sont frère et sœur. Pour eux aussi la mère est absente, partie sans doute refaire sa vie ailleurs avec la venue d’un nouveau bébé. Le père dit qu’elle reviendra, mais qu’elle ne veut pas d’eux et il demande en attendant que le frère joue avec sa petite sœur. Que deviennent les enfants quand manque un parent de la génération supérieure. Cette question « Qui s’occupera de moi ? » revient de façon lancinante dans le texte de Mike Kenny.
Après la mort de Maman
Benny s’est occupé de moi.
Il n’a personne pour s’occuper de lui.
Il s’occupe de lui tout seul.
Benny questionne aussi le frère de l’autre fratrie : « Qu’est ce qu’elle a dans la tête votre mère ? Elle devrait mieux s’occuper de vous ».
12Et plus loin dans le texte :
Qui s’occupe des enfants dehors ?
Je ne sais pas. Personne.
Quelqu’un devrait s’occuper d’eux.
Bouh : Il n’y a personne qui regarde de là-haut et qui prend des photos ?
Benny : Non
Bouh : Maman, au paradis ?
Benny : Non. Non. Il n’y a personne là-haut. Mais tu peux voir partout où tu veux. Tu te souviens quand on est allés à Blackpool l’été dernier, tu peux voir aussi ça si tu veux. Regarde.
Bouh : Partout où on veut ?
Benny : Partout. Partout où tu veux. Tu peux calculer un itinéraire. Tu peux lui demander de te calculer un itinéraire. Essaie.
Bouh : Non
Benny : Comme tu voudras.
Bouh : J’aimerais qu’il y ait quelqu’un qui regarde de là-haut. Qui s’occupe de nous.
Benny : Je m’occupe de toi.
Ce questionnement qui porte tour à tour sur la transmission, l’engagement, l’au-delà et qui devient parfois presque métaphysique, est masqué habilement par Mike Kenny qui fictionne ces interrogations en introduisant la rumeur d’un fait divers qui plane dans tous les esprits, y compris ceux des quatre protagonistes : la disparition de Kelly Spanner alimente les fantasmes de tous les voisins, la presse en fait ses gros titres et chacun soupçonnant un sadique, un pédophile, un meurtrier cherche un bouc émissaire.
13Le texte offre ainsi la possibilité de plusieurs narrations en même temps. A priori on peut penser que Mike Kenny se laisse enfermer dans des thèmes mélancoliques du monde contemporain : la peur de l’anormalité, une certaine décadence de l’espèce humaine, un monde social où règnent la méfiance, la délation et où tout ce qui est différent est mal vu. Mais à y regarder de plus près, Mike Kenny aborde le sujet de telle manière que finalement il fait apparaître un autre pan de la réalité et délibérément il choisit de superposer deux visions du même objet théâtral et parfois même deux histoires.
14Ainsi si Mike Kenny peut paraître en proie à une vision pessimiste du monde, rendant compte de peurs très actuelles, il est physiquement optimiste dans le geste d’écrire et grâce à la vitalité de son écriture, il déjoue une perception univoque pour tisser un réseau complexe d’effets de sens, révélant au delà d’un sujet trop évident, d’autres enjeux et les émotions qui leur sont liées.
Une écriture du décalage et de l’humour
15L’acte d’écrire permet à Mike Kenny de déplacer son thème le plus apparent et de proposer au lecteur plusieurs voyages dans le texte. Cette stratégie poétique du décalage offre une plongée dans différents univers qui se répondent souvent d’une pièce à l’autre.
16L’humour de l’écrivain se traduit dans l’humour de ses personnages ; il fonctionne comme un antidote à l’excès émotionnel : dès le début de Bouh, dans une note préliminaire, l’auteur écrit : « Un petit mot sur Bouh. Il a un grand sens de l’humour. Qui repose souvent sur la dimension étrange et absurde de la langue anglaise ». Cette dimension « étrange et absurde » de la langue anglaise est souvent un casse-tête pour la traductrice Séverine Magois qui a évoqué au cours de l’entretien la difficulté qu’elle avait à traduire certains jeux de mots ou ce qu’elle appelle des « nothernism », c’est-à-dire des idiomes qui n’appartiennent qu’à la langue anglaise parlée au nord de l’Angleterre.
17Au début du prologue, comment ne pas deviner l’humour de Mike Kenny lui-même à travers la parole partagée de trois des protagonistes : le glissement de « Beau » à « Bouh » induit dès le début de la pièce, par le jeu sur les mots et les sonorités, l’absurdité de la rumeur et de la discrimination. Mais l’économie des mots et leur concision, la condensation de certaines phrases proposent une musique presque racinienne telle que les mots opèrent à plusieurs niveaux. La traductrice Séverine Magois en est consciente, elle qui s’attache à ne pas interpréter, mais à créer un rythme au plus proche de l’original.
Bouh : Quand je suis né, mes parents m’ont appelé Beau. Ça dit bien ce que ça veut dire.
Le garçon : Avec le temps, les années passant, les autres enfants se mirent à l’appeler Bouh.
La fille : Même si personne ne se souvenait si c’était parce qu’il avait peur d’eux ou qu’ils avaient peur de lui.
Le garçon : Même s’ils ne le voyaient jamais.
La fille : C’était peut-être pour ça.
L’humour se manifeste aussi dans l’absurde de la logique poussée à l’extrême par Bouh. Les symptômes de son syndrome d’Asperger permettent à l’auteur de mettre dans la bouche de Bouh des commentaires qui sont des déductions décalées sous couvert d’une grande rationalité.
De la fenêtre de devant, on peut voir le parc à voitures
Où on met les voitures
Et le parc où jouent les enfants.
Les voitures ne jouent pas dans le parc à voitures.
Et plus loin :
Ça, c’est la pièce à vivre. C’est là qu’on vit.
En fait, dans les autres pièces aussi on est en vie.
De la même manière, « prendre les mots au pied de la lettre » se retrouve dans Allez, Ollie, à l’eau où sont en présence deux personnages Ollie et son arrière grand-mère Mamie Olive qui, s’étant cassé une jambe, est invitée par son fils à séjourner chez lui, mais faute de place, elle doit occuper la chambre de son arrière petit-fils :
Tu es mon arrière grand-mère, ça veut dire que tu es vieille. Tu n’es pas du genre à rester en arrière et je ne vois pas ce qu’il y a de grand chez toi. Et (en plus) tu as pris ma chambre.7
Ollie va jusqu’à imaginer que l’humour peut devenir une épreuve olympique :
Mon père a toujours dit que je parle comme je respire, et il dit aussi que si la parole était une épreuve olympique, je la remporterais haut la main. Il se croit drôle, du coup je lui réponds que si l’humour était une épreuve olympique, il serait sûr de perdre.8
Le prologue de Bouh ! annonce déjà un autre thème récurrent chez Mike Kenny, celui du traitement du temps, de l’avant et de l’après, d’un âge d’or qui est celui où les mères vivaient encore et où les enfants avaient une famille qui leur donnait des devoirs et des interdits mais qui créait des relations intimes et privilégiées entre les êtres, alors que le temps d’après le départ des mères n’apporte qu’un monde chaotique et incertain :
Avant, je mangeais les bonbons ; Maman disait que j’étais un bec sucré.
Je mangeais trop de sucreries.
Avant je sortais
J’ai le droit d’avoir des ciseaux, maintenant oui, avant non…
Je n’aime pas le changement
Je ne vois pas l’intérêt
Et je n’aime pas ça
Pourtant les gens peuvent changer
Je viens de le faire
L’écriture de Mike Kenny travaille le manque de l’autre, de la parole de l’autre. La mise en présence de plusieurs générations n’a pas pour but de décrire la vieillesse comme un état qui s’opposerait de façon manichéenne à la jeunesse ou à l’adolescence ; c’est plutôt une manière de questionner l’absence avec urgence, frénésie et fantaisie.
18L’écriture de Allez, Ollie à l’eau rend compte d’une rencontre racontée à deux voix, avec pour les deux personnages, la même énergie, les mêmes questions, les mêmes façons de se couper la parole, de rire, de s’emporter et c’est une même pulsation d’écriture qui traduit l’élan vital de Mamie Olive et de son arrière petit-fils. Ces deux univers qui pourraient être antinomiques deviennent, grâce à l’apprivoisement mutuel et à la transmission, des mondes parallèles. Le rythme de l’écriture déjoue le caractère narratif du récit par une forme jubilatoire qui jongle avec les répétitions, les reprises, les formes fuguées ou en canon, la brièveté des phrases, des mots, leur écho, leur résonance. Chez Mike Kenny, l’esthétique se met au service de l’éthique.
19Si l’on pousse jusqu’au bout ce principe des « vases communicants » entre les générations, on obtient la pièce L’Oubliance, où Tobias, quatre-vingt quatre ans croit avoir dix ans, et lui aussi appelle sa maman. Mike Kenny précise que l’acteur le plus jeune jouera le personnage le plus âgé et vice versa.
20C’est à cet échange, au sens propre et au sens figuré, entre les âges, que nous convie Mike Kenny, à cette « trans-fusion ». Le dialogue qui se joue sur scène entre les jeunes et leurs parents présents ou absents, leurs grands-parents ou leurs arrière grands-parents, Mike Kenny souhaite le déclencher aussi parmi les spectateurs jeunes et adultes :
J’ai toujours tendance à me dire que la fonction d’une pièce de théâtre n’est pas d’instruire le public, de transmettre de l’information. Je suis convaincu que les spectateurs entrent dans la salle en sachant tout ce qu’ils ont besoin de savoir. Et le rôle du théâtre est de rendre cela visible, si bien qu’ils repartiront en disant « maintenant, je comprends ce que je savais déjà ». C’est en cela, je pense, que c’est comme un rêve, car quand on s’endort, on entre en relation avec son mécanisme interne, sa vie intérieure.9
21Dans cette confrontation générationnelle, Mike Kenny crée un espace-temps où ses personnages se trouvent en présence de repères différents pour les uns et pour les autres. Dans ce vacillement des repères, ils deviennent plus attentifs et perçoivent, voient, écoutent des choses que sinon ils n’auraient pas perçues. « Le trouble est un état d’ouverture au sens ».10
22Ainsi Mike Kenny place le spectateur enfant ou adulte dans une traversée de sensations et d’émotions toujours en friction avec une écriture retenue et maîtrisée. Avec une pulsation d’écriture très rythmée, en créant la suspension de l’étonnement, il entraîne le spectateur sur le chemin du poème. En renouvelant de pièce en pièce un geste de surprise et de décalage, Mike Kenny offre au spectateur une invitation à un voyage singulier qui est à la fois ouverture au monde et méditation personnelle.
Notes de bas de page
1 Mike Kenny : citation extraite de l’entretien du 17/01/2014.
2 Mike Kenny, idem.
3 The RailwayChildren, E. Nesbit, Wordsworth Classics, Hertfordshire.
4 « J’étais un enfant solitaire et taciturne… », Griffon, entretien avec M. Kenny, février 2009.
5 « Le théâtre est comme un rêve », Ubu n° 46, Mike Kenny, Marc Lainé et Séverine Magois, entretien avec Ch. Boiron, p. 46.
6 « Entretien avec Mike Kenny, revue Ère de jeu, mai 2010 (document fourni par Séverine Magois).
7 Mike Kenny, Allez, Ollie, à l’eau, extrait d’un premier état du manuscrit, prêté par Séverine Magois, avant la publication chez Actes Sud-Papiers.
8 Mike Kenny, idem.
9 « Le théâtre est comme un rève », Ubu, n° 46, op. cit., p. 47.
10 « L’instabilité du voyage », Joël Pommerat, Pouvoir de l’émotion, OutreScène, n° 11, p. 88.
Auteur
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